RĂ©alisĂ©par : Zabou Breitman. Distribution : Daniel Auteuil, Marie-JosĂ©e Croze, Florence Loiret-Caille. Genre : Drame Romantique. DurĂ©e : 1h52. Moyenne des internautes : 1.5/5. Synopsis. En une nuit, Pierre va partager avec sa belle-fille ChloĂ©, ce grand secret qui le hante depuis vingt ans, celui qui le mit face Ă  lui-mĂȘme, Ă  ses contradictions et Ă  ses choix, Ă  son rĂŽle d'homme Vouspouvez regarder x ligne si vous aimez le premier. regarder gratuitement, streaming, Aucune connexion Internet n'est nĂ©cessaire que si vous voulez regarder, vous pouvez The Hobbit- The Desolation of Smaug film complet des films documentaires et des films.Maintenant il est facile de regarder un film, vous pouvez le faire sur votre chambre GRATUIT! et dĂ©couvrir Vouspouvez regarder x ligne si vous aimez le premier. regarder gratuitement, streaming, Aucune connexion Internet n'est nĂ©cessaire que si vous voulez regarder, vous pouvez voir Ender's Game film complet des films documentaires et des films.Maintenant il est facile de regarder un film, vous pouvez le faire sur votre chambre GRATUIT! et dĂ©couvrir ce que les RĂ©gressionFilm Streaming Complet VF 2015 Streaming Vf ~ RĂ©gression Film Complet, Streaming Vf HD en Francais, RĂ©gression streaming vf et film complet 2015 Minnesota, 1990 Linspecteur Bruce Kenner enquĂȘte sur un crime rĂ©voltant dont la jeune Angela accuse son pĂšre, John Gray Lorsque John avoue sa culpabilitĂ© de façon tout Ă  fait inattendue Filmstreaming La Couleur des sentiments streaming VF film megavideo: Description : Evocation de la vie des domestiques et serviteurs afro-amĂ©ricains chez une riche. 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L’occasion pour Zabou Breitman, passionnĂ©e par le thĂšme de la mĂ©moire, de tourner avec Daniel Auteuil, dont elle dit qu’il l’a toujours beaucoup Ă©mue dans ses grands rĂŽles d’amoureux. Une rĂ©fĂ©rence, entre autres, aux personnages que le comĂ©dien a incarnĂ©s dans La fille sur le pont de Patrice Leconte, Un cƓur en hiver de Claude Sautet ou encore Jean de Florette et Manon des sources de Claude Berri. Deux actrices donnent tour Ă  tour la rĂ©plique Ă  Daniel Auteuil Florence Loiret-Caille, repĂ©rĂ©e par Zabou Breitman dans le film de JĂ©rĂŽme Bonnell J’attends quelqu’un, et Marie-JosĂ©e Croze, rĂ©vĂ©lĂ©e par son Prix d’interprĂ©tation cannois en 2003 pour Les Invasions barbares, et qui a rĂ©guliĂšrement tournĂ© pour le cinĂ©ma français depuis. C’est elle qui interprĂšte le grand amour de Pierre, un personnage solaire qui lui offre un duo trĂšs Ă©mouvant avec Daniel Auteuil. Dans le mĂȘme genre vous pouvez trouver MADEMOISELLE CHAMBON Il raconte lui aussi la passion adultĂšre d'un homme tentĂ© de de tout quitter. ou encore NO ET MOI PrĂ©cĂ©dente adaptation d'un roman contemporain par Zabou Breitman, dĂ©jĂ  coĂ©crite AgnĂšs De Sacy.. © Association AVH 2, rue LĂ©on Patoux 51100 Reims Cedex 2, FranceSite rĂ©alisĂ© par CrĂ©ation de site internet Reims How To TĂ©lĂ©charger Je l'aimais 1080pđŸ“œ Je l'aimais 2019 720p, 1080p, BrRip, DvdRip, Haute qualitĂ© 🎆Obtenir Velocity et Prix de Film TĂ©lĂ©charger sitesÊtes-vous anxieux Ă  chercher et Ă  utiliser le meilleur Movie TĂ©lĂ©charger site? Vous devez Begin recherche de l'un PROPER maintenant. Il pourrait ĂȘtre un fastidieux tĂąche vous faire. C'est parce que il ya simplement trop beaucoup de tels sites Web qui sont fonctionnement Across le Internet aujourd'hui. Comme le nombre de personnes comme vous croĂźt continuellement, le nombre de membres sites qui offrent service peut Ă©galement ĂȘtre Rising. 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Il na pas dambition grandiose, dailleurs, on le voit tout le long aucune scĂšne ne se veut super tire-larmes, aucune scĂšne ne se veut prise de tĂȘte. Ce film, on le traverse avec un sourire bĂ©at de bout en bout. Cest une grande dose de bonne humeur comme on ressent trĂšs rarement au visionnage, parce quil est dune lĂ©gĂšretĂ©.. La procĂ©dure pour demander un RĂ©fĂ©rendum dInitiative PartagĂ©e RIP sur lavenir dADP a Ă©tĂ© gagnĂ©e, cest la premiĂšre Ă©tape dun processus complexe et cest une premiĂšre en France! 8 au 10 avril 2021 Secours Expo Paris Porte de Versailles Hall If you take this verdict concerning AVG VPN protection feature, Venez visiter des entreprises, nous rencontrer sur les salons ou participer Ă  nos rĂ©unions de travail Rencontres Ă  elizabethtown streaming filmze Gwiazdaewangelizacji Les acteurs principaux et Ă  la premiĂšre du film au. 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Que provoque le virus quand il simmisce dans un couple ou une famille? Nos vies intimes-PubliĂ© le 23 mai 2020 Ă  1100 La violence contre les femmes et les fillettes est la violation des droits humains la plus rĂ©pandue au monde. Amnesty International veut mettre un terme Ă  ce scandale des droits humains, en sassociant aux mouvements de femmes qui luttent contre cette violence depuis des annĂ©es, dans le monde entier. Le mariage avec les EuropĂ©ens est devenu la voie la plus sĂ»re et, pour beaucoup, la seule permettant de sortir du Cameroun, de progresser selon lexpression dune femme soignĂ©e qui, sans mĂ©nagement, demande Ă  sa fille Rose, 22 ans de se rendre plus attirante. Souris, au moins! Les trois frĂšres de Rose sont diplĂŽmĂ©s, en droit et en gestion. Ce sont des Ă©tudiants moyens qui se sont vu refuser leurs demandes de visa Ă©tudiant, la France nacceptant plus que les meilleurs, explique la quinquagĂ©naire, professeure de comptabilitĂ©. 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Le mariage gris est souvent Ă©voquĂ©, Ă  tort ou Ă  raison, peu importe, personnellement, je nemploierai pas le terme mariage gris, car dans le sens strict de celui-ci, il faut savoir que la sĂ©paration arrive trĂšs vite, parfois mĂȘme avant que le conjoint Ă©tranger nait acquis la nationalitĂ© française, lessentiel pour celui-ci Ă©tant de fuir son pays pour arriver en France ou en Europe et se dĂ©brouiller pour stabiliser sa situation ensuite par une autre voie. The consignments have been immediately conveyed by officials of the Ministry of Higher Education to the towns that host universities in Cameroon. The statutory recipients are the following the eight State Universities, the Panafrican University, the Congo-Cameroon Inter-States University in Sangmelima, the African Institute of Mathematical Sciences based in Limbe, the African Institute for Computer Sciences lAI, the four higher education schools with special status National Advanced school of Public Works, National Institute of Youth and Sports, National Advanced School of Post, Telecommunication and Information and Communication Technology, the Nautical Arts and Fisheries Institute in Limbe, many lay and confessional Institutes of private higher education found over the entire territory-Quand as tu pris conscience de la manipulation de ton ex femme? Nicholls Island est une Ăźle Ă  quelques centaines de mĂštres au large de Bimbia, dans la rĂ©gion du Sud-Ouest, au Cameroun. Elle a servi de Completing the CAPTCHA proves you are a human and gives you temporary access to the web property. Article 1 Sont, Ă  compter de la date de signature du prĂ©sent arrĂȘtĂ©, nommĂ©s aux postes ci-aprĂšs au MinistĂšre de lEnseignement SupĂ©rieur. Quelques mois plus tard, premier sĂ©jour Ă  YaoundĂ© Jai dĂ©couvert une trĂšs belle femme. Le sĂ©jour a Ă©tĂ© merveilleux. Toute sa famille me maternait. Il rentre en France au bout de quinze jours puis y retourne quatre fois quatre mois en tout On sentendait si bien quon a dĂ©cidĂ© de faire construire une maison Ă  10 kilomĂštres de la capitale. Javais ouvert un compte Ă  YaoundĂ© Ă  son nom. Tous les mois, je lui versais de largent correspondant Ă  lachat du terrain et du matĂ©riel. On ma condamnĂ© Ă  lui verser une pension et une provision. On nĂ©tait mĂȘme pas divorcĂ©. Venez rencontrer et poser vos questions Ă  un acadĂ©micien! Rencontre avec Alain Connes, membre de Comment procĂ©der pour entrer en contact avec un correspondant sur Internet? Le procĂ©dĂ© est simple et facile, explique Marcelle. Il suffit de sinscrire et dentrer dans un site destinĂ© aux rencontres entre hommes et femmes pour dialoguer en direct. Une fois que votre annonce est en ligne, vous recevez une multitude de messages. Certains sites sont prisĂ©s par les femmes qui recherchent un mari blanc sur Internet Certains sont payants, dautres pas. Et si cette recherche dauthenticitĂ© passait par les mots? Oui, contrairement aux a priori, les mots comptent plus que jamais, mĂȘme Ă  lĂšre de la rencontre Rencontres et Amour avec femmes mures au cameroun-Home Facebook If you are on a personal connection, like at home, you can run an anti-virus scan on your device to make sure it is not infected with malware. Venez satisfaire vos dĂ©sirs sensuels et plaisir intense sans tabous avec moi. Jouissance intense et plaisir assurĂ© Je reçois a lhĂŽtel a mes frais et je me dĂ©place aussi. Une publication partagĂ©e par leomessi le 11 Juin 2020 Ă  12 03 PDT Trouver des trajets adaptĂ©s aux voyageurs en fauteuil roulant Aucun trajet vĂ©lo ne vous sera proposĂ© Une visite fait toujours plaisir. Si ce nest pas au dĂ©part, cest Ă  larrivĂ©e-Proverbe sĂ©nĂ©galais Les habituĂ©s du coin La mĂšre de Julien, infirmiĂšre hospitaliĂšre, a probablement contaminĂ© son mari au Covid-19. Que provoque le virus quand il simmisce dans un couple ou une famille? Nos vies intimes-PubliĂ© le 23 mai 2020 Ă  1100 La violence contre les femmes et les fillettes est la violation des droits humains la plus rĂ©pandue au monde. Amnesty International veut mettre un terme Ă  ce scandale des droits humains, en sassociant aux mouvements de femmes qui luttent contre cette violence depuis des annĂ©es, dans le monde entier. Le mariage avec les EuropĂ©ens est devenu la voie la plus sĂ»re et, pour beaucoup, la seule permettant de sortir du Cameroun, de progresser selon lexpression dune femme soignĂ©e qui, sans mĂ©nagement, demande Ă  sa fille Rose, 22 ans de se rendre plus attirante. Souris, au moins! Les trois frĂšres de Rose sont diplĂŽmĂ©s, en droit et en gestion. Ce sont des Ă©tudiants moyens qui se sont vu refuser leurs demandes de visa Ă©tudiant, la France nacceptant plus que les meilleurs, explique la quinquagĂ©naire, professeure de comptabilitĂ©. Et comme la famille nest liĂ©e Ă  aucun gros bonnet du rĂ©gime, ils nont aucune chance de dĂ©crocher une bonne place dans ladministration. Si Rose fait sa vie en Europe, elle Ă©vitera Ă  ses frĂšres de devenir vendeurs Ă  la sauvette. Estimation du nombre de couples formĂ©s sur les sites du groupe Meetic en Europe. Chiffre obtenu par lextrapolation des rĂ©sultats dune enquĂȘte rĂ©alisĂ©e par Research Now en avril 2018, sur 59 931 personnes rĂ©sidant en Europe France, Royaume-Uni, Allemagne, Pays-Bas, Italie, Espagne et SuĂšde ĂągĂ©s de plus de 18 ans, Ă  la population totale de cette tranche dĂąge Source eurostat 2018. Il rĂ©sulte de cette Ă©tude que 6 des personnes interrogĂ©es ont dĂ©clarĂ© avoir Ă©tĂ© en couple avec une personne rencontrĂ©e sur un des sites du groupe Meetic. Le mariage gris est souvent Ă©voquĂ©, Ă  tort ou Ă  raison, peu importe, personnellement, je nemploierai pas le terme mariage gris, car dans le sens strict de celui-ci, il faut savoir que la sĂ©paration arrive trĂšs vite, parfois mĂȘme avant que le conjoint Ă©tranger nait acquis la nationalitĂ© française, lessentiel pour celui-ci Ă©tant de fuir son pays pour arriver en France ou en Europe et se dĂ©brouiller pour stabiliser sa situation ensuite par une autre voie. The consignments have been immediately conveyed by officials of the Ministry of Higher Education to the towns that host universities in Cameroon. The statutory recipients are the following the eight State Universities, the Panafrican University, the Congo-Cameroon Inter-States University in Sangmelima, the African Institute of Mathematical Sciences based in Limbe, the African Institute for Computer Sciences lAI, the four higher education schools with special status National Advanced school of Public Works, National Institute of Youth and Sports, National Advanced School of Post, Telecommunication and Information and Communication Technology, the Nautical Arts and Fisheries Institute in Limbe, many lay and confessional Institutes of private higher education found over the entire territory-Quand as tu pris conscience de la manipulation de ton ex femme? Nicholls Island est une Ăźle Ă  quelques centaines de mĂštres au large de Bimbia, dans la rĂ©gion du Sud-Ouest, au Cameroun. 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Prenez RDV en ligne avec Cabinet Mdical Val de France Cabinet mdical. Adresse 3 Avenue Pierre Semard, 95400 Villiers-le-Bel Je cherche femme riche celibataire Site de rencontre ipad gratuit Recherche. Prostituees rencontre fille juive dating femmes villiers le bel Marvel s Iron Fist-La navigation meilleur site de rencontre free rencontre cabourg rencontre femme luxembourg belgique. Femme villiers le bel Tlphone 03 44 08 50 13 Prenez rendez-vous en ligne chez votre Mdecin gnraliste, Dr. KARIMA DAHMOUNE Villiers Le Bel 95400 La nouvelle srie de Hiro Mashima, lauteur de Rave et Fairy Tail, en sortie simultane avec le Japon. Commencer Edens Zero. Platinum End-T 8. Takeshi Femme villiers le bel 12ime rencontre international v-strom en 2013 Conues par les chercheurs de ltablissement et leurs quipes, deux trois expositions Chat rencontre adolescent dating femmes villiers le bel ile maurice rencontre site de rencontre belge. Rencontres telephoniques. Com recit rencontre femme Pour les femmes atteintes dun cancer du sein Pour les patients traits par anticancreux oraux Mentions lgales Contact Espace presse Plan du site Histoire et archologie de Villiers-le-Bel. Plus tt, dans le courant du IXe sicle, une femme ge de plus de 50 ans avait t dpose sans. Cinq silos, dats de la fin du IIe sicle avant J-C. Avaient des dimensions imposantes 2 mtres Date de parution le 21 mai 2013. Eric Pliez. Lassociation Aurore, la mairie de Villiers-le-Bel et la mission locale ont cr le dispositif des studios jeunes Femme clibataire de 32 ans cherche homme pour rencontre srieuse. Du piano Rencontre femmes villiers le bel Highscores Rencontres amicales sur. Prostitues vichy Other Prostitute acronyms Dating femmes massy Download Auf Le jour o tout a bascul. Le jour o tout a bascul 53. Prte a tout pour largent. A la suite dun vnement imprvu, des hommes et des femmes ont Dlai 8-12 semaines. Site de rencontre pour les moches rencontre femme bahrein 975 00. 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Dates samedi 22 et dimanche 23 Rencontre en belgique prix prostitue australie Office de Tourisme 2 rue Gnral De Gaulle 50300 Avranches Tl 02 33 58 00 22 dating femme le cannet Pour vos voitures, un trs bel abri avec une charpente bois. Loyer 1680 euros par mois. Honoraires la charge du locataire 604. 80euros dont 151. 20euros Date de publication 13022017-Logementimmobilier 9. Le syndic est tenu de convoquer une assemble gnrale au moins une fois par an. Sil manque Flay Mode Villiers le Bel Vtements femmes horaires, avis, retrouvez les coordonnes et informations sur le professionnel 78 100 cm ALU. Historique rencontre portugal espagne Paraboles de 78 100 cm ALU. Rencontres du 3e type dpstream rencontre femme sexe livry gargan Villiers-le-Bel 2me Salon des Collectionneurs 95400-Brocante. Enghien-les-Bains Bourse aux Vtements Femme, Homme, Enfant. 95880-Bourse aux. Post navigation Î±ÎœÎ±ÎłÎœÎżÏ€ÎżÏ…Î»ÎżÏ… 44 ÎșÎżÎ»ÎœÎ±ÎșÎč ÎșααΌΔρÎčÎŒ α αγγλÎčÎșÎŹ Î•ÎŻÎœÎ±Îč η φύη Μ αΜΞρώπΜ Μα ÎŒÎ±ÎžÎ±ÎŻÎœÎżÏ…Îœ Homme Maghrebin.. La cinquantaine. Puissant.. Doux. Calineux..tactile.. Cherche Ă  vivre une histoire sans histoire.. Ni futur.. Une histoire ou on peut tout faire.. Sans prise de tĂ©te ni.. Rester connectĂ© Se connecter Pas encore de compte? SociĂ©tĂ© RADHIA ZARGA Ă  VILLIERS-LE-BEL CA, rĂ©sultats, bilan gratuit, SIRET, dirigeants, solvabilitĂ©, n Ce message saffichera sur lautre appareil. Pourquoi voyez-vous ce message? Cette rencontre sera suivie dun couscous agrĂ©mentĂ© dune surprise! AccĂ©dez aux numĂ©ros des entreprises en illimitĂ© et sans publicitĂ©. 2020 SOCIETE SAS-Reproduction interdite-Sources privĂ©es, INPI, INSEE, Service privĂ© distinct du RNCS-DĂ©claration CNIL n 2073544 v 0 AccĂ©der au service pour consulter une fiche entreprise, indiquez son nom, son n de SIREN ou un de ses dirigeants. Comme chaque soir, je minstalle confortablement dans mon canapĂ© et jai encore oubliĂ© dĂ©teindre la lumiĂšre de ma cuisine. Je nai pas envie de me lever alors je dis tout simplement OK Google, Ă©teins la lumiĂšre de la cuisine. Le client doit vĂ©rifier Ă  la livraison lĂ©tat de sa commande et la conformitĂ© avec la facture jointe, en cas davarie sac dĂ©chirĂ©, etc. Il devra refuser le colis et mentionner par Ă©crit le motif de son refus. ConformĂ©ment Ă  la lĂ©gislation française en vigueur et plus particuliĂšrement Ă  la loi du 6 janvier 1978 dite Informatique et LibertĂ©s, vous disposez dun droit daccĂšs, de rectification et dopposition sur vos donnĂ©es personnelles. Vous vous engagez par ailleurs Ă  mettre Ă  jour vos donnĂ©es personnelles si nĂ©cessaire en utilisant les moyens mis Ă  votre disposition Ă  cet effet sur notre site. Vous pouvez poster un nouveau message afin dapporter toute correction, tout complĂ©ment dinformation ou toute prĂ©cision Ă  votre message initial. Vos donnĂ©es personnelles pourront ĂȘtre conservĂ©es dans nos bases de donnĂ©es aprĂšs la fermeture de votre compte, et ce, dans la seule finalitĂ© de rĂ©soudre tout litige, rĂ©gler tout problĂšme et faire appliquer nos Conditions dUtilisation. Ces donnĂ©es ne seront cependant plus accessibles en ligne. La fourniture en ligne du numĂ©ro de carte du Client et la validation finale de sa commande vaudront preuve de lintĂ©gritĂ© de la commande et de lexigibilitĂ© des sommes dues en exĂ©cution de ladite commande. FR Article et interview dans Rue 89 Strasbourg Se dĂ©placer est un combat pour les Strasbourgeoises Ă  pied, Ă  vĂ©lo ou en tram Théùtre Ă  Villiers-le-Bel. Toutes les piĂšces de théùtre Ă  ne pas manquer Ă  Villiers-le-Bel et aux environs. Agenda local des piĂšces de théùtre Ă  Villiers-le-Bel. Les arbres sont les gardiens de Royaumont. CrĂ©atrice par le passĂ© de plusieurs parcours musicaux dans lenceinte de labbaye, la violoncelliste, chanteuse et art-thĂ©rapeute Emmanuelle LizĂšre rĂ©cidivera au Festival 2020 avec un spectacle centrĂ© sur la for le style musical etou lambiance recherchĂ©e pour votre soirĂ©e dentreprise sur Villiers-le-Bel Il la mise quelque part, mais on ne sait pas oĂč, se lamentent les frĂšres de Nadia. Depuis le jour de sa disparition, ces derniers sont convaincus que Amirouche a tuĂ© leur sƓur. Le soir mĂȘme on le voyait dans ses yeux, se souvient Hassein. Quand on est rentrĂ©, on lui a demandĂ© oĂč Ă©tait Nadia. Il a rĂ©pondu Je vous jure, ce nest pas moi. Je nai rien fait. En 1970, Villiers compte environ 20 000 habitants. Dominique Foussard, Villiers-le-Bel-Saint-Didier, Églises du Val-dOise Pays de France, vallĂ©e de Montmorency, Gonesse, SociĂ©tĂ© dhistoire et darchĂ©ologie de Gonesse et du Pays de France, 2008, p 310. Le code Insee 95680 de la commune de Villiers-le-Bel est Ă©laborĂ© par lInstitut national de la statistique et des Ă©tudes Ă©conomiques Insee. Ce code Insee 95680 permet de classifier la population, les collectivitĂ©s et les entreprises, pour rĂ©aliser et analyser les donnĂ©es statistiques sur la ville de Villiers-le-Bel. Merci pour votre inscription, nous vous enverrons les informations de mise Ă  jour pour la sociĂ©tĂ© Ă  ladresse. Pour maintenir Ă  jour les informations sur le site nous avons besoin que chacun se sente concernĂ© et envoie ses remarques et corrections sur Cette adresse e-mail est protĂ©gĂ©e contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser. En indiquant le n de la fiche et la partie de la fiche concernĂ©e. Prenez RDV en ligne avec Cabinet Mdical Val de France Cabinet mdical. Adresse 3 Avenue Pierre Semard, 95400 Villiers-le-Bel Je cherche femme riche celibataire Site de rencontre ipad gratuit Recherche. 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Le code Insee 95680 de la commune de Villiers-le-Bel est Ă©laborĂ© par lInstitut national de la statistique et des Ă©tudes Ă©conomiques Insee. Ce code Insee 95680 permet de classifier la population, les collectivitĂ©s et les entreprises, pour rĂ©aliser et analyser les donnĂ©es statistiques sur la ville de Villiers-le-Bel. Merci pour votre inscription, nous vous enverrons les informations de mise Ă  jour pour la sociĂ©tĂ© Ă  ladresse. Olivia na pas eu le temps de rĂ©pondre que la sonnette retentit. Je me leva et me dirigea vers la porte. Je louvris, Ă  ma grande surprise je dĂ©couvris une jeune fille avec de longs cheveux bruns Niall Je vous ai rĂ©unis aujourdhui pour vous annoncer une grande nouvelle. NobodyHaveToKnowIt Au lieu de prendre les elounor shippers pour des kikoos, arrĂȘte dĂȘtre parano, gamine 1D4everlove En racontant sa rencontre avec Eleanor Calder, la jeune femme a Ă©crit sur son compte Instagram Je suis une grande fan de son look depuis longtemps maintenant. Elle avait une rĂ©union et elle est venue me voir juste aprĂšs. Elle Ă©tait adorable, elle a pris son temps, nous avons fait un cĂąlin et parlĂ© pendant un moment. Elle Ă©tait trĂšs gentille, elle ma demandĂ© des choses sur moi, sur mes vacances. Nous avons plaisantĂ© et rigolĂ©. CĂ©tait le meilleur jour de ma vie et je ne pourrais pas ĂȘtre plus heureuse. Une histoire absolument adorable et cette fan semblait vraiment conquise par cette rencontre. Nombreuses sont celles qui aimeraient avoir la chance de passer du temps avec leurs idoles. Dailleurs, il semblerait que parfois, la chance tourne. Ainsi, ÎÎżÎŒÎŻÎ¶ ÎŒÎœÎż ΕΝΑ ÎŒÏ€ÎżÏÎ”ÎŻ Μα υΜΔÎčφέρΔÎč Δ αυ Îż ÎșÎżÎŒÎŒÎŹÎč..-Surveille ton langage jeune fille! Et je men fiche de qui, qui a fait ça! Je veux juste le calme dans cette maison donc Jenna, oui cest moi tu retournes dans ta chambre! 14 Moi et Louis ne sont pas engagĂ©s, et nous navons pas un bĂ©bĂ©. -Ses parents biologiques sappellent Kim mĂšre et Murray pĂšre. Article spĂ©cial Anniversaire de Eleanor Calder-Personne ne peut toucher nos fans, Ă  lexception.. Tes bras, je savais exactement oĂč jĂ©tais censĂ©e Calder Comment Louis Tomlinson A Rencontre Eleanor Calder Personnages Malika Thompson, Liam Payne, Niall Horan, Louis Tomlinson, Harry Styles, Zayn Malik, Eleanor Calder, Perrie Edwards. You havent logged in. Et un lien vers ton blog ainsi que ta photo seront automatiquement ajoutĂ©s Ă  ton commentaire. Vous disposez dĂ©jĂ  dun compte sur avec lemail 19 Certaines personnes remarquent que je pouvais passer comme Ă©tant la sƓur de Louis, si nous nĂ©tions pas ensemble. veuillez tĂ©lĂ©charger la derniĂšre version de votre navigateur. Avantages prime vacances, mutuelle, carte de tickets restaurants, RTT. Les boxes Ă  partager mettent Ă  lhonneur plusieurs types de sushis afin que vous puissiez goĂ»ter Ă  tout ou presque et vous lanciez Ă  la dĂ©couverte de nouvelles associations de saveurs dans lun de nos! En effet, chez Planet Sushi, le fromage sinvite dans les sushis, et le saumon se dĂ©cline en version nature ou braisĂ©e, pour Ă©largir votre horizon culinaire et vous faire passer un moment inoubliable. Livraison de sushi Planet Sushi assure un service complet de livraison de Japonais Ă  domicile. Retrouvez sur la page de chaque restaurant Planet Sushi toutes les zones livrĂ©es, pour profiter dun plateau de sushis oĂč que vous soyez! La peut ĂȘtre effectuĂ©e Ă  la maison mais aussi sur votre lieu de travail. DĂ©gustez vos plats prĂ©fĂ©rĂ©s entre deux rĂ©unions ou devant votre film favori sans avoir Ă  vous dĂ©placer un coup de tĂ©lĂ©phone ou quelques clics en ligne suffisent pour avertir nos Ă©quipes des plats Japonais qui vous font envie ce soir ou ce midi. Votre commande est alors spĂ©cialement prĂ©parĂ©e pour vous. Chez Planet Sushi, pas de plats rĂ©chauffĂ©s ou dĂ©congelĂ©s!rnrnrn Nos restaurants de Sushis vous livrent en Francernrnrn Veuillez entrer vos informations pour vous connecter GrĂące Ă  ces trois jeux vous allez transformer un simple rendez en plan cul, comment? Cest.. IntĂ©rĂȘts communs Cuisine, Groupe de lecture Discussion, Restaurant, Jardinage Entretien paysager, Films VidĂ©os, Musique et concerts, IntĂ©rĂȘts politiques, Religion SpiritualitĂ©, Brocante AntiquitĂ©s Connaissance des dispositifs dorientation, daccompagnement professionnels et de la formation Vous disposez de connaissances techniques et connaissances de lenvironnement socio-Ă©conomique Avec nos sorties, faites des rencontres conviviales et partagez vos centres dintĂ©rĂȘt lors de nos soirĂ©es, dĂźners, activitĂ©s ou week-ends organisĂ©s partout en France. La conduite dentretiens individuels en face Ă  face je recherche une relation durable damour et serieuse. Issue dune formation Bac2 minimum, vous avez une expĂ©rience significative en insertion professionnelle etou recrutement et gestion de carriĂšre. Suivi des plannings ou des actions de dĂ©ploiement sur les consignes de la RSGX Jaime voyager, faire des ballades, courir sur le sable, faire du bodyboard, ballade en moto, faire les boutiques et surtout les magasins de matĂ©riaux et dĂ©co
 Et tant de choses. RĂ©gion Elles Ă©taient stationnĂ©es prĂšs dune habitation. Lincendie est survenu dans la nuit. FĂ©minine, gracieuse, sentimentale, naturelle, 68 ans, intĂ©ressĂ©e par les arts, la poĂ©sie, la philosophie et l Ă©mission TV Des racines des ailes, aime se promener en forĂȘt et au bord de l eau. Je recherche tendresse, sĂ©curitĂ©, auprĂšs d un homme aisĂ© 6776 ans attentionnĂ©, sincĂšre, Ă©picurien, cultivĂ© aimant la nature la mer la montagne, voyages et les soirĂ©es au coin du feu afin de dĂ©marrer une relation sĂ©rieuse basĂ©e sur la confiance et le respect mutuel. DĂ©localisable RĂ©gion La capacitĂ© daider le bĂ©nĂ©ficiaire Ă  concevoir et Ă  planifier un parcours de formation Ă  partir de ses ressources et capacitĂ©s Le fort de la pointe de Grave. DĂ©fendait lentrĂ©e de lestuaire. Cest actuellement une de l. Ne se visite pas. veuillez tĂ©lĂ©charger la derniĂšre version de votre navigateur. Avantages prime vacances, mutuelle, carte de tickets restaurants, RTT. Les boxes Ă  partager mettent Ă  lhonneur plusieurs types de sushis afin que vous puissiez goĂ»ter Ă  tout ou presque et vous lanciez Ă  la dĂ©couverte de nouvelles associations de saveurs dans lun de nos! En effet, chez Planet Sushi, le fromage sinvite dans les sushis, et le saumon se dĂ©cline en version nature ou braisĂ©e, pour Ă©largir votre horizon culinaire et vous faire passer un moment inoubliable. Livraison de sushi Planet Sushi assure un service complet de livraison de Japonais Ă  domicile. Retrouvez sur la page de chaque restaurant Planet Sushi toutes les zones livrĂ©es, pour profiter dun plateau de sushis oĂč que vous soyez! La peut ĂȘtre effectuĂ©e Ă  la maison mais aussi sur votre lieu de travail. DĂ©gustez vos plats prĂ©fĂ©rĂ©s entre deux rĂ©unions ou devant votre film favori sans avoir Ă  vous dĂ©placer un coup de tĂ©lĂ©phone ou quelques clics en ligne suffisent pour avertir nos Ă©quipes des plats Japonais qui vous font envie ce soir ou ce midi. Votre commande est alors spĂ©cialement prĂ©parĂ©e pour vous. Chez Planet Sushi, pas de plats rĂ©chauffĂ©s ou dĂ©congelĂ©s!rnrnrn Nos restaurants de Sushis vous livrent en Francernrnrn Veuillez entrer vos informations pour vous connecter GrĂące Ă  ces trois jeux vous allez transformer un simple rendez en plan cul, comment? Cest.. IntĂ©rĂȘts communs Cuisine, Groupe de lecture Discussion, Restaurant, Jardinage Entretien paysager, Films VidĂ©os, Musique et concerts, IntĂ©rĂȘts politiques, Religion SpiritualitĂ©, Brocante AntiquitĂ©s Connaissance des dispositifs dorientation, daccompagnement professionnels et de la formation Vous disposez de connaissances techniques et connaissances de lenvironnement socio-Ă©conomique Avec nos sorties, faites des rencontres conviviales et partagez vos centres dintĂ©rĂȘt lors de nos soirĂ©es, dĂźners, activitĂ©s ou week-ends organisĂ©s partout en France. La conduite dentretiens individuels en face Ă  face je recherche une relation durable damour et serieuse. Issue dune formation Bac2 minimum, vous avez une expĂ©rience significative en insertion professionnelle etou recrutement et gestion de carriĂšre. Suivi des plannings ou des actions de dĂ©ploiement sur les consignes de la RSGX Jaime voyager, faire des ballades, courir sur le sable, faire du bodyboard, ballade en moto, faire les boutiques et surtout les magasins de matĂ©riaux et dĂ©co
 Et tant de choses. RĂ©gion Elles Ă©taient stationnĂ©es prĂšs dune habitation. Lincendie est survenu dans la nuit. FĂ©minine, gracieuse, sentimentale, naturelle, 68 ans, intĂ©ressĂ©e par les arts, la poĂ©sie, la philosophie et l Ă©mission TV Des racines des ailes, aime se promener en forĂȘt et au bord de l eau. Je recherche tendresse, sĂ©curitĂ©, auprĂšs d un homme aisĂ© 6776 ans attentionnĂ©, sincĂšre, Ă©picurien, cultivĂ© aimant la nature la mer la montagne, voyages et les soirĂ©es au coin du feu afin de dĂ©marrer une relation sĂ©rieuse basĂ©e sur la confiance et le respect mutuel. DĂ©localisable RĂ©gion La capacitĂ© daider le bĂ©nĂ©ficiaire Ă  concevoir et Ă  planifier un parcours de formation Ă  partir de ses ressources et capacitĂ©s Le fort de la pointe de Grave. DĂ©fendait lentrĂ©e de lestuaire. Cest actuellement une de l. Ne se visite pas. Je l`aimais Je l'aimais de Anna Gavalda À Constance 1. - Qu’est-ce que tu dis ? - Je dis que je vais les emmener. Ça leur fera du bien de partir un peu
 - Mais quand ? a demandĂ© ma belle-mĂšre. - Maintenant. - Maintenant ? Tu n’y penses pas
 - J’y pense. - Enfin, mais qu’est-ce que ça veut dire ? Il est presque onze heures ! Pierre, tu
 - Suzanne, c’est Ă  ChloĂ© que je parle, ChloĂ©, Ă©coute-moi. J’ai envie de vous emmener loin d’ici. Tu veux bien ? -
 - Tu crois que c’est une mauvaise idĂ©e ? - Je ne sais pas. - Va chercher tes affaires. Nous partirons quand tu reviendras. - Je n’ai pas envie d’aller chez moi. - Alors n’y va pas. On se dĂ©brouillera sur place. - Mais vous ne
 - ChloĂ©, ChloĂ©, s’il te plaĂźt
 Fais-moi confiance. Ma belle-mĂšre protestait encore - Mais enfin ! Vous n’allez pas rĂ©veiller les petites maintenant quand mĂȘme ! La maison n’est mĂȘme pas chauffĂ©e ! Il n’y a rien lĂ -bas ! Il n’y a rien pour elles. Elles
 Il s’était levĂ©. Marion dort dans son siĂšge auto, le pouce au bord des lĂšvres. Lucie est roulĂ©e en boule Ă  cĂŽtĂ©. Je regarde mon beau-pĂšre. Il se tient droit. Ses mains agrippent le volant. Il n’a pas dit un seul mot depuis que nous sommes partis. Je vois son profil quand nous croisons les feux d’une autre voiture. Je crois qu’il est aussi malheureux que moi. Qu’il est fatiguĂ©. Qu’il est déçu. Il sent mon regard - Pourquoi tu ne dors pas ? Tu devrais dormir tu sais, tu devrais abaisser ton siĂšge et t’endormir. La route est encore longue
 - Je ne peux pas, je lui rĂ©ponds, je veille sur vous. Il me sourit. C’est Ă  peine un sourire. - Non
 c’est moi. Et nous retournons dans nos pensĂ©es. Et je pleure derriĂšre mes mains. 2. Nous sommes garĂ©s devant une station-service. Je profite de son absence pour interroger mon portable. Aucun message. Bien sĂ»r. Suis-je bĂȘte. Suis-je bĂȘte
 J’allume la radio, je l’éteins. Il revient. - Tu veux y aller ? Tu veux quelque chose ? J’acquiesce. Je me trompe de bouton, mon gobelet se remplit d’un liquide Ă©cƓurant que je jette aussitĂŽt. Dans la boutique, j’achĂšte un paquet de couches pour Lucie et une brosse Ă  dents pour moi. Il refuse de dĂ©marrer tant que je n’ai pas baissĂ© mon dossier. J’ai rouvert les yeux quand il a coupĂ© le moteur. - Ne bouge pas. Reste lĂ  avec les filles tant qu’il fait encore chaud. Je vais brancher les radiateurs Ă©lectriques dans votre chambre. Je reviendrai vous chercher. Encore priĂ© mon portable. À quatre heures du matin
 Suis-je bĂȘte. 3. Impossible de me rendormir. Nous sommes toutes les trois couchĂ©es dans le lit de la grand-mĂšre d’Adrien. Celui qui grince affreusement. C’était le nĂŽtre. Nous faisions l’amour en remuant le moins possible. Toute la maison savait quand vous bougiez un bras ou une jambe. Je me souviens des sous-entendus de Christine lorsque nous Ă©tions descendus le premier matin. Nous rougissions au-dessus de nos bols et nous nous tenions la main sous la table. Nous avions retenu la leçon. Nous nous prenions le plus discrĂštement du monde. Je sais qu’il va revenir dans ce lit avec une autre que moi, et qu’avec elle aussi, il soulĂšvera ce gros matelas et le jettera par terre quand ils n’en pourront plus. 4. C’est Marion qui nous rĂ©veille. Elle fait courir sa poupĂ©e sur l’édredon en racontant une histoire de sucettes envolĂ©es. Lucie touche mes cils Tes yeux sont tout collĂ©s. » Nous nous habillons sous les draps parce qu’il fait trop froid dans la chambre. Le lit qui gĂ©mit les fait rire. Mon beau-pĂšre a allumĂ© un feu dans la cuisine. Je l’aperçois au fond du jardin qui cherche des bĂ»ches sous l’appentis. C’est la premiĂšre fois que je me retrouve seule avec lui. Je ne me suis jamais sentie Ă  l’aise en sa compagnie. Trop distant. Trop mutique. Et puis tout ce qu’Adrien m’en a dit, la difficultĂ© de grandir sous son regard, sa duretĂ©, ses colĂšres, les galĂšres de l’école. Pareil avec Suzanne. Je n’ai jamais rien vu d’affectueux entre eux. Pierre n’est pas trĂšs dĂ©monstratif, mais je sais ce qu’il Ă©prouve pour moi », m’avait-elle confiĂ© un jour alors que nous parlions d’amour en Ă©queutant les haricots. Je hochais la tĂȘte mais je ne comprenais pas. Je ne comprenais pas cet homme qui s’économisait et rĂ©frĂ©nait ses Ă©lans. Ne rien montrer de peur de se sentir affaibli, je n’ai jamais pu comprendre ça. Chez moi, on se touche et on s’embrasse comme on respire. Je me souviens d’une soirĂ©e houleuse dans cette cuisine
 Ma belle-sƓur Christine se plaignait des profs de ses enfants, les disait incompĂ©tents et bornĂ©s. De lĂ , la conversation avait glissĂ© sur l’éducation en gĂ©nĂ©ral et puis la leur en particulier. Et le vent avait tournĂ©. Insidieusement. La cuisine s’était transformĂ©e en tribunal. Adrien et sa sƓur en procureurs, et, dans le box des accusĂ©s, leur pĂšre. Quels moments pĂ©nibles
 Si encore la marmite avait explosĂ©, mais non. Les aigreurs avaient Ă©tĂ© refoulĂ©es et l’on avait Ă©vitĂ© le gros clash en se contentant de lancer quelques piques assassines. Comme toujours. Comment cela eĂ»t-il Ă©tĂ© possible de toute façon ? Mon beau-pĂšre refusait de descendre dans l’arĂšne. Il Ă©coutait les remarques acerbes de ses enfants sans jamais y rĂ©pondre. Vos critiques glissent sur moi comme sur les plumes d’un canard », concluait-il toujours en souriant et avant de prendre congĂ©. Cette fois pourtant, la discussion avait Ă©tĂ© plus Ăąpre. Je revois encore son visage crispĂ©, ses mains refermĂ©es sur la carafe d’eau comme s’il avait voulu la briser sous nos yeux. J’imaginais toutes ces paroles qu’il ne prononcerait jamais et j’essayais de comprendre. Que saisissait-il exactement ? À quoi pensait-il quand il Ă©tait seul ? Et comment Ă©tait-il dans l’intimitĂ© ? En dĂ©sespoir de cause, Christine s’était tournĂ©e vers moi - Et toi, ChloĂ©, qu’est-ce que tu dis de tout ça ? J’étais fatiguĂ©e, je voulais que cette soirĂ©e se termine. J’en avais eu ma dose de leurs histoires de famille. - Moi
 avais-je ajoutĂ© pensive, moi, je crois que Pierre ne vit pas parmi nous, je veux dire pas vraiment, je crois que c’est une espĂšce de Martien perdu dans la famille Dippel
 Les autres avaient haussĂ© les Ă©paules et s’étaient dĂ©tournĂ©s. Mais pas lui. Lui avait relĂąchĂ© la carafe et son visage s’était ouvert pour me sourire. C’était la premiĂšre fois que je le voyais sourire de cette maniĂšre. La derniĂšre aussi peut-ĂȘtre. Il me semble qu’une certaine complicitĂ© est nĂ©e ce soir-là
 Quelque chose de trĂšs tĂ©nu. J’avais essayĂ© de le dĂ©fendre comme je pouvais, mon drĂŽle de Martien aux cheveux gris qui s’avance maintenant vers la porte de la cuisine en poussant devant lui une brouette pleine de bois. - Ça va ? Tu n’as pas froid ? - Ça va, ça va, je vous remercie. - Et les petites ? - Elles regardent leurs dessins animĂ©s. - Il y a des dessins animĂ©s Ă  cette heure-lĂ  ? - Pendant les vacances scolaires, il y en a tous les matins. - Ah
 parfait. Tu as trouvĂ© le cafĂ© ? - Oui, oui, merci. - Et toi, ChloĂ© ? À propos de vacances, tu ne dois pas
 - Appeler ma boĂźte ? - Oui, enfin, je n’en sais rien. - Si, si, je vais le faire, je
 Je me suis remise Ă  pleurer. Mon beau-pĂšre a baissĂ© les yeux. Il enlevait ses gants. - Excuse-moi, je me mĂȘle de ce qui ne me regarde pas. - Non, non, c’est pas ça, c’est juste que
 Je me sens perdue. Je suis complĂštement perdue
 Je
 vous avez raison, je vais appeler mon chef. - Qui est-ce, ton chef ? - Une amie, enfin je crois, je vais voir
 J’ai attachĂ© mes cheveux avec un vieux chouchou de Lucie qui traĂźnait dans ma poche. - Tu n’as qu’à lui dire que tu prends quelques jours de repos pour t’occuper de ton vieux beau-pĂšre acariĂątre
 suggĂ©ra-t-il. - Oui
 Je vais dire acariĂątre et impotent. Ça fait plus sĂ©rieux. Il souriait en soufflant sur sa tasse. Laure n’était pas lĂ . J’ai bafouillĂ© trois mots Ă  son assistante qui avait un appel sur l’autre ligne. Aussi appelĂ© chez moi. ComposĂ© le code du rĂ©pondeur. Des messages sans importance. Qu’allais-je donc imaginer ? Et de nouveau, les larmes sont venues. Mon beau-pĂšre est entrĂ© et reparti aussitĂŽt. Je me disais Allez, il faut pleurer une bonne fois pour toutes. Tarir les larmes, presser l’éponge, essorer ce grand corps triste et puis tourner la page. Penser Ă  autre chose. Mettre un pied devant l’autre et tout recommencer. » On me l’a dit cent fois. Mais pense Ă  autre chose. La vie continue. Pense Ă  tes filles. Tu n’as pas le droit de te laisser aller. Secoue-toi. Oui, je sais, je le sais bien, mais comprenez-moi je n’y arrive pas. D’abord qu’est-ce que ça veut dire, vivre ? Qu’est-ce que ça veut dire ? Mes enfants, mais qu’ai-je Ă  leur offrir ? Une maman qui boite ? Un monde Ă  l’envers ? Je veux bien me lever le matin, m’habiller, me nourrir, les habiller, les nourrir, tenir jusqu’au soir et les coucher en les embrassant. Je peux le faire. Tout le monde peut. Mais pas plus. De grĂące. Pas plus. - Maman ! - Oui, ai-je rĂ©pondu en me mouchant dans ma manche. - Maman ! - Je suis lĂ , je suis là
 Lucie se tenait devant moi, en chemise de nuit sous son manteau. Elle faisait tourner sa Barbie en la tenant par les cheveux. - Tu sais ce qu’il a dit Papy ? - Non ? - Il a dit qu’on irait manger au McDonald’s. - Je ne te crois pas, ai-je rĂ©pondu. - Eh bien si, c’est vrai ! C’est mĂȘme lui qui nous l’a dit. - Quand ? - Tout Ă  l’heure. - Mais je croyais qu’il dĂ©testait ça le McDo
 - Nan, il dĂ©teste pas ça. Il a dit qu’on ferait les courses et qu’aprĂšs, on irait tous au McDonald’s, mĂȘme toi, mĂȘme Marion, mĂȘme moi et mĂȘme lui ! Elle a pris ma main pendant que nous montions les escaliers. - Tu sais que j’en ai presque pas des habits ici. On les a tous oubliĂ©s Ă  Paris
 - C’est vrai, ai-je admis, on a tout oubliĂ©. - Alors tu sais ce qu’il a dit Papy ? - Non. - Il a dit Ă  Marion et Ă  moi qu’il allait nous en acheter quand on ferait des courses. Des habits qu’on pourrait choisir nous-mĂȘmes
 - Ah bon ? Je changeais Marion en lui chatouillant le ventre. Pendant ce temps, Lucie, assise au bord du lit, continuait d’aller lentement lĂ  oĂč elle voulait en venir. - Et il a dit qu’il Ă©tait d’accord
 - D’accord pour quoi ? - D’accord pour tout ce que je lui ai demandé  Malheur. - Tu lui as demandĂ© quoi ? - Des habits de Barbie. - Pour ta Barbie ? - Pour ma Barbie et pour moi. Les mĂȘmes pour nous deux ! - Tu veux dire ces horreurs de tee-shirts qui brillent ! ? - Oui, et mĂȘme tout ce qui va avec le jean rose, les baskets roses avec marquĂ© Barbie dessus, les chaussettes avec le petit nƓud
 Tu sais
 là
 Le petit nƓud derriĂšre
 Elle me dĂ©signait sa cheville. Je reposais Marion. - Souperrrbe, lui ai-je dit, tout vas ĂȘtrre soupperrrrrrrrrbe ! ! ! Sa bouche se tordait. - De toute façon, tous les trucs beaux, tu les trouves moches
 Je riais, j’embrassais son adorable moue. Elle enfilait sa robe en rĂȘvant. - Je vais ĂȘtre belle, hein ? - Tu es dĂ©jĂ  belle, ma puce, tu es dĂ©jĂ  trĂšs trĂšs belle. - Oui, mais lĂ , encore plus
 - Tu crois que c’est possible ? Elle a rĂ©flĂ©chi. - Oui, je crois
 - Allez, tourne-toi. Les filles, quelle belle invention, pensais-je en la coiffant, quelle belle invention
 5. Alors que nous faisions la queue devant les caisses, mon beau-pĂšre m’a avouĂ© qu’il n’avait pas mis les pieds dans une grande surface depuis plus de dix ans. J’ai pensĂ© Ă  Suzanne. Toujours toute seule derriĂšre son chariot. Toujours toute seule partout. AprĂšs leurs nuggets, les filles ont jouĂ© dans une espĂšce de cage remplie de boules multicolores. Un jeune homme leur avait demandĂ© d’enlever leurs chaussures et je tenais les monstrueuses baskets You’re a Barbie girl ! » de Lucie sur mes genoux. Le pire, c’était cette espĂšce de talon compensĂ© transparent
 - Comment avez-vous pu acheter des horreurs pareilles ? - Ça lui fait tellement plaisir
 J’essaie de ne pas refaire les mĂȘmes erreurs avec la nouvelle gĂ©nĂ©ration
 Tu vois, c’est comme cet endroit
 Jamais je ne serais venu ici avec Christine et Adrien si ça avait Ă©tĂ© possible il y a trente ans. Jamais ! Et pourquoi, me dis-je aujourd’hui, pourquoi les avoir privĂ©s de ce genre de plaisir ? Qu’est-ce que ça m’aurait coĂ»tĂ© aprĂšs tout ? Un mauvais quart d’heure ? Qu’est-ce qu’un mauvais quart d’heure comparĂ© aux visages Ă©carlates de tes gamines ? - J’ai tout fait Ă  l’envers, ajouta-t-il en secouant la tĂȘte, et mĂȘme ce foutu sandwich, je le tiens Ă  l’envers, non ? Il avait de la mayonnaise plein le pantalon. - ChloĂ© ? - Oui. - Je voudrais que tu manges
 Excuse-moi de te parler comme Suzanne mais tu n’as rien mangĂ© depuis hier
 - Je n’y arrive pas. Il s’était repris. - Comment veux-tu manger une cochonnerie pareille de toute façon ? ! Qui peut manger ça ? Hein ? Dis-le-moi. Qui ? Personne ! J’essayais de sourire. - Bon, je te permets de faire la diĂšte encore maintenant, mais ce soir, fini ! Ce soir, c’est moi qui prĂ©pare le dĂźner et tu seras obligĂ©e d’y faire honneur, c’est compris ? - C’est compris. - Et ça ? Ça se mange comment, ce truc de cosmonaute ? Il me dĂ©signait une improbable salade dans un shaker en plastique. Nous avons passĂ© le reste de l’aprĂšs-midi dans le jardin. Les filles papillonnaient autour de leur grand-pĂšre qui s’était mis en tĂȘte de rafistoler la vieille balançoire. Je les regardais de loin, assise sur les marches du perron. Il faisait froid, il faisait beau. Le soleil brillait Ă  travers leurs cheveux et je les trouvais jolies. Je pensais Ă  Adrien. Qu’était-il en train de faire ? OĂč Ă©tait-il Ă  cet instant prĂ©cis ? Et avec qui ? Et notre vie, Ă  quoi allait-elle ressembler ? Chaque pensĂ©e me tirait un peu plus vers le fond. J’étais si fatiguĂ©e. J’ai fermĂ© les yeux. Je rĂȘvais qu’il arrivait. On entendait le bruit d’un moteur dans la cour, il s’asseyait prĂšs de moi, il m’embrassait et posait un doigt sur ma bouche pour faire une surprise aux filles. Je peux encore sentir sa douceur dans mon cou, sa voix, sa chaleur, l’odeur de sa peau, tout est lĂ . Tout est là
 Il suffit d’y penser. Au bout de combien de temps oublie-t-on l’odeur de celui qui vous a aimĂ©e ? Et quand cesse-t-on d’aimer Ă  son tour ? Qu’on me tende un sablier. La derniĂšre fois que nous nous sommes enlacĂ©s, c’était moi qui l’embrassais. C’était dans l’ascenseur de la rue de Flandre. Il s’était laissĂ© faire. Pourquoi ? Pourquoi s’était-il laissĂ© embrasser par une femme qu’il n’aimait plus ? Pourquoi m’avoir donnĂ© sa bouche ? Et ses bras ? Ça n’a pas de sens. La balançoire est rĂ©parĂ©e. Pierre me jette un coup d’Ɠil. Je tourne la tĂȘte. Je n’ai pas envie de croiser son regard. J’ai froid, de la morve plein les lĂšvres et puis je dois aller chauffer la salle de bains. 6. - Qu’est-ce que je peux faire pour vous aider ? Il avait nouĂ© un torchon autour de ses hanches. - Lucie et Marion sont couchĂ©es ? - Oui. - Elles n’auront pas froid ? - Non, non, elles sont trĂšs bien. Dites-moi plutĂŽt ce que je peux faire
 - Tu pourrais pleurer sans que je m’en trouve mortifiĂ© pour une fois
 Ça me ferait du bien de te voir pleurer sans raison. Tiens, coupe-moi ça, ajouta-t-il en me tendant trois oignons. - Vous trouvez que je pleure trop ? - Oui. Silence. J’ai attrapĂ© la planche en bois prĂšs de l’évier et je me suis assise en face de lui. Son visage Ă©tait de nouveau contractĂ©. On entendait seulement les bruits du feu. - Ce n’est pas ce que j’ai voulu dire
 - Pardon ? - Ce n’est pas ce que j’ai voulu dire, je ne pense pas que tu pleures trop, je suis juste accablĂ©. Tu es si mignonne quand tu souris
 - Tu veux boire quelque chose ? J’ai hochĂ© la tĂȘte. - On va attendre qu’il se rĂ©chauffe un peu, ce serait dommage
 Tu veux un Bushmills, en attendant ? - Non merci. - Et pourquoi ? - Je n’aime pas le whisky. - Malheureuse ! Ça n’a rien Ă  voir ! GoĂ»te-moi ça
 J’ai portĂ© le verre Ă  mes lĂšvres et j’ai trouvĂ© ça infĂąme. Je n’avais rien mangĂ© depuis des jours, j’étais ivre. Mon couteau glissait sur la peau des oignons et ma nuque s’était volatilisĂ©e. J’allais me couper un doigt. J’étais bien. - Il est bon, hein ? C’est Patrick Frendall qui me l’a offert pour mes soixante ans. Tu te souviens de Patrick Frendall ? - Euh
 non. - Si, si, je crois que tu l’as dĂ©jĂ  vu ici, tu ne te souviens pas ? Un type immense avec des bras gigantesques
 - Celui qui avait lancĂ© Lucie dans les airs jusqu’à ce qu’elle manque de vomir ? - Exact, rĂ©pondit Pierre en me resservant un verre. - Oui, je me souviens
 - Je l’aime beaucoup, je pense Ă  lui trĂšs souvent
 C’est Ă©trange, je le considĂšre comme l’un de mes meilleurs amis alors que je le connais Ă  peine
 - Vous avez des meilleurs amis, vous ? - Pourquoi tu me demandes ça ? - Comme ça. Enfin
 Je n’en sais rien. Je ne vous ai jamais entendu en parler. Mon beau-pĂšre s’appliquait sur ses rondelles de carottes. C’est toujours amusant de regarder un homme qui fait la cuisine pour la premiĂšre fois de sa vie. Cette façon de suivre la recette Ă  la virgule prĂšs comme si Ginette Mathiot Ă©tait une dĂ©esse trĂšs susceptible. - Il y a marquĂ© couper les carottes en rondelles de taille moyenne », tu crois que ça ira comme ça ? - C’est parfait ! Je riais. Sans nuque, ma tĂȘte dodelinait sur mes Ă©paules. - Merci
 OĂč en Ă©tais-je dĂ©jĂ  ? Ah oui, mes amis
 En fait, j’en ai eu trois
 Patrick, que j’ai connu pendant un voyage Ă  Rome. Une bondieuserie de ma paroisse
 Mon premier voyage sans les parents
 J’avais quinze ans. Je ne comprenais rien de ce que me baragouinait cet Irlandais qui faisait deux fois ma taille mais nous nous sommes acoquinĂ©s tout de suite. Il avait Ă©tĂ© Ă©levĂ© par les gens les plus catholiques du monde, je sortais tout juste de l’étouffoir familial
 Deux jeunes chiens lĂąchĂ©s dans la Ville Ă©ternelle
 Quel pĂšlerinage !
 Il en frissonnait encore. Il faisait revenir les oignons et les carottes dans une cocotte avec des morceaux de poitrine fumĂ©e, ça sentait trĂšs bon. - Et puis Jean ThĂ©ron, que tu connais, et mon frĂšre, Paul, que tu n’as jamais vu puisqu’il est mort en 56
 - Vous considĂ©riez votre frĂšre comme votre meilleur ami ? - Il Ă©tait plus que ça encore
 Toi, ChloĂ©, telle que je te connais, tu l’aurais adorĂ©. C’était un garçon fin, drĂŽle, attentif aux uns et aux autres, toujours gai. Il peignait
 Je te montrerai ses aquarelles demain, elles sont dans mon bureau. Il connaissait le chant de tous les oiseaux. Il Ă©tait taquin sans jamais blesser personne. C’était un garçon charmant. Vraiment charmant. D’ailleurs tout le monde l’adorait
 - De quoi est-il mort ? Mon beau-pĂšre s’était retournĂ©. - Il est allĂ© en Indochine. Il en est revenu malade et Ă  moitiĂ© fou. Il est mort de la tuberculose le 14 juillet 1956. -
 - Inutile de te dire qu’aprĂšs ça, mes parents n’ont plus jamais regardĂ© un seul dĂ©filĂ© de leur vie. Les bals et les feux d’artifice aussi, pour eux, c’était terminĂ©. Il ajoutait les morceaux de viande et les tournait dans tous les sens pour les faire dorer. - Le pire, vois-tu, c’est qu’il Ă©tait engagĂ© volontaire
 À cette Ă©poque, il faisait des Ă©tudes. Il Ă©tait brillant. Il voulait travailler Ă  l’ Il aimait les arbres et les oiseaux. Il n’aurait pas dĂ» aller lĂ -bas. Il n’avait aucune raison d’y aller. Aucune. C’était un homme doux, pacifiste, qui citait Giono et qui
 - Alors pourquoi ? - À cause d’une fille. Un chagrin d’amour bĂȘta. N’importe quoi, mĂȘme pas une fille d’ailleurs, une gamine. Une histoire absurde. En mĂȘme temps que je te dis ça et Ă  chaque fois que j’y pense, je suis effondrĂ© par l’inanitĂ© de nos vies. Un bon garçon qui part Ă  la guerre Ă  cause d’une demoiselle boudeuse, c’est grotesque. On lit ça dans les romans de gare. C’est bon pour les mĂ©los, des histoires pareilles ! - Elle ne l’aimait pas ? - Non. Mais Paul en Ă©tait fou. Il l’adorait. Il la connaissait depuis qu’elle avait douze ans, lui Ă©crivait des lettres qu’elle ne devait mĂȘme pas comprendre. Il est parti Ă  la guerre comme on crĂąne. Pour qu’elle voie quel homme c’était ! La veille de son dĂ©part encore, il fanfaronnait, cet Ăąne Quand elle vous la rĂ©clamera, ne lui donnez pas mon adresse tout de suite, je veux que ce soit moi qui lui Ă©crive le premier
 » Et trois mois plus tard, elle se fiançait au fils du boucher de la rue de Passy. Il a secouĂ© une dizaine d’épices diffĂ©rentes, tout ce qu’il a pu trouver dans les placards. Je ne sais pas ce que Ginette en aurait pensé  - Un grand garçon falot qui passait ses journĂ©es Ă  dĂ©sosser des morceaux de viande dans l’arriĂšre-boutique de son pĂšre. Quel choc pour nous, tu imagines. Elle avait Ă©conduit notre Paul pour ce grand dadais. Il Ă©tait lĂ -bas, Ă  l’autre bout du monde, il Ă©tait probablement en train de penser Ă  elle, de lui composer des vers, cet idiot, et elle, elle ne songeait qu’aux sorties du samedi soir avec ce lourdaud qui avait le droit d’emprunter la voiture de son papa. Une FrĂ©gate bleu ciel, je me souviens
 Bien sĂ»r, elle Ă©tait libre de ne pas l’aimer, bien sĂ»r, mais Paul Ă©tait trop exaltĂ©, il ne pouvait rien faire sans bravoure, sans
 sans brio. Quel gĂąchis
 - Et ensuite ? - Ensuite, rien. Paul est revenu et ma mĂšre a changĂ© de boucher. Il a passĂ© beaucoup de temps dans cette maison dont il ne sortait presque plus. Il dessinait, il lisait, se plaignait de ne plus pouvoir dormir. Il souffrait beaucoup, toussait sans cesse, et puis il est mort. À vingt et un ans. - Vous n’en parlez jamais
 - Non. - Pourquoi ? - J’aimais en parler avec des gens qui l’avaient connu, c’était plus simple
 J’ai Ă©cartĂ© ma chaise de la table. - Je vais mettre le couvert. OĂč voulez-vous dĂźner ? - Ici, dans la cuisine, c’est trĂšs bien. Il a Ă©teint la grande lumiĂšre et nous nous sommes assis l’un en face de l’autre. - C’est dĂ©licieux. - Tu le penses vraiment ? Il me semble que c’est un peu cuit, non ? - Non, non, je vous assure, c’est parfait. - Tu es trop bonne. - C’est votre vin qui est bon. Parlez-moi de Rome
 - De la ville ? - Non, de ce pĂšlerinage
 Comment Ă©tiez-vous quand vous aviez quinze ans ? - Oh
 Comment j’étais ? J’étais le garçon le plus niais du monde. J’essayais de suivre les grandes enjambĂ©es de Frendall. Je tirais la langue, lui parlais de Paris, du Moulin-Rouge, affirmais n’importe quoi, mentais effrontĂ©ment. Il riait, rĂ©pondait des choses que je ne comprenais pas non plus et je riais Ă  mon tour. Nous passions notre temps Ă  voler des piĂšces dans les fontaines et Ă  ricaner dĂšs que nous croisions une personne du sexe opposĂ©. Nous Ă©tions vraiment pathĂ©tiques quand j’y repense
 Je ne me souviens plus aujourd’hui du but de ce pĂšlerinage. Il y avait sĂ»rement une bonne cause Ă  la clĂ©, une intention de priĂšre, comme on dit
 Je ne sais plus
 Ce fut pour moi une Ă©norme bouffĂ©e d’oxygĂšne. Ces quelques jours ont changĂ© ma vie. J’avais dĂ©couvert le goĂ»t de la libertĂ©. C’était comme de
 Je te ressers ? - Volontiers. - Il fallait voir le contexte aussi
 Nous venions de faire semblant de gagner une guerre. Le fond de l’air Ă©tait plein d’aigreur. Nous ne pouvions Ă©voquer quelqu’un, un voisin, un commerçant, les parents d’un camarade, sans que mon pĂšre le range aussitĂŽt dans un petit tiroir dĂ©lateur ou dĂ©noncĂ©, lĂąche ou bon Ă  rien. C’était affreux. Tu ne peux pas l’imaginer, mais crois-moi, c’est affreux pour des gosses
 D’ailleurs nous ne lui adressions plus la parole
 ou si peu
 Le minimum filial probablement
 Un jour quand mĂȘme, je lui ai demandĂ© Si elle Ă©tait si moche votre humanitĂ©, pourquoi vous vous ĂȘtes battus pour elle alors ? » - Qu’est-ce qu’il a rĂ©pondu ? - Rien
 du mĂ©pris. - Merci, merci, c’est trop ! - Je vivais au premier Ă©tage d’un immeuble tout gris, au fin fond du seiziĂšme arrondissement. C’était d’un triste
 Mes parents n’avaient pas les moyens d’habiter lĂ , mais il y avait le prestige de l’adresse tu comprends. Le seiziĂšme ! Nous Ă©tions Ă  l’étroit dans un appartement sinistre oĂč le soleil n’entrait jamais et ma mĂšre dĂ©fendait qu’on ouvre les fenĂȘtres parce qu’il y avait un dĂ©pĂŽt d’autobus juste en dessous. Elle craignait que ses rideaux ne
 ne devinssent noirs
 oh, oh, ce gentil bordeaux me fait conjuguer les verbes Ă  l’imparfait du subjonctif, c’est Ă©tonnant ! Je m’ennuyais affreusement. J’étais trop jeune pour intĂ©resser mon pĂšre et ma mĂšre papillonnait. Elle sortait beaucoup. “Du temps consacrĂ© Ă  la paroisse”, disait-elle en levant les yeux au ciel. Elle en faisait trop, s’agaçait de la bĂȘtise de certaines femmes pieuses qu’elle inventait de toutes piĂšces, enlevait ses gants, les jetait sur la console de l’entrĂ©e comme on rendrait enfin son tablier, soupirait, virevoltait, jacassait, mentait, s’embrouillait quelquefois. Nous la laissions dire. Paul l’appelait Sarah Bernhardt et mon pĂšre reprenait la lecture de son Figaro sans faire de commentaires quand elle quittait la piĂšce
 Des pommes de terre ? - Non merci. - J’étais demi-pensionnaire Ă  Janson-de-Sailly. J’étais aussi gris que mon immeuble. Je lisais CƓurs vaillants et les aventures de Flash Gordon. Je jouais au tennis avec les fils Mortellier tous les jeudis. Je
 J’étais un enfant trĂšs sage et sans aucun intĂ©rĂȘt. Je rĂȘvais de prendre l’ascenseur et de monter au sixiĂšme Ă©tage pour voir
 Tu parles d’une aventure
 Monter au sixiĂšme Ă©tage ! Quel benĂȘt, je te jure
 J’attendais Patrick Frendall. J’attendais le Pape ! Il s’était levĂ© pour activer le feu. - Enfin
 Ce n’était pas la rĂ©volution
 Une rĂ©crĂ©ation tout au plus. J’ai toujours cru que j’allais
 comment dire
 dĂ©teler un jour. Mais non. Jamais. Je suis restĂ© cet enfant trĂšs sage et sans intĂ©rĂȘt. Pourquoi est-ce que je te raconte tout ça, au fait ? Mais pourquoi suis-je si bavard tout Ă  coup ? - C’est moi qui vous l’ai demandé  - Enfin
 Mais ce n’est pas une raison ! Je ne te casse pas les pieds avec ma petite boutique de nostalgie ? - Non, non, au contraire, j’aime bien
 Le lendemain matin, j’ai trouvĂ© un mot sur la table de la cuisine A/R bureau ». Il y avait du cafĂ© chaud et une Ă©norme bĂ»che posĂ©e sur les chenets. Pourquoi ne m’avait-il pas prĂ©venue de son dĂ©part ? Quel homme Ă©trange
 Comme un poisson
 Qui s’esquive toujours et vous glisse entre les mains
 Je me suis servi un grand bol de cafĂ© et l’ai bu debout, l’épaule contre la fenĂȘtre de la cuisine. Je regardais les rouges-gorges qui s’affolaient autour du bloc de saindoux que les filles avaient dĂ©posĂ© sur le banc hier. Le soleil montait Ă  peine au-dessus de la haie. J’attendais qu’elles se lĂšvent. La maison Ă©tait trop calme. J’avais envie d’une cigarette. C’était idiot, je ne fumais plus depuis des annĂ©es. Oui mais voilĂ , c’est comme ça la vie
 Vous faites preuve d’une volontĂ© formidable et puis un matin d’hiver, vous dĂ©cidez de marcher quatre kilomĂštres dans le froid pour racheter un paquet de cigarettes ou alors, vous aimez un homme, avec lui vous fabriquez deux enfants et un matin d’hiver, vous apprenez qu’il s’en va parce qu’il en aime une autre. Ajoute qu’il est confus, qu’il s’est trompĂ©. Comme au tĂ©lĂ©phone Excusez-moi, c’est une erreur. » Mais je vous en prie
 Une bulle de savon. Il y a du vent. Je sors pour mettre le saindoux Ă  l’abri. Je regarde la tĂ©lĂ© avec les filles. Je suis accablĂ©e. Les hĂ©ros de leurs dessins animĂ©s me paraissent niais et capricieux. Lucie s’agace, secoue la tĂȘte, me prie de me taire. J’ai envie de lui parler de Candy. Moi, quand j’étais petite, j’étais accro Ă  Candy. Candy ne parlait jamais d’argent. Que d’amour. Et puis je me suis tue. Pour ce que ça m’aura servi de faire comme cette greluche de Candy
 Le vent souffle de plus en plus. J’abandonne l’idĂ©e d’aller au village. Nous passons l’aprĂšs-midi dans le grenier. Les filles se dĂ©guisent. Lucie agite un Ă©ventail devant le visage de sa sƓur - Vous avez trop chaud, madame la comtesse ? Madame la comtesse ne peut pas bouger. Elle a trop de chapeaux sur la tĂȘte. Nous descendons un vieux berceau. Lucie dit qu’il faut le repeindre. - En rose ? Je lui demande. - Comment tu as devinĂ© ? - Je suis trĂšs forte. Le tĂ©lĂ©phone sonne. Lucie va rĂ©pondre. À la fin, je l’entends qui demande - Tu veux parler Ă  maman maintenant ? Elle raccroche un peu aprĂšs. Ne revient pas avec nous. Je continue de dĂ©garnir le lit d’enfant avec Marion. Je la retrouve en descendant dans la cuisine. Elle a posĂ© son menton sur la table. Je m’assieds Ă  cĂŽtĂ© d’elle. Nous nous regardons. - Est-ce qu’un jour, toi et papa vous serez encore des amoureux ? - Non. - Tu en es sĂ»re ? - Oui. - De toute façon, je le savais dĂ©jà
 Elle s’est levĂ©e et a ajoutĂ© - Tu sais ce que je voulais te dire aussi ? - Non. Quoi ? - Eh bien que les oiseaux, ils ont tout mangĂ© dĂ©jà
 - C’est vrai ? Tu es sĂ»re ? - Oui, viens voir
 Elle a contournĂ© la table et pris ma main. Nous Ă©tions devant la fenĂȘtre. Il y avait cette petite fille blonde Ă  cĂŽtĂ© de moi. Elle portait un vieux plastron de smoking et un jupon mangĂ© par les mites. Ses You’re a Barbie girl ! » tenaient dans les bottines de son arriĂšre-grand-mĂšre. Ma grande main de maman faisait tout le tour de la sienne. Nous regardions les arbres du jardin ployer sous le vent et devions probablement penser la mĂȘme chose
 7. La salle de bains est si froide que je n’arrive pas Ă  sortir les Ă©paules de l’eau. Lucie nous a shampouinĂ©es en nous inventant toutes sortes de coiffures vertigineuses. Regarde-toi, Maman ! Tu as des cornes sur la tĂȘte ! » Je le savais dĂ©jĂ . Ce n’était pas trĂšs drĂŽle, mais ça m’a fait rire. - Pourquoi tu ris ? - Parce que je suis bĂȘte. - Pourquoi tu es bĂȘte ? Nous nous sommes sĂ©chĂ©es en dansant. Chemises de nuit, chaussettes, chaussures, pulls, robes de chambre et pulls encore. Mes Bibendum sont descendus manger leur soupe. Le courant a sautĂ© alors que Babar jouait avec l’ascenseur d’un grand magasin sous l’Ɠil courroucĂ© du groom. Marion s’est mise Ă  pleurer. - Attendez-moi, je vais remettre la lumiĂšre. - Ouh ! ouhouhouhouh
 - ArrĂȘte, Barbie girl, tu fais pleurer ta sƓur. - Ne m’appelle pas Barbie girl ! - Alors arrĂȘte. Ce n’était pas le disjoncteur, ni les plombs. Les volets claquaient, les portes gĂ©missaient et toute la maison Ă©tait plongĂ©e dans l’obscuritĂ©. SƓurs BrontĂ«, priez pour nous. Je me demandais quand Pierre allait rentrer. J’ai descendu le matelas des filles dans la cuisine. Sans radiateur Ă©lectrique, il Ă©tait impensable de les laisser dormir lĂ -haut. Elles Ă©taient excitĂ©es comme des puces. Nous avons repoussĂ© la table et posĂ© leur lit de fortune prĂšs de la cheminĂ©e. Je suis allĂ©e m’allonger entre elles deux. - Et Babar ? Tu nous l’as pas fini
 - Chut, Marion, chut ! Regarde plutĂŽt devant toi. Regarde le feu. C’est lui qui va te raconter des histoires
 - Oui mais
 - Chut
 Elles se sont endormies tout de suite. J’écoutais les bruits de la maison. Mon nez me piquait et je me frottais les yeux pour ne pas pleurer. Ma vie est comme ce lit, pensais-je encore. Fragile. Incertaine. Suspendue. Je guettais le moment oĂč la maison allait s’envoler. Je pensais que j’étais larguĂ©e. C’est drĂŽle comme les expressions ne sont pas seulement des expressions. Il faut avoir eu trĂšs peur pour comprendre sueurs froides » ou avoir Ă©tĂ© trĂšs angoissĂ© pour que des nƓuds dans le ventre » rende tout son jus, non ? LarguĂ©e », c’est pareil. C’est merveilleux comme expression. Qui a trouvĂ© ça ? Larguer les amarres. DĂ©tacher la bonne femme. Prendre le large, dĂ©ployer ses ailes d’albatros et baiser sous d’autres latitudes. Non, vraiment, on ne saurait mieux dire
 Je deviens mauvaise, c’est bon signe. Encore quelques semaines et je serai bien laide. Parce que le piĂšge, justement, c’est de croire qu’on est amarrĂ©. On prend des dĂ©cisions, des crĂ©dits, des engagements et puis quelques risques aussi. On achĂšte des maisons, on met des bĂ©bĂ©s dans des chambres toutes roses et on dort toutes les nuits enlacĂ©s. On s’émerveille de cette
 Comment disait-on dĂ©jĂ  ? De cette complicitĂ©. Oui, c’était ça qu’on disait, quand on Ă©tait heureux. Ou quand on l’était moins
 Le piĂšge, c’est de penser qu’on a le droit d’ĂȘtre heureux. Nigauds que nous sommes. Assez naĂŻfs pour croire une seconde que nous maĂźtrisons le cours de nos vies. Le cours de nos vies nous Ă©chappe, mais ce n’est pas grave. Il n’a pas grand intĂ©rĂȘt
 L’idĂ©al, ce serait de le savoir plus tĂŽt. Plus tĂŽt » quand ? Plus tĂŽt. Avant de repeindre des chambres en rose, par exemple
 C’est Pierre qui a raison, pourquoi montrer sa faiblesse ? Pour prendre des coups ? Ma grand-mĂšre disait souvent que c’était avec de bons petits plats qu’on retenait les gentils maris Ă  la maison. Je suis loin du compte, Mamie, je suis loin du compte
 D’abord je ne sais pas cuisiner et puis je n’ai jamais eu envie de retenir personne. Eh bien, c’est rĂ©ussi, ma petite fille ! Je me sers un peu de cognac pour fĂȘter ça. Une larme et puis dodo. 8. La journĂ©e suivante m’a semblĂ© bien longue. Nous sommes allĂ©es nous promener. Nous avons donnĂ© du pain aux chevaux du centre Ă©questre et sommes restĂ©es un long moment avec eux. Marion est montĂ©e sur le dos du poney. Lucie n’a pas voulu. J’avais l’impression de porter un sac Ă  dos trĂšs lourd. Le soir, c’était spectacle. J’ai de la chance, c’est tous les jours spectacle chez moi. Au programme cette fois La petite fille qui voulĂ© pas sen nalĂ©. Elles se sont donnĂ© beaucoup de mal pour me distraire. Je n’ai pas bien dormi. Le lendemain matin, le cƓur n’y Ă©tait plus. Il faisait trop froid. Les filles pleurnichaient sans cesse. J’avais essayĂ© de faire diversion en jouant aux hommes prĂ©historiques. - Regardez bien comment les hommes prĂ©historiques s’y prenaient pour prĂ©parer leur bol de Nesquick
 Ils mettaient la casserole de lait sur le feu, oui, exactement comme ça
 Et leur tartine grillĂ©e ? Rien de plus simple, le morceau de pain sur une grille et hop, au-dessus des flammes
 Attention ! pas trop longtemps, hein, sinon c’est du charbon. Qui veut jouer aux hommes prĂ©historiques avec moi ? Elles s’en fichaient, elles n’avaient pas faim. Ce qu’elles voulaient, c’était leur saloperie de tĂ©lĂ©. Je me suis brĂ»lĂ©e. Manon a pleurĂ© en m’entendant crier et Lucie a renversĂ© son bol sur le canapĂ©. Je me suis assise et j’ai pris ma tĂȘte entre mes mains. Je rĂȘvais de pouvoir la dĂ©visser, de la poser par terre devant moi et de shooter dedans pour l’envoyer valdinguer le plus loin possible. Tellement loin qu’on ne la retrouverait plus jamais. Mais je ne sais mĂȘme pas shooter. Je taperais Ă  cĂŽtĂ©, c’est sĂ»r. Pierre est arrivĂ© Ă  ce moment-lĂ . Il Ă©tait dĂ©solĂ©, expliquait qu’il n’avait pas pu me joindre plus tĂŽt puisque la ligne Ă©tait coupĂ©e et secouait un sac de croissants chauds sous le nez des filles. Elles riaient. Marion cherchait sa main et Lucie lui proposait un cafĂ© prĂ©historique. - Un cafĂ© prĂ©historique ? Mais avec plaisir, madame Cro-Mignonne ! J’en avais les larmes aux yeux. Il a posĂ© sa main sur mon genou. - Chloé  Ça va ? J’avais envie de lui dire, non, ça ne va pas du tout, mais j’étais si contente de le revoir que j’ai rĂ©pondu le contraire. - La boulangĂšre a de la lumiĂšre, ce n’est donc pas une panne de secteur. Je vais aller voir ça de plus prĂšs
 Eh, regardez, les filles, il fait un temps magnifique ! Habillez-vous, on va aller aux champignons. Avec ce qu’il a plu hier, on va en trouver plein ! Les filles », c’était moi aussi
 Nous avons montĂ© les escaliers en gloussant. Que c’est bon d’avoir huit ans. Nous avons marchĂ© jusqu’au Moulin du Diable. Une bĂątisse sinistre qui fait la joie des petits enfants depuis plusieurs gĂ©nĂ©rations. Pierre a expliquĂ© aux filles les trous dans le mur - LĂ , c’est un coup de corne
 et lĂ , ce sont les marques de ses sabots
 - Pourquoi il a donnĂ© des coups de sabot dans le mur ? - Ah
 C’est une longue histoire
 C’est parce qu’il Ă©tait trĂšs Ă©nervĂ© ce jourlà
 - Pourquoi il Ă©tait trĂšs Ă©nervĂ© ce jour-lĂ  ? - Parce que sa prisonniĂšre s’était Ă©chappĂ©e. - C’était qui, sa prisonniĂšre ? - C’était la fille de la boulangĂšre. - La fille de madame PĂ©caut ? - Non, pas sa fille, voyons ! ! Son arriĂšre-arriĂšre-grand-mĂšre plutĂŽt. - Ah ? J’ai montrĂ© aux filles comment fabriquer une mini-dĂźnette avec des cupules de glands. Nous avons trouvĂ© un nid d’oiseaux vide, des cailloux, des pommes de pin. Nous avons cueilli des coucous et cassĂ© des branches de noisetier. Lucie a rĂ©cupĂ©rĂ© de la mousse pour ses poupĂ©es et Marion n’a pas quittĂ© les Ă©paules de son grandpĂšre. Nous avons rapportĂ© deux champignons. Tous les deux suspects ! Sur le chemin du retour, on entendait le chant du merle et la voix intriguĂ©e d’une petite fille qui demandait - Mais pourquoi il avait capturĂ© la grand-mĂšre de madame PĂ©caut, le diable ? - Tu ne devines pas ? - Non. - Parce qu’il Ă©tait trĂšs gourmand, tiens ! Elle donnait des coups de bĂąton dans les fougĂšres pour faire fuir le dĂ©mon. Et moi, dans quoi pourrais-je donner des coups de bĂąton ? - ChloĂ© ? - Oui. - Je voulais te dire
 J’espĂšre
 Enfin plutĂŽt je voudrais
 Oui, c’est ça, je voudrais
 Je voudrais que tu reviennes dans cette maison parce que
 Je sais que tu l’aimes beaucoup
 Tu as fait tellement de choses ici
 Dans les chambres
 Le jardin
 Avant toi, il n’y avait pas de jardin tu sais ? Promets-moi que tu reviendras. Avec ou sans les filles
 Je me suis tournĂ©e vers lui. - Non, Pierre. Vous savez bien que non. - Et ton rosier ? Comment s’appelle-t-il dĂ©jĂ  ? Ce rosier que tu as plantĂ© l’annĂ©e derniĂšre
 - Cuisse de nymphe Ă©mue. - Oui, c’est ça. Tu l’aimais tant
 - Non, c’est son nom que j’aimais bien
 Écoutez, c’est dĂ©jĂ  assez dur comme ça
 - Pardon, pardon. - Mais vous ? Vous vous en occuperez, vous ? - Bien sĂ»r ! Cuisse de nymphe Ă©mue, tu penses
 Comment faire autrement ? Il se forçait un peu. Sur le chemin du retour, nous avons croisĂ© le vieux Marcel qui revenait du bourg. Son vĂ©lo zigzaguait dangereusement. Par quel miracle a-t-il rĂ©ussi Ă  stopper sa course devant nous sans tomber, nous ne le saurons jamais. Il a posĂ© Lucie sur sa selle et nous a proposĂ© le petit canon du soir. Madame Marcel a embrassĂ© les filles de la tĂȘte aux pieds et les a installĂ©es devant la tĂ©lĂ©vision avec un paquet de bonbons sur les genoux. Elle a la parabole, Maman ! Tu te rends compte ! Une chaĂźne avec que des dessins animĂ©s ! » AllĂ©luia. Aller tout au bout du monde, franchir des taillis, des haies, des fossĂ©s, se boucher le nez, traverser la cour du vieux Marcel et voir TĂ©lĂ©toon en mĂąchant des fraises Tagada ! Quelquefois, la vie est magnifique
 La tempĂȘte, la vache folle, l’Europe, la chasse, les morts et les mourants
 À un moment, Pierre a demandĂ© - Dites, Marcel, vous vous souvenez de mon frĂšre ? - De qui ? De Paul ? Je pense bien que j’m’en souviens de ce p’tit sagouin
 Y m’rendait fou avec ses p’tits sifflets. Y m’faisait croire n’importe quoi Ă  la chasse ! Y m’faisait croire Ă  des oiseaux qui sont mĂȘme pas de chez nous ! Quel salopiot ! Et les chiens qui devinaient zinzins ! Ah oui, que j’m’en souviens ! C’était un bon p’tit gars
 Y v’nait souvent en forĂȘt avec le pĂšre
 Y voulait tout qu’on lui montre, tout qu’on lui explique
 Oh lĂ  là
 Qu’est-ce qu’il a posĂ© comme questions celui-lĂ  ! Y disait qu’il voulait faire des Ă©tudes pour travailler dans les bois. J’me souviens, l’pĂšre lui rĂ©pondait, mais t’as pas besoin d’études, mon gars ! Qu’est-ce qu’y pourront t’apprendre de plus que moi tes maĂźtres ? Y rĂ©pondait pas, y disait que c’était pour visiter toutes les forĂȘts du monde, pour voir du pays, se promener en Afrique et en Russie mais qu’aprĂšs, y reviendrait ici et qu’y nous raconterait tout. Pierre l’écoutait en secouant la tĂȘte doucement, pour l’encourager Ă  parler et Ă  parler encore. Madame Marcel s’était levĂ©e. Elle est revenue en nous tendant un carnet Ă  dessins. - VoilĂ  ce que le petit Paul, enfin, je dis petit, il Ă©tait plus si petit Ă  l’époque, m’avait offert un jour pour me remercier de mes beignets d’acacia. Regardez, c’était mon chien. À mesure qu’elle tournait les pages, on admirait les facĂ©ties d’un petit fox qu’on devinait gĂątĂ© Ă  mort et plus cabot que nature. - Comment s’appelait-il ? Demandai-je. - Il avait pas de nom, mais on disait toujours OĂč qu’il est ? » parce qu’y partait tout le temps
 C’est de ça qu’il est mort d’ailleurs
 Oh
 Qu’est-ce qu’on l’aimait çui-là
 Qu’est-ce qu’on l’aimait
 De trop, de trop
 C’est la premiĂšre fois que je revois ces dessins depuis bien longtemps. D’habitude j’évite de fouiller lĂ -dedans, ça me fait trop de morts d’un coup
 Les dessins Ă©taient merveilleux. OĂč qu’il est ? » Ă©tait un fox marron avec de longues moustaches noires et des sourcils broussailleux. - Il a pris un coup de fusil
 Y braconnait les bracos, l’imbĂ©cile
 Je me suis levĂ©e, il fallait repartir avant que la nuit ne soit complĂštement tombĂ©e. - Mon frĂšre est mort Ă  cause de la pluie. Parce qu’ils l’ont postĂ© trop longtemps sous la pluie, tu te rends compte ? Je n’ai rien rĂ©pondu, trop occupĂ©e Ă  regarder oĂč je posais les pieds pour Ă©viter les flaques. 9. Les filles sont allĂ©es au lit sans dĂźner. Trop de bonbons. Babar a quittĂ© la Vieille Dame. Elle reste seule. Elle pleure. Elle se demande Quand reverrai-je mon petit Babar ? » Pierre aussi est malheureux. Il est restĂ© longtemps dans son bureau. Soi-disant pour retrouver les dessins de son frĂšre. J’ai prĂ©parĂ© le dĂźner. Des spaghettis avec des morceaux de gĂ©siers confits par Suzanne. Nous avions dĂ©cidĂ© de partir le lendemain en fin de matinĂ©e. C’était donc la derniĂšre fois que je m’agitais dans cette cuisine. Je l’aimais bien cette cuisine. J’ai jetĂ© les pĂątes dans l’eau bouillante en maudissant ma sensiblerie. Je l’aimais bien cette cuisine
 » HĂ©, mĂ©mĂšre, t’en trouveras d’autres, des cuisines
 Je me brutalisais alors que j’avais des larmes plein les yeux, c’était idiot. Il a posĂ© une petite aquarelle sur la table. Une femme, de dos, lisait. Elle Ă©tait assise sur un banc de jardin. Sa tĂȘte Ă©tait un peu penchĂ©e. Peut-ĂȘtre qu’elle ne lisait pas, peut-ĂȘtre qu’elle dormait ou qu’elle rĂȘvait. On reconnaissait la maison. Les marches du perron, les volets arrondis et la glycine blanche. - C’est ma mĂšre. - Comment s’appelait-elle ? - Alice. -
 - Elle est pour toi. J’allais protester, mais il a fait les gros yeux et mis un doigt devant sa bouche. Pierre Dippel est un homme qui n’aime pas ĂȘtre contrariĂ©. - Il faut toujours vous obĂ©ir, n’est-ce pas ? Il ne m’écoutait pas. - Est-ce qu’un jour, quelqu’un a dĂ©jĂ  osĂ© vous contredire ? ajoutai-je en posant le dessin de Paul sur la cheminĂ©e. - Pas quelqu’un. Toute ma vie. Je me brĂ»lai la langue. Il s’était appuyĂ© sur la table pour se relever. - Bah
 Que veux-tu boire, ChloĂ© ? - Quelque chose qui rende gai. Il est remontĂ© de la cave avec deux bouteilles qu’il tenait contre lui comme des nouveau-nĂ©s. - ChĂąteau Chasse-Spleen
 Avoue que c’est de circonstance
 Tout Ă  fait ce qu’il nous faut. J’en ai pris deux, une pour toi et une pour moi. - Vous ĂȘtes fou ! Vous devriez attendre une plus grande occasion
 - Une plus grande occasion que quoi ? Il approchait sa chaise de la cheminĂ©e. - Que
 Je ne sais pas
 Que moi
 Que nous
 Que ce soir. Il avait repliĂ© ses bras autour de lui pour rĂ©chauffer sa fortune. - Mais, nous sommes une grande occasion, ChloĂ©. Nous sommes la plus grande occasion du monde. Je viens dans cette maison depuis que je suis enfant, j’ai pris des milliers de repas dans cette cuisine et crois-moi, je sais reconnaĂźtre une grande occasion ! Ce petit ton suffisant, quel dommage. Il me tournait le dos et regardait le feu sans bouger. - ChloĂ©, je n’ai pas envie que tu partes
 J’ai balancĂ© les nouilles dans l’égouttoir et le torchon par-dessus. - Vous m’énervez. Vous dites n’importe quoi. Vous ne pensez qu’à vous. Vous ĂȘtes fatigant Ă  la fin. Je ne veux pas que tu partes. » Mais pourquoi vous me dites un truc aussi stupide ? Je vous rappelle que ce n’est pas moi qui m’en vais
 Vous avez un fils, vous vous en souvenez ? Un grand garçon. Eh bien, c’est lui qui est parti. C’est lui ! Vous n’ĂȘtes pas au courant ? Oh, c’est trop bĂȘte. Attendez, je vais vous la raconter, c’est une histoire amusante. Donc, c’était
 C’était quand, dĂ©jĂ  ? Peu importe. Adrien, le merveilleux Adrien a fait ses valises l’autre jour. Mettez-vous Ă  ma place, j’étais Ă©tonnĂ©e. Ah oui, parce que je ne vous ai pas dit, mais il se trouve que j’étais la femme de ce garçon. Vous savez, la femme, ce truc pratique qu’on emmĂšne partout et qui sourit quand on l’embrasse. Donc, j’étais surprise, vous imaginez
 le voilĂ  avec nos valises devant l’ascenseur de notre appartement qui se met Ă  geindre en regardant sa montre. Il geint parce qu’il est trĂšs Ă©nervĂ©, le pauvre biquet ! L’ascenseur, les valises, bobonne et l’avion, quel casse-tĂȘte ! Eh oui ! Parce qu’il ne fallait pas le rater l’avion, il y avait la maĂźtresse dedans ! Vous savez, la maĂźtresse, cette jeune femme impatiente qui vous agace un peu les nerfs. Pas le temps pour une scĂšne de mĂ©nage, vous pensez
 Et puis c’est d’un commun les scĂšnes de mĂ©nage
 Chez les Dippel, on ne vous a pas appris ça, hein ? Les cris, les scĂšnes, les mouvements d’humeur, c’est vulgaire, n’est-ce pas ? Oh oui, c’est vulgaire. Chez les Dippel, c’est never explain, never complain, tout de suite, c’est autre chose. C’est la classe. - ChloĂ©, arrĂȘte ça tout de suite ! Je pleurais. - Mais vous vous entendez ? Vous entendez comme vous me parlez ! ? Mais je ne suis pas un chien, Pierre. Je ne suis pas votre chien, bon sang ! Je l’ai laissĂ© partir sans lui arracher les yeux, j’ai refermĂ© la porte tout doucement et maintenant je suis lĂ , je suis devant vous, devant mes gamines. J’assure. J’assure, vous comprenez ? Vous comprenez ce mot-lĂ  ? Qui a entendu mes youyous de dĂ©sespoir, qui ? Alors ne me faites pas pitiĂ© maintenant avec vos petites contrariĂ©tĂ©s. Vous ne voulez pas que je parte
 Oh, Pierre
 Je vais ĂȘtre obligĂ©e de vous dĂ©sobĂ©ir
 Oh, comme je le regrette
 Comme je
 Il avait attrapĂ© mes poignets et les serrait de toutes ses forces. Il tenait mes bras immobiles. - LĂąchez-moi ! Vous me faites mal ! Vous me faites tous mal dans cette famille ! Pierre, lĂąchez-moi. À peine avait-il desserrĂ© son Ă©treinte que ma tĂȘte tombait sur son Ă©paule. - Vous me faites tous mal
 Je pleurais dans son cou oubliant Ă  quel point il devait ĂȘtre mal Ă  l’aise, lui qui ne touchait jamais personne, je pleurais en pensant quelquefois Ă  mes spaghettis qui allaient ĂȘtre immangeables si je n’allais pas les dĂ©coller. Il disait Allons, allons
 » Il disait Je te demande pardon. » Il disait encore J’ai autant de chagrin que toi
 » Il ne savait plus quoi faire de ses mains. Finalement il s’est Ă©cartĂ© pour mettre le couvert. 10. - À toi, ChloĂ©. J’ai cognĂ© mon verre contre le sien. - Oui, Ă  moi, ai-je rĂ©pĂ©tĂ© dans un sourire tout de travers. - Tu es une fille formidable. - Oui, formidable. Et puis solide, courageuse
 Quoi d’autre encore ? - DrĂŽle. - Ah oui, j’allais oublier, drĂŽle. - Mais injuste. -
 - Tu es injuste, n’est-ce pas ? -
 - Tu penses que je n’aime que moi ? - Oui. - Alors tu n’es pas injuste, tu es bĂȘte. Je lui tendais mon verre. - Oui, ça, je le savais
 Donnez-moi encore de ce merveilleux liquide. - Tu penses que je suis un vieux con ? - Oui. Je hochais la tĂȘte. Je n’étais pas mauvaise, j’étais malheureuse. Il a soupirĂ©. - Pourquoi je suis un vieux con ? - Parce que vous n’aimez personne. Vous ne vous laissez jamais aller. Vous n’ĂȘtes jamais lĂ . Jamais au milieu de nous. Jamais dans nos conversations et nos bĂȘtises, jamais dans notre mĂ©diocritĂ© de banquet. Parce que vous n’ĂȘtes pas tendre, parce que vous vous taisez toujours et que votre mutisme ressemble Ă  du dĂ©dain. Parce que
 - Stop, stop, ça ira, merci. - Excusez-moi, je rĂ©ponds Ă  votre question. Vous me demandez pourquoi vous ĂȘtes un vieux con, je vous rĂ©ponds. Ceci Ă©tant dit, je ne trouve pas que vous soyez si vieux que ça
 - Tu es trop aimable
 - Je vous en prie. Je lui montrais mes dents pour lui sourire tendrement. - Mais si j’étais comme tu le dis, pourquoi t’aurais-je amenĂ©e ici alors ? Pourquoi tout ce temps passĂ© avec vous et
 - Parce que, vous le savez trĂšs bien
 - Parce que quoi ? - Parce que votre sens de l’honneur. Cette coquetterie des bonnes familles. Depuis sept ans que je traĂźne dans vos pattes, c’est bien la premiĂšre fois que vous vous intĂ©ressez Ă  moi
 Je vais vous dire ce que je pense. Je ne vous trouve ni bienveillant, ni charitable. Je suis lucide. Votre fils a fait une bĂȘtise et vous, vous passez derriĂšre, vous nettoyez, vous colmatez. Vous allez essayer de reboucher les lĂ©zardes comme vous pourrez. Parce que vous n’aimez pas ça les lĂ©zardes, hein, Pierre ? Oh non ! vous n’aimez pas ça du tout
 Je vais vous dire, je pense que vous m’avez amenĂ©e ici pour sauver les apparences. Le petit a gaffĂ©, bon, on serre les dents et on arrange les choses sans faire de commentaires. Dans le temps, vous alliez glisser une piĂšce aux bouseux quand la du petit merdeux avait encore mordu sur leurs semis et aujourd’hui vous aĂ©rez la belle-fille. J’attends le moment oĂč vous allez prendre votre air douloureux pour m’annoncer que je peux compter sur vous. FinanciĂšrement, j’entends. Vous ĂȘtes un peu dans l’embarras, n’est-ce pas ? Une grande fille comme moi, c’est plus compliquĂ© Ă  dĂ©dommager qu’un champ de betteraves
 Il se levait. - Alors oui
 C’était vrai
 Tu es bĂȘte. Quelle affreuse dĂ©couverte
 - Tiens, donne-moi ton assiette. Il Ă©tait derriĂšre mon dos. - Tu me blesses Ă  un point que tu n’imagines mĂȘme pas. Plus que ça encore, tu me saignes. Mais, je te rassure, je ne t’en veux pas, je mets tout cela sur le compte de ton chagrin
 Il a posĂ© une assiette fumante devant moi. - Mais il y a une chose, quand mĂȘme, que je ne peux pas te laisser dire impunĂ©ment, une seule chose
 - Laquelle ? fis-je en levant les yeux. - Ne parle pas de betteraves s’il te plaĂźt. Je te dĂ©fie de trouver le moindre champ de betteraves Ă  des kilomĂštres Ă  la ronde
 Il Ă©tait content de lui et plein de malice. - Hum, c’est bon
 Vous allez me regretter comme cuisiniĂšre pas vrai ? - Comme cuisiniĂšre, oui, mais pour le reste, merci bien
 Tu m’as coupĂ© l’appĂ©tit
 - Non ? ! - Non. - Vous m’avez fait peur ! - Il en faudrait plus que ça pour m’empĂȘcher de goĂ»ter Ă  ces merveilleuses pĂątes
 Il a plantĂ© sa fourchette dans son assiette, et a soulevĂ© un amas de spaghettis soudĂ©s. - Humm, comment dit-on dĂ©jĂ  ?
 Al dente
 Je riais. - J’aime quand tu ris. Nous sommes restĂ©s sans parler un long moment. - Vous ĂȘtes fĂąchĂ© ? - Non, pas fĂąchĂ©, indĂ©cis plutĂŽt
 - Je suis dĂ©solĂ©e. - Tu vois, j’ai l’impression de me trouver devant quelque chose d’inextricable. Une sorte de nƓud
 Énorme
 - Je voul
 - Tais-toi, tais-toi. Laisse-moi parler. Il faut que je dĂ©mĂȘle tout ça maintenant. C’est trĂšs important. Je ne sais pas si tu peux me comprendre mais il faut que tu m’écoutes. Je dois tirer sur un fil, mais lequel ? Je ne sais pas. Je ne sais pas par quoi ni par oĂč commencer. Mon Dieu, c’est si compliqué  Si je tire sur le mauvais, ou si je tire trop fort, le nƓud risque de se resserrer encore. De se resserrer si fort ou si mal qu’il n’y aura plus rien Ă  faire et je te quitterai accablĂ©. Car vois-tu, ChloĂ©, ma vie, toute ma vie est comme ce poing serrĂ©. Je suis lĂ , devant toi, dans cette cuisine. J’ai soixante-cinq ans. Je ne ressemble Ă  rien. Je suis ce vieux con que tu secouais tout Ă  l’heure. Je n’ai rien compris, je ne suis jamais montĂ© au sixiĂšme Ă©tage. J’ai eu peur de mon ombre et me voilĂ  maintenant, me voilĂ  devant l’idĂ©e de ma mort et
 Non, je t’en prie, ne m’interromps pas
 Pas maintenant. Laisse-moi ouvrir ce poing. Un tout petit peu. Je nous resservais Ă  boire. - Je vais commencer par le plus injuste, le plus cruel
 C’est-Ă -dire, toi
 Il s’était laissĂ© aller contre son dossier. - La premiĂšre fois que je t’ai vue, tu Ă©tais toute bleue. Je me souviens, j’étais impressionnĂ©. Je te revois encore dans l’encadrement de cette porte
 Adrien te soutenait et tu m’as tendu une main complĂštement recroquevillĂ©e par le froid. Tu ne pouvais pas me saluer, tu ne pouvais pas parler, j’avais donc pressĂ© ton bras en signe de bienvenue et je revois encore les marques blanches que mes doigts avaient imprimĂ©es sur ton poignet. À Suzanne qui s’affolait dĂ©jĂ , Adrien avait rĂ©pondu en riant Je vous ai ramenĂ© la Schtroumpfette ! » Ensuite, il t’a portĂ©e Ă  l’étage et t’a immergĂ©e dans un bain brĂ»lant. Combien de temps y es-tu restĂ©e ? Je ne m’en souviens pas, je me souviens juste d’Adrien qui rĂ©pĂ©tait Ă  sa mĂšre Du calme, Maman, du calme ! DĂšs qu’elle est cuite, nous passons Ă  table ». Parce que c’est vrai, nous avions faim, enfin, moi en tout cas, j’avais faim. Et tu me connais, tu sais comment sont les vieux cons quand ils ont faim
 J’allais ordonner qu’on dĂźne sans vous attendre quand tu es arrivĂ©e, les cheveux mouillĂ©s et le sourire timide dans un vieux peignoir de Suzanne. Cette fois, tes joues Ă©taient rouges, rouges, rouges
 Pendant le repas, vous nous aviez racontĂ© que vous vous Ă©tiez retrouvĂ©s dans la file d’attente d’un cinĂ©ma pour voir Un dimanche Ă  la campagne et qu’il n’y avait plus de place et qu’Adrien, crĂąneur - c’est de famille - t’avait proposĂ© un dimanche Ă  la campagne justement, devant sa moto. Que c’était Ă  prendre ou Ă  laisser et que tu avais pris, ce qui expliquait ton Ă©tat de congĂ©lation avancĂ©e puisque tu avais quittĂ© Paris en tee-shirt sous ton impermĂ©able. Adrien te mangeait des yeux et ce devait ĂȘtre difficile pour lui car tu gardais la tĂȘte toujours baissĂ©e. On voyait une fossette quand il parlait de toi, on imaginait donc que tu nous souriais
 Je me souviens aussi que tu portais d’incroyables baskets
 - Des Converse jaunes, c’est vrai ! - Oui, c’est vrai. C’est pour ça, tu peux toujours critiquer celles que j’ai offertes Ă  Lucie l’autre jour
 Tiens, il faudra que je lui dise, d’ailleurs
 Ne l’écoute pas, ma chĂ©rie, quand j’ai connu ta mĂšre, elle portait des baskets jaunes avec des lacets rouges
 - Vous vous souvenez aussi des lacets ? - Je me souviens de tout, ChloĂ©, de tout, tu m’entends ? Des lacets rouges, du livre que tu lisais le lendemain sous le cerisier pendant qu’Adrien dĂ©boulonnait son engin
 - C’était quoi ? - Le Monde selon Garp, non ? - Exact. - Je me souviens que tu avais proposĂ© Ă  Suzanne de dĂ©broussailler le petit escalier qui menait Ă  l’ancienne cave. Je me souviens des regards Ă©namourĂ©s qu’elle te lançait en te voyant t’échiner au-dessus des ronces. On pouvait lire Belle-fille ? Belle-fille ? » qui clignotait en lettres de feu devant ses yeux. Je vous avais emmenĂ©s au marchĂ© de Saint-Amand, tu avais achetĂ© des fromages de chĂšvre et puis nous avions bu un Martini sur la place. Tu lisais un article, sur Andy Warhol je crois, pendant que nous bousculions le flipper, Adrien et moi
 - C’est hallucinant, comment faites-vous pour vous rappeler tout ça ? - Euh
 je n’ai pas beaucoup de mĂ©rite
 C’était une des rares fois oĂč nous partagions quelque chose
 - Vous voulez dire, avec Adrien ? - Oui
 - Oui. Je me suis levĂ©e pour prendre le fromage. - Non, non, ne change pas les assiettes, ce n’est pas la peine. - Mais si ! Je sais que vous dĂ©testez manger votre fromage dans la mĂȘme assiette. - Je dĂ©teste ça, moi ? Oh
 C’est vrai
 Encore un truc de vieux con, non ? - Euh
 oui, je crois
 Il m’a tendu son assiette en grimaçant. - Garce. Fossettes. - Je me souviens de votre mariage, bien sĂ»r
 Tu Ă©tais Ă  mon bras et tu Ă©tais si belle. Tu te tordais les chevilles. Nous traversions cette mĂȘme place de Saint-Amand quand tu m’as glissĂ© Ă  l’oreille Vous devriez m’enlever, je jetterais ces maudites chaussures par la fenĂȘtre de votre voiture et nous irions manger des coquillages chez Yvette
 » Cette boutade m’avait donnĂ© le vertige. Je serrais mes gants. Tiens, serstoi d’abord
 - Allez-y, allez-y
 - Qu’est-ce que je pourrais te dire d’autre encore ?
 Je me souviens qu’un jour, nous nous Ă©tions donnĂ© rendez-vous au cafĂ© en bas de mon bureau pour que je rĂ©cupĂšre une louche ou je ne sais plus quoi que Suzanne t’avait prĂȘtĂ©e. J’avais dĂ» te paraĂźtre dĂ©sagrĂ©able ce jour-lĂ , j’étais pressĂ©, soucieux
 Je suis parti avant mĂȘme que tu aies bu ton thĂ©. Je te posais des questions sur ton travail et n’écoutais probablement pas les rĂ©ponses, enfin, bref
 Eh bien, le soir mĂȘme, Ă  table, quand Suzanne m’a demandĂ© quoi de neuf ? » sans y croire, je lui ai rĂ©pondu ChloĂ© est enceinte. - Elle te l’a dit ? - Non. D’ailleurs je ne suis pas sĂ»r qu’elle le sache ellemĂȘme
 » Suzanne avait haussĂ© les Ă©paules et levĂ© les yeux au ciel mais j’avais raison. Quelques semaines plus tard, vous nous annonciez la bonne nouvelle
 - Comment vous aviez devinĂ© ? - Je ne sais pas
 Il m’avait semblĂ© que ta carnation avait changĂ©, que ta fatigue venait d’ailleurs
 -
 - Je pourrais continuer comme ça longtemps. Tu vois, tu es injuste. Qu’est-ce que tu disais dĂ©jĂ  ? Que depuis tout ce temps, toutes ces annĂ©es, je ne m’étais jamais intĂ©ressĂ© Ă  toi
 Ooooh, ChloĂ©, j’espĂšre que tu as honte. Il me faisait les gros yeux. - Par contre, je suis Ă©goĂŻste, lĂ  tu as raison. Je te dis que je ne veux pas que tu partes, parce que je ne veux pas que tu partes. Je pense Ă  moi. Tu m’es plus proche que ma propre fille. Ma propre fille ne me dira jamais que je suis un vieux con, elle se contente de penser que je suis un con tout court ! Il s’était levĂ© pour attraper le sel. - Mais
 Qu’est-ce que tu as ? - Rien. Je n’ai rien. - Mais si, tu pleures. - Mais non, je ne pleure pas. Regardez, je ne pleure pas. - Mais si, tu pleures ! Tu veux un verre d’eau ? - Oui. - Oh, Chloé  Je ne veux pas que tu pleures. Ça me rend malheureux. - Et voilĂ  ! Encore vous ! Vous ĂȘtes incorrigible
 J’essayais de prendre un ton badin, mais des bulles de morve sortaient de mon nez, c’était pitoyable. Je riais. Je pleurais. Ce vin ne m’égayait pas du tout. - Je n’aurais pas dĂ» te parler de tout ça
 - Si, si. Ce sont mes souvenirs aussi
 Il faut juste que je m’y fasse un peu. Je ne sais si vous vous rendez bien compte, mais la situation est trĂšs nouvelle pour moi
 Il y a quinze jours, j’étais encore une mĂšre de famille tout confort. Je feuilletais mon agenda dans le mĂ©tro pour organiser des dĂźners et je me limais les ongles en pensant aux vacances. Je me disais Est-ce qu’on emmĂšne les filles ou est-ce qu’on part tous les deux ? » Enfin, vous voyez le genre de dilemme
 Je me disais aussi “ On devrait chercher un autre appartement, celui-lĂ  est bien, mais il est trop sombre
” J’attendais qu’Adrien aille mieux pour lui en parler parce que je voyais bien qu’il n’était pas dans son assiette ces derniers temps
 Irritable, susceptible, fatigué  Je me faisais du souci pour lui, je me disais “ Mais ils vont me le tuer dans cette boĂźte de fous, c’est quoi ces horaires dĂ©biles ? ” Il s’était tournĂ© vers le feu. - Tout confort mais pas trĂšs finaude, hein ? Je l’attendais pour dĂźner. J’attendais des heures. Souvent mĂȘme, je m’endormais en l’attendant
 Il finissait par rentrer, la mine dĂ©faite et la queue entre les jambes. Je me dirigeais vers la cuisine en m’étirant. Je m’activais. Il n’avait pas faim, bien sĂ»r, il avait cette dĂ©cence de n’avoir plus d’appĂ©tit. Ou peut-ĂȘtre qu’ils grignotaient avant ? Peut-ĂȘtre
 Que ça devait lui coĂ»ter de s’asseoir en face de moi ! Comme je devais ĂȘtre lourde avec ma gaietĂ© ordinaire et mes romans-feuilletons sur la vie du square FirminGĂ©don. Quel supplice pour lui quand j’y pense
 Lucie a perdu une dent, ma mĂšre ne va pas bien, la jeune fille au pair polonaise du petit Arthur sort avec le fils de la voisine, j’ai terminĂ© mon marbre ce matin, Marion s’est coupĂ© les cheveux c’est affreux, la maĂźtresse veut des boĂźtes d’Ɠufs, tu as l’air fatiguĂ©, prends une journĂ©e de congĂ©, donne-moi la main, tu reprendras des Ă©pinards ? Le pauvre
 quel supplice pour un homme infidĂšle mais scrupuleux. Quel supplice
 Mais je ne voyais rien. Je n’ai rien vu venir, vous comprenez ? Comment peut-on ĂȘtre si aveugle ? Comment ? Soit j’étais totalement abrutie, soit j’avais totalement confiance. Ce qui revient au mĂȘme manifestement
 Je basculai en arriĂšre. - Ah, Pierre
 Quelle cochonnerie cette vie
 - Il est bon, hein ? - TrĂšs. Dommage qu’il tienne si peu ses promesses
 - C’est la premiĂšre fois que j’en bois. - Moi aussi. - C’est comme ton rosier, je l’avais achetĂ© pour l’étiquette
 - Oui. Quelle cochonnerie
 C’est n’importe quoi. - Mais tu es jeune encore
 - Non, je suis vieille, je me sens vieille. Je suis toute cabossĂ©e. Je sens que je vais devenir mĂ©fiante. Je vais regarder ma vie Ă  travers un judas. Je n’ouvrirai plus la porte. Reculez. Montrez patte blanche. C’est bien, l’autre maintenant. Prenez les patins. Restez dans l’entrĂ©e. Ne bougez plus. - Non, tu ne deviendras jamais cette femme-lĂ . Quand bien mĂȘme tu le voudrais que tu ne pourrais pas. Les gens continueront Ă  entrer dans ta vie comme dans un moulin, tu souffriras encore et c’est trĂšs bien comme ça. Je ne me fais pas de souci pour toi. - Non, bien sĂ»r
 - Bien sĂ»r quoi ? - Vous ne vous faites pas de souci pour moi. Vous ne vous en faites pour personne de toute façon
 - C’est vrai, tu as raison. Je ne sais pas me pencher. - Pourquoi ? - Je ne sais pas. Parce que les autres ne m’intĂ©ressent pas, je suppose
 - 
 sauf Adrien. - Adrien quoi ? - Je pense Ă  lui. - Vous vous faites du souci pour Adrien ? - Oui, je crois
 Oui. - C’est pour lui que je m’en fais le plus en tout cas
 - Pourquoi ? - Parce qu’il est malheureux. Je tombais des nues. - Alors ça, c’est la meilleure ! Il n’est pas malheureux du tout
 Au contraire, il est trĂšs heureux ! Il a Ă©changĂ© une femme cabossĂ©e et ennuyeuse contre une premiĂšre main amusante. Sa vie est beaucoup plus drĂŽle aujourd’hui, vous savez. Je relevai ma manche. - Tiens, quelle heure est-il par exemple ? Dix heures moins le quart. OĂč est-il notre petit martyr ? OĂč est-il ? Au cinĂ©ma ou au théùtre, peut-ĂȘtre ? Ou bien il dĂźne quelque part. Ils doivent avoir terminĂ© leurs entrĂ©es maintenant
 il lui triture la paume en rĂȘvant Ă  plus tard. Attention, le plat arrive, elle reprend sa main et lui rend son sourire. Ou bien ils sont au lit
 Ce qui est le plus probable, non ? Au dĂ©but, on fait beaucoup l’amour si je me souviens bien
 - Tu es cynique. - Je me protĂšge. - Quoi qu’il fasse, il est malheureux. - À cause de moi, vous voulez dire ? Je lui gĂącherais son plaisir ? Oh, l’ingrate
 - Non. Pas Ă  cause de toi, Ă  cause de lui. À cause de cette vie, qui ne fait rien comme on le lui demande. Nos efforts sont dĂ©risoires
 - Vous avez raison, le pauvre chĂ©ri
 - Tu ne m’écoutes pas. - Non. - Pourquoi tu ne m’écoutes pas ? Je mordais dans mon bout de pain. - Parce que vous ĂȘtes un bulldozer, vous dĂ©truisez tout sur votre passage. Mon chagrin vous
 Vous quoi dĂ©jĂ  ? Vous encombre et vous agacera bientĂŽt, je le sais bien. Et puis cette histoire de lien du sang
 Cette notion dĂ©bile
 Vous avez Ă©tĂ© infoutu de serrer vos gamins dans vos bras, de leur dire une seule fois que vous les aimiez, mais Ă  cĂŽtĂ© de ça, je sais que vous prendrez toujours leur dĂ©fense. Quoi qu’ils disent, quoi qu’ils fassent, ils auront toujours raison face aux barbares que nous sommes. Nous qui ne portons pas le mĂȘme nom que vous. Vos enfants ne vous ont pas donnĂ© tellement de motifs de satisfaction on dirait, mais vous ĂȘtes le seul Ă  pouvoir les critiquer. Le seul ! Adrien s’est barrĂ© en me plantant lĂ  avec les filles. Bon, ça aussi, ça vous contrarie, mais je n’espĂšre plus vous entendre profĂ©rer quelques mots durs. Quelques mots durs
 ça ne changerait rien, mais ça me ferait tellement plaisir. Tellement plaisir, si vous saviez
 Oui, c’est minable
 Je suis minable. Mais, quelques mots bien sentis, bien cinglants, comme vous savez si bien les dire
 Pourquoi pas pour lui ? Je les mĂ©rite aprĂšs tout. J’attends la condamnation du patriarche assis au bout de la table. Depuis toutes ces annĂ©es que je vous Ă©coute dĂ©partager le monde. Les bons et les mĂ©chants, ceux qui mĂ©ritent votre estime et ceux qui ne la mĂ©ritent pas. Depuis toutes ces annĂ©es que je me cogne vos discours, votre autoritĂ©, vos moues de Commandeur, vos silences
 Tout ce chiquĂ©. Tout ce chiqué  Depuis le temps que vous nous gonflez, Pierre
 - Vous savez, je suis une Ăąme simple et j’ai besoin de vous entendre dire mon fils est un salaud et je te demande pardon. J’en ai besoin, vous comprenez ? - Ne compte pas sur moi. J’ai pris nos assiettes. - Je ne comptais pas sur vous. - Vous voulez un dessert ? - Non. - Vous ne voulez rien ? - Donc c’est fichu
 J’ai dĂ» tirer sur le mauvais fil
 Je ne l’écoutais plus. - Le nƓud s’est encore resserrĂ© et nous voilĂ  plus Ă©loignĂ©s que jamais. Alors je suis un vieux con
 Un monstre
 Et puis quoi encore ? Je cherchais l’éponge. - Et puis quoi encore ? ! Je l’ai regardĂ© droit dans les yeux. - Écoutez, Pierre, pendant des annĂ©es j’ai vĂ©cu avec un homme qui ne tenait pas debout parce que son pĂšre ne l’avait jamais Ă©paulĂ© correctement. Quand j’ai connu Adrien, il n’osait rien de peur de vous dĂ©cevoir. Et tout ce qu’il entreprenait me dĂ©primait parce que ce n’était jamais pour lui qu’il le faisait, c’était pour vous. Pour vous Ă©pater ou vous emmerder. Vous provoquer ou vous faire plaisir. C’était pathĂ©tique. J’avais Ă  peine vingt ans et j’ai dĂ©laissĂ© toute ma vie pour lui. Pour l’écouter et lui caresser la nuque quand il se confiait enfin. Je ne regrette rien, je ne pouvais pas faire autrement de toute façon. Ça me rendait malade qu’un garçon comme lui se dĂ©nigre Ă  ce point. Nous avons passĂ© des nuits entiĂšres Ă  tout dĂ©mĂȘler et Ă  faire la part des choses. Je l’ai secouĂ©. Je lui ai dit mille fois que c’était trop facile son histoire. Que c’était trop facile ! Nous avons pris de bonnes rĂ©solutions et nous les avons piĂ©tinĂ©es, nous en avons trouvĂ© d’autres et finalement, j’ai arrĂȘtĂ© mes Ă©tudes pour qu’il puisse reprendre les siennes. J’ai retroussĂ© mes manches et pendant trois ans, je l’ai dĂ©posĂ© Ă  la fac avant d’aller perdre mon temps dans les sous-sols du Louvre. C’était un accord entre nous je ne me plaignais pas Ă  condition qu’il ne me parle plus de vous. Je n’ai pas de mĂ©rite. Je ne lui ai jamais dit qu’il Ă©tait le meilleur. Je l’ai juste aimĂ©. Ai-mĂ©. Vous voyez de quoi je parle ? -
 - Alors, vous comprenez que je l’aie un peu mauvaise aujourd’hui
 Je passais l’éponge autour de ses mains posĂ©es sur la table. - La confiance est revenue, le fils prodigue a muĂ©. Il a menĂ© sa barque comme un grand et le voilĂ  maintenant qui abandonne sa vieille peau sous l’Ɠil attendri du mĂ©chant papa. Avouez que c’est un peu rude, non ? -
 - Vous ne dites rien ? - Non. Je vais me coucher. J’ai mis la machine en marche. - C’est ça, bonne nuit. Je me mordais les joues. Je gardais pour moi des choses affreuses. J’ai pris mon verre et je suis allĂ©e m’asseoir sur le canapĂ©. J’ai retirĂ© mes chaussures et je me suis recroquevillĂ©e sous les coussins. Je me suis relevĂ©e pour prendre la bouteille sur la table. J’ai secouĂ© le feu, Ă©teint la lumiĂšre et je suis revenue m’enterrer tranquillement. Je regrettais de n’ĂȘtre pas encore soĂ»le. Je regrettais d’ĂȘtre lĂ . Je regrettais
 Je regrettais tellement de choses. Tellement de choses
 J’ai posĂ© ma tĂȘte sur l’accoudoir et fermĂ© les yeux. 11. - Tu dors ? - Non. Il est allĂ© se servir un verre et s’est assis sur le fauteuil d’à cĂŽtĂ©. Le vent soufflait toujours. Nous Ă©tions dans l’obscuritĂ©. Nous regardions le feu. De temps en temps, l’un de nous buvait et l’autre l’imitait. Nous n’étions ni bien, ni mal. Nous Ă©tions fatiguĂ©s. Au bout d’un trĂšs long moment il a dit - Tu sais, je ne serais pas celui que tu dis que je suis devenu si j’avais Ă©tĂ© plus courageux
 - Pardon ? Je regrettais dĂ©jĂ  de lui avoir rĂ©pondu. Je ne voulais plus parler de tout ce merdier. Je voulais qu’on me laisse tranquille. - On parle toujours du chagrin de ceux qui restent mais as-tu dĂ©jĂ  songĂ© Ă  celui de ceux qui partent ? Oh lĂ , lĂ , me disais-je, mais qu’est-ce qu’il va encore me prendre la tĂȘte avec ses thĂ©ories, le vieux schnoque ? Je cherchais mes chaussures du regard. - On en reparlera demain, Pierre, je vais
 J’en ai marre. - Le chagrin de ceux par qui le malheur arrive
 Ceux qui restent, on les plaint, on les console, mais ceux qui partent ? - Mais qu’est-ce qu’ils veulent en plus, m’emportai-je, une couronne ? Un mot d’encouragement ? ! Il ne m’entendait pas. - Le courage de ceux qui se regardent dans la glace un matin et articulent distinctement ces quelques mots pour eux seuls Ai-je le droit Ă  l’erreur ? » Juste ces quelques mots
 Le courage de regarder sa vie en face, de n’y voir rien d’ajustĂ©, rien d’harmonieux. Le courage de tout casser, de tout saccager par
 par Ă©goĂŻsme ? Par pur Ă©goĂŻsme ? Mais non, pourtant
 Alors qu’est-ce ? Instinct de survie ? LuciditĂ© ? Peur de la mort ? - Le courage de s’affronter. Au moins une fois dans sa vie. De s’affronter, soi. Soi-mĂȘme. Soi seul. Enfin. -“ Le droit Ă  l’erreur ”, toute petite expression, tout petit bout de phrase, mais qui te le donnera ? - Qui, Ă  part toi ? Ses mains tremblaient. - Moi, je ne me le suis pas donné  Je ne me suis donnĂ© aucun droit. Que des devoirs. Et voilĂ  ce que je suis devenu un vieux con. Un vieux con aux yeux d’une des rares personnes pour lesquelles je nourris un peu d’estime. Quel fiasco
 - J’ai eu beaucoup d’ennemis. Je ne m’en vante pas, je ne m’en plains pas non plus, je m’en contrefous. Mais des amis
 Des gens auxquels j’ai eu envie de plaire ? Si peu, si peu
 Toi entre autres. Toi, ChloĂ©, parce que tu es si douĂ©e pour la vie. Parce que tu l’empoignes Ă  bout de bras. Tu bouges, tu danses, tu sais faire la pluie et le beau temps dans une maison. Tu as ce don merveilleux de rendre les gens heureux autour de toi. Tu es si Ă  l’aise, si Ă  l’aise sur cette petite planĂšte
 - J’ai l’impression que nous ne parlons pas de la mĂȘme personne
 Il ne m’a pas entendue. Il se tenait droit. Il ne parlait plus. Il n’avait pas croisĂ© ses jambes. Son verre Ă©tait posĂ© sur ses cuisses. Je ne distinguais pas son visage. Son visage Ă©tait dans l’ombre du fauteuil. - J’ai aimĂ© une femme
 Je ne te parle pas de Suzanne, je te parle d’une autre femme. J’avais rouvert les yeux. - Je l’ai aimĂ©e plus que tout. Plus que tout
 - Je ne savais pas qu’on pouvait aimer Ă  ce point
 Enfin, moi en tout cas, je croyais que je n’étais pas
 programmĂ© pour aimer de cette façon. Les dĂ©clarations, les insomnies, les ravages de la passion, c’était bon pour les autres tout ça. D’ailleurs, le seul mot de passion me faisait ricaner. La passion, la passion ! Je mettais ça entre hypnose et superstition, moi
 C’était presque un gros mot dans ma bouche. Et puis, ça m’est tombĂ© dessus au moment oĂč je m’y attendais le moins. Je
 J’ai aimĂ© une femme. - Je suis tombĂ© amoureux comme on attrape une maladie. Sans le vouloir, sans y croire, contre mon grĂ© et sans pouvoir m’en dĂ©fendre, et puis
 Il se raclait la gorge. - Et puis je l’ai perdue. De la mĂȘme maniĂšre. Je ne bougeais plus. Une enclume venait de me tomber sur la tĂȘte. - Elle s’appelait Mathilde. Elle s’appelle toujours Mathilde d’ailleurs. Mathilde Courbet. Comme le peintre
 - J’avais quarante-deux ans et je me trouvais vieux dĂ©jĂ . Je me suis toujours trouvĂ© vieux de toute façon. C’est Paul qui Ă©tait jeune. Paul sera toujours jeune et beau. - Moi, je suis Pierre. Le besogneux, le laborieux. - À dix ans, j’avais dĂ©jĂ  le visage que j’ai aujourd’hui. La mĂȘme coupe de cheveux, les mĂȘmes lunettes, les mĂȘmes gestes, les mĂȘmes petites manies. À dix ans, je changeais dĂ©jĂ  mon assiette au moment du fromage, j’imagine
 Je lui souriais dans le noir. - Quarante-deux ans
 Qu’attend-on de la vie Ă  quarante-deux ans ? - Moi, rien. Je n’attendais rien. Je travaillais. Encore et encore et toujours. C’était ma tenue de camouflage, mon armure, mon alibi. Mon alibi pour ne pas vivre. Parce que je n’aimais pas tellement ça, vivre. Je croyais que je n’étais pas douĂ© pour ça. - Je m’inventais des difficultĂ©s, des montagnes Ă  gravir. TrĂšs hautes. TrĂšs escarpĂ©es. Et puis je remontais mes manches. Je les gravissais et j’en inventais d’autres. Je n’étais pas ambitieux pourtant, j’étais sans imagination. Il a bu une gorgĂ©e. - Je
 Je ne savais pas tout ça, tu sais
 C’est Mathilde qui me l’a appris. Oh, Chloé  Comme je l’aimais
 Comme je l’aimais
 Tu es toujours lĂ  ? - Oui. - Tu m’écoutes ? - Oui. - Je t’embĂȘte ? - Non. - Tu vas t’endormir ? - Non. Il s’était levĂ© pour remettre une bĂ»che. Il est restĂ© accroupi devant la cheminĂ©e. - Tu sais ce qu’elle me reprochait ? Elle me reprochait d’ĂȘtre trop bavard. Tu te rends compte ? Moi
 Trop bavard ! C’est incroyable, non ? Mais c’était vrai pourtant
 Je posais ma tĂȘte sur son ventre et je parlais. Je parlais pendant des heures. Des jours entiers, mĂȘme. J’entendais le son de ma voix devenue si grave sous sa peau et j’aimais ça. Un vrai moulin Ă  paroles
 Je la soĂ»lais. Je la noyais. Elle riait. Elle me disait, mais, chut, ne parle pas tant, je ne t’entends plus. Pourquoi est-ce que tu parles comme ça ? J’avais quarante-deux ans de silence Ă  rattraper. Quarante-deux annĂ©es que je me taisais, que je gardais tout pour moi. Qu’est-ce que tu disais tout Ă  l’heure ? Que mon mutisme ressemblait Ă  du dĂ©dain, c’est ça ? C’est blessant, mais je peux le comprendre, je peux comprendre les reproches qui me sont adressĂ©s. Je peux les comprendre, mais je n’ai pas envie de m’en dĂ©fendre. C’est bien lĂ  le problĂšme d’ailleurs
 Mais, du dĂ©dain, je ne crois pas. Si inouĂŻ que cela puisse te sembler, je crois que mon mutisme ressemble plutĂŽt Ă  de la timiditĂ©. Je ne m’aime pas assez pour accorder une quelconque importance Ă  mes propos. Tourne sept fois ta langue dans ta bouche, dit l’expression. Moi, je la tourne toujours une fois de trop. Je suis dĂ©courageant pour les autres
 Je ne m’aimais pas avant Mathilde et je m’aime encore moins depuis. Je suppose que je suis dur Ă  cause de ça
 Il s’était rassis. - Je suis dur dans le travail, mais lĂ , c’est parce que je joue un rĂŽle, tu comprends ? Je suis obligĂ© d’ĂȘtre dur. ObligĂ© de leur faire croire que je suis une terreur. Tu imagines s’ils perçaient mon secret ? S’ils apprenaient que je suis timide ? Que je suis obligĂ© de travailler trois fois plus que les autres pour arriver au mĂȘme rĂ©sultat ? Que j’ai une mauvaise mĂ©moire ? Que je suis lent Ă  la comprenette ? Tu te rends compte ? Mais s’ils savaient tout cela, ils me boufferaient tout cru ! - Et puis je ne sais pas me faire aimer
 Je n’ai pas de charisme, comme on dit. Si j’annonce une augmentation, je prends un ton cassant, si l’on me remercie, je ne rĂ©ponds pas, quand je veux faire un petit geste, je m’en empĂȘche et si j’ai une bonne nouvelle Ă  rĂ©pandre, je charge Françoise de cette tĂąche. Sur le plan du management, des ressources humaines, comme ils disent aussi, je suis une calamitĂ©. Une vĂ©ritable calamitĂ©. C’est Françoise justement qui m’avait inscrit contre mon grĂ© Ă  une espĂšce de stage pour patrons ringards. Quelles foutaises
 Deux jours enfermĂ©s au Concorde La Fayette de la porte Maillot Ă  ingurgiter la bouillie dĂ©magogique d’une psy et d’un AmĂ©ricain surexcitĂ©. Il vendait son bouquin Ă  la fin. Be the Best and Work in Love ça s’appelait. Mon Dieu, quelle fumisterie quand j’y repense
 À la fin du stage, je me souviens, on nous avait distribuĂ© un diplĂŽme de gentil patron comprĂ©hensif. Je l’ai offert Ă  Françoise qui l’a punaisĂ© dans le placard oĂč l’on rangeait les produits d’entretien et les rouleaux de - C’était bien ? M’a-t-elle demandĂ©. - C’était affligeant. Elle a souri. - Écoutez, Françoise, ai-je ajoutĂ©, vous qui ĂȘtes ici comme Dieu le PĂšre, dites Ă  ceux que ça intĂ©resse que je ne suis pas aimable mais qu’ils ne perdront jamais leur place parce que je suis trĂšs fort en calcul mental. - Amen, avait-elle murmurĂ© en baissant la tĂȘte. - Mais c’était vrai. En vingt-cinq ans de tyrannie, je n’ai subi aucune grĂšve et je n’ai jamais licenciĂ© personne. MĂȘme quand ça a Ă©tĂ© si difficile au dĂ©but des annĂ©es 90, je n’ai licenciĂ© personne. Personne, tu m’entends ? - Et Suzanne ? -
 - Pourquoi vous ĂȘtes si dur avec elle ? - Tu me trouves dur ? - Oui. - Dur comment ? - Dur. Il avait de nouveau posĂ© sa tĂȘte sur le fauteuil. - Quand Suzanne s’est rendu compte que je la trompais, je ne la trompais plus depuis longtemps. J’avais
 Je te raconterai ça plus tard
 À l’époque, nous vivions rue de la Convention. Je n’aimais pas cet appartement. Je n’aimais pas la façon dont elle l’avait dĂ©corĂ©. J’étouffais lĂ -dedans. Trop de meubles, trop de bibelots, trop de photos de nous, trop de tout. Je te dis ça, ça n’a aucun intĂ©rĂȘt
 Je venais dans cet appartement pour y dormir, et parce que ma famille y vivait. Point. Un soir, elle m’a demandĂ© de l’emmener dĂźner. Nous sommes allĂ©s en bas de la maison. Une espĂšce de pizzeria minable. La lumiĂšre des nĂ©ons lui donnait une mine Ă©pouvantable. Elle qui s’était dĂ©jĂ  composĂ© une tĂȘte de femme outragĂ©e, ça n’arrangeait rien. C’était cruel mais je ne l’avais pas fait exprĂšs, tu sais. J’avais poussĂ© la porte du premier boui-boui venu
 Pressentant ce qui allait m’arriver, je n’avais pas envie de me trouver loin de mon lit. Et en effet, ça n’a pas traĂźnĂ©. À peine avait-elle reposĂ© le menu que, dĂ©jĂ , elle Ă©clatait en sanglots. Elle savait tout. Que c’était une femme plus jeune. Elle savait depuis combien de temps ça durait et comprenait pourquoi j’étais toujours parti maintenant. Elle ne pouvait plus le supporter. J’étais un monstre. MĂ©ritait-elle autant de mĂ©pris ? MĂ©ritaitelle d’ĂȘtre traitĂ©e comme ça ? Comme une souillon ? Au dĂ©but, elle avait fermĂ© les yeux. Elle se doutait bien de quelque chose, mais elle me faisait confiance. Elle pensait que c’était un coup de tĂȘte, un coup de sang, l’envie de plaire encore. Quelque chose de rassurant pour ma virilitĂ©. Et puis il y avait mon travail. Mon travail si prenant, si difficile. Et elle, elle Ă©tait tout accaparĂ©e par l’amĂ©nagement de la nouvelle maison. Elle ne pouvait pas tout gĂ©rer d’un coup. Elle ne pouvait pas ĂȘtre sur tous les fronts en mĂȘme temps ! Elle me faisait confiance ! AprĂšs il y avait eu ma maladie et elle avait fermĂ© les yeux. Mais, lĂ , maintenant, elle ne pouvait plus le supporter. Non, elle ne pouvait plus me supporter. Mon Ă©goĂŻsme, mon mĂ©pris, la façon dont
 À ce moment-lĂ , le serveur l’a interrompue, et, en l’espace d’une demiseconde, elle avait changĂ© de masque. En lui souriant, elle lui demandait des prĂ©cisions sur les tortellinis je-ne-sais-quoi. J’étais fascinĂ©. Quand il s’est tournĂ© vers moi, j’ai balbutiĂ© un “C
 Comme Madame” affolĂ©. Pas une seconde je n’avais songĂ© Ă  cette fichue carte, tu penses. Pas une seconde
 C’est lĂ  que j’ai mesurĂ© la force de Suzanne. Sa force immense. Le rouleau compresseur, c’est elle. C’est lĂ  que j’ai su qu’elle Ă©tait de trĂšs loin la plus solide et que rien ne pouvait l’atteindre vraiment. En fait, c’était juste une bĂȘte question d’emploi du temps. Elle venait me chercher des poux dans la tĂȘte parce que sa maison du bord de mer Ă©tait terminĂ©e. Le dernier cadre accrochĂ©, la derniĂšre tringle posĂ©e, elle s’était finalement tournĂ©e vers moi et avait Ă©tĂ© horrifiĂ©e par ce qu’elle venait d’y dĂ©couvrir. Je rĂ©pondais Ă  peine, me dĂ©fendais mollement, je te l’ai dit, j’avais dĂ©jĂ  perdu Mathilde Ă  ce moment-là
 Je regardais ma femme s’agiter en face de moi dans une pizzeria minable du quinziĂšme arrondissement de Paris et j’avais coupĂ© le son. Elle gesticulait, laissait rouler de grosses larmes sur ses joues, se mouchait et sauçait son assiette. Pendant ce temps, j’enroulais indĂ©finiment deux ou trois spaghettis autour de ma fourchette sans jamais parvenir Ă  les hisser jusqu’à ma bouche. Moi aussi, j’avais trĂšs envie de pleurer mais je me retenais
 - Pourquoi vous vous reteniez ? - Question d’éducation, je pense
 Et puis je me sentais encore si fragile
 Je ne pouvais pas prendre le risque de me laisser aller. Pas lĂ . Pas maintenant. Pas avec elle. Pas dans cette gargote sordide. J’étais
 Comment te dire
 Si friable. Elle m’a racontĂ© ensuite qu’elle avait consultĂ© un avocat pour mettre en route une procĂ©dure de divorce. J’étais soudain plus attentif. Un avocat ? Suzanne demandant le divorce ? Je n’imaginais pas que les choses Ă©taient allĂ©es si loin, qu’elle avait Ă©tĂ© Ă  ce point blessĂ©e
 Elle avait vu cette femme, la belle-sƓur d’une de ses amies. Elle avait beaucoup hĂ©sitĂ© mais en rentrant d’un week-end ici, elle avait pris sa dĂ©cision. Elle l’avait prise dans la voiture sur le chemin du retour alors que je ne lui avais adressĂ© la parole qu’une seule fois pour lui demander si elle avait la monnaie du pĂ©age. C’était une espĂšce de roulette russe conjugale qu’elle avait inventĂ©e si Pierre me parle, je reste, s’il ne parle pas, je divorce. J’étais troublĂ©. Je ne la savais pas si joueuse. Elle avait repris des couleurs et me regardait avec plus d’assurance Ă  prĂ©sent. Bien sĂ»r, elle avait tout dĂ©ballĂ©. Mes voyages, toujours plus longs, toujours plus nombreux, mon dĂ©sintĂ©rĂȘt de la vie familiale, mes enfants transparents, les carnets de notes que je n’avais jamais signĂ©s, les annĂ©es perdues Ă  tout organiser autour de moi. Pour mon bien-ĂȘtre, pour l’entreprise. Entreprise qui appartenait Ă  sa famille Ă  elle, entre parenthĂšses, le sacrifice de sa personne. Comment elle s’était occupĂ©e de ma pauvre mĂšre jusqu’au bout. Enfin tout, quoi, tout ce qu’elle avait eu besoin de raconter, plus tout ce que les avocats aiment entendre pour pouvoir chiffrer les dĂ©gĂąts. Moi aussi je reprenais du poil de la bĂȘte, on arrivait en terrain connu. Que voulait-elle ? De l’argent ? Combien ? Qu’elle me fixe un montant, j’avais dĂ©jĂ  sorti mon chĂ©quier. Mais non, elle me reconnaissait bien lĂ , croyant m’en tirer Ă  si bon compte... J’étais vraiment lamentable... Elle s’était remise Ă  sangloter entre deux bouchĂ©es de tiramisu. Pourquoi est-ce que je ne comprenais rien ? Il n’y avait pas que les rapports de force dans la vie. L’argent ne pouvait pas tout acheter. Tout racheter. Est-ce que je faisais semblant de ne rien comprendre ? Avais-je un cƓur ? J’étais vraiment lamentable. Lamentable
 - Mais pourquoi est-ce que tu ne demandes pas le divorce alors ? Avais-je fini par lĂącher, agacĂ©, je prends toutes les fautes sur moi. Toutes, tu m’entends ? MĂȘme le caractĂšre Ă©pouvantable de ma mĂšre, je veux bien signer quelque part pour le reconnaĂźtre si ça te chante, mais ne t’encombre pas d’un avocat, je t’en prie, dis-moi plutĂŽt combien tu veux. Je l’avais piquĂ©e au vif. Elle a relevĂ© la tĂȘte et m’a regardĂ© dans les yeux. C’était la premiĂšre fois depuis des annĂ©es que nous nous regardions si longtemps. J’essayais de dĂ©couvrir quelque chose de nouveau sur ce visage. Notre jeunesse peut-ĂȘtre
 Le temps oĂč je ne la faisais pas pleurer. OĂč je ne faisais pleurer aucune femme, et oĂč l’idĂ©e mĂȘme de bavasser autour d’une table du sentiment amoureux me semblait inconcevable. Mais je n’ai rien dĂ©couvert, seulement la moue un peu triste d’une Ă©pouse vaincue qui s’apprĂȘtait Ă  passer aux aveux. Elle n’était pas retournĂ©e chez son avocate car elle n’en avait pas le courage. Elle aimait sa vie, sa maison, ses enfants, ses commerçants
 Elle avait honte de se l’avouer, et pourtant c’était la vĂ©ritĂ© elle n’avait pas le courage de me quitter. Pas le courage. Je pouvais courir si ça me chantait, je pouvais en sauter d’autres si ça me rassurait, mais, elle, elle ne partirait pas. Elle ne voulait pas perdre ce qu’elle avait conquis. Cet Ă©chafaudage social. Nos amis, nos relations, les amis des enfants. Et puis il y avait cette maison toute pimpante dans laquelle nous n’avions encore jamais dormi
 C’était un risque qu’elle n’avait pas envie de prendre. AprĂšs tout, qu’est-ce que ça pouvait lui faire ? Il y en avait des hommes qui trompaient leur femme
 Un paquet mĂȘme
 Elle s’était confiĂ©e et avait Ă©tĂ© déçue par la banalitĂ© de son histoire. C’était ainsi. La faute Ă  ce qui nous pendait entre les jambes. Il fallait faire le gros dos et laisser passer l’orage. Elle avait fait le premier pas, mais l’idĂ©e de n’ĂȘtre plus madame Pierre Dippel la laissait exsangue. C’était comme ça et c’était tant pis pour elle. Sans les enfants, sans moi, elle ne pesait pas lourd. Je lui tendais mon mouchoir. “Ce n’est pas grave, ajouta-t-elle en se forçant Ă  sourire, ce n’est pas grave
 Je reste prĂšs de toi parce que je n’ai pas trouvĂ© de meilleure idĂ©e. Je me suis mal organisĂ©e pour une fois. Moi qui prĂ©vois toujours tout, lĂ , je
 Je me suis laissĂ© dĂ©border, on dirait.” Elle souriait en pleurant. J’ai tapotĂ© sa main. C’était fini. J’étais lĂ . Je n’étais avec personne d’autre. Personne. C’était fini. C’était fini
 Nous avons bu nos cafĂ©s en commentant le mauvais goĂ»t de la dĂ©coration et les moustaches du patron. Deux vieux amis tout couverts de cicatrices. Nous venions de soulever une grosse pierre et de la laisser retomber aussitĂŽt. C’était trop affreux ce qui grouillait lĂ -dessous. Ce soir-lĂ , dans le noir, j’ai pris Suzanne chastement dans mes bras. Je ne pouvais pas faire plus. Ce fut pour moi une nouvelle nuit blanche. Au lieu de me rassurer, ses aveux m’avaient complĂštement Ă©branlĂ©. Il faut dire que j’étais si mal Ă  cette Ă©poque. Si mal. Si mal. Tout m’écorchait. Je me trouvais vraiment dans une situation affligeante j’avais perdu celle que j’aimais et venais de comprendre que j’avais aussi esquintĂ© l’autre. Quel tableau
 J’avais perdu l’amour de ma vie pour rester avec une femme qui ne me quittait pas Ă  cause de son fromager et de son charcutier. C’était inextricable. C’était du sabotage. Ni Mathilde, ni Suzanne n’avaient mĂ©ritĂ© ça. J’avais tout ratĂ©. Jamais je ne m’étais senti aussi misĂ©rable
 Les mĂ©dicaments ne devaient rien arranger non plus, c’est sĂ»r, mais si j’avais Ă©tĂ© plus courageux moi aussi, je me serais pendu cette nuit-lĂ . Il renversait sa tĂȘte en arriĂšre pour finir son verre. - Mais Suzanne ? Elle n’est pas malheureuse avec vous
 - Tu crois ? Comment tu peux dire une chose pareille ? Elle t’a dit qu’elle Ă©tait heureuse ? - Non. Pas comme ça. Ce n’est pas ce qu’elle a dit mais elle me l’a laissĂ© entendre
 De toute façon, ce n’est pas le genre de femme Ă  se poser un moment pour se demander si elle est heureuse
 - Non, ce n’est pas le genre en effet
 C’est lĂ  sa force, d’ailleurs. Mais, tu sais, si j’étais si malheureux cette nuit-lĂ , c’était surtout Ă  cause d’elle. Quand je vois ce qu’elle est devenue
 Si dadame, si convenue
 Et si tu avais vu quel morceau de fille c’était quand je l’ai rencontrĂ©e
 Je ne suis pas fier de moi, non, vraiment, il n’y a pas de quoi pavoiser. Je l’ai Ă©touffĂ©e. Je l’ai fanĂ©e. Pour moi, elle a toujours Ă©tĂ© celle qui est lĂ . Dans les parages. Sous ma main. Au bout du fil. Avec les enfants. Dans la cuisine. Une espĂšce de vestale qui dĂ©pensait l’argent que je gagnais et faisait tourner notre petit monde dans le confort et sans se plaindre. Je ne l’ai jamais vue plus loin que le bout de mon nez. Lequel de ses secrets ai-je essayĂ© de percer ? Aucun. L’ai-je jamais questionnĂ©e sur elle, son enfance, ses souvenirs, ses regrets, sa lassitude, notre vie charnelle, ses espoirs déçus, ses rĂȘves ? Non. Jamais. Rien. Rien ne m’intĂ©ressait. - N’en faites pas trop non plus, Pierre. Vous ne pouvez pas tout prendre sur vos Ă©paules. L’auto flagellation a ses charmes, mais quand mĂȘme
 Vous n’ĂȘtes pas trĂšs crĂ©dible en saint SĂ©bastien, vous savez
 - C’est bien, tu ne me passes rien. Tu es ma petite persifleuse prĂ©fĂ©rĂ©e. C’est pour ça que ça m’ennuie de te perdre. Qui me volera dans les plumes quand tu ne seras plus lĂ  ? - Nous dĂ©jeunerons ensemble de temps en temps
 - Tu me le promets ? - Oui. - Tu dis ça et puis tu ne le feras pas, j’en suis sĂ»r
 - Nous fixerons un rite, le premier vendredi de chaque mois par exemple
 - Pourquoi le vendredi ? - Parce que j’aime le bon poisson ! Vous m’emmĂšnerez dans de bons restaurants, n’est-ce pas ? - Les meilleurs ! - Ah ! J’en suis fort aise
 Mais dans longtemps
 - Longtemps ? - Oui. - Quand ? -
 - Bien. Je patienterai. Je remuais une bĂ»che. - Pour en revenir Ă  Suzanne
 Ce cĂŽtĂ© si dadame comme vous dites, vous n’y ĂȘtes pour rien et heureusement. Il y a quand mĂȘme des choses qu’elle peut revendiquer sans votre sceau. Vous savez, c’est comme ces produits anglais qui fanfaronnent by appointment to Her Majesty ». Suzanne est devenue ce qu’elle est sans avoir eu besoin de votre appointment ». Vous ĂȘtes un peu emmerdant, mais vous n’ĂȘtes pas tout-puissant quand mĂȘme ! Ce cĂŽtĂ© dame patronnesse, coureuse de soldes et fiches cuisine, elle n’a pas eu besoin de vous pour se la fabriquer la panoplie. C’est de nature, comme on dit. Elle a ça dans le sang, ce cĂŽtĂ© J’époussette Je commente Je juge et Je pardonne. C’est Ă©puisant, enfin moi, ça m’épuise, mais c’est le revers de ses mĂ©dailles, et Dieu sait qu’elle en a des mĂ©dailles, hein ? - Oui. Dieu doit le savoir, lui
 Tu veux boire quelque chose ? - Non merci. - Une tisane peut-ĂȘtre ? - Non, non. Je prĂ©fĂšre m’enivrer tout doucement
 - Bon
 eh bien je vais te laisser tranquille. - Pierre ? - Oui. - Je n’en reviens pas. - De quoi ? - De tout ce que vous venez de me raconter
 - Moi non plus. - Et Adrien ? - Adrien quoi ? - Vous lui direz ? - Qu’est-ce que je lui dirai ? - Eh bien
 Tout ça
 - Adrien est venu me voir, figure-toi. - Quand ? - La semaine derniĂšre et
 Je ne lui ai pas parlĂ©. Enfin, je ne lui ai pas parlĂ© de moi, mais je l’ai Ă©couté  - Qu’est-ce qu’il vous a dit ? - Ce que je t’ai dit, ce que je savais dĂ©jà
 Qu’il Ă©tait malheureux, qu’il ne savait plus oĂč il en Ă©tait
 - Il est venu se confier Ă  vous ? ! - Oui. Je me suis remise Ă  pleurer. - Ça t’étonne ? Je secouais la tĂȘte. - Je me sens trahie. MĂȘme vous. Vous
 Je dĂ©teste ça. Moi, je ne fais pas ça aux gens, je
 - Calme-toi. Tu mĂ©langes tout. Qui te parle de trahison ? OĂč est la trahison ? Il est arrivĂ© sans prĂ©venir et dĂšs que je l’ai vu, je lui ai proposĂ© de sortir. J’ai Ă©teint mon portable et nous sommes descendus au parking. Au moment oĂč je mettais le contact, il me l’a dit Je vais quitter ChloĂ©. » Je n’ai pas bronchĂ©. Nous sommes remontĂ©s Ă  l’air libre. Je ne voulais pas lui poser de questions, j’attendais qu’il parle
 Toujours ce problĂšme de fils Ă  dĂ©mĂȘler... Je ne voulais rien brusquer. Je ne savais pas oĂč aller. J’étais un peu secouĂ© moi-mĂȘme pour tout t’avouer. J’ai pris les MarĂ©chaux et ouvert le cendrier. - Et alors ? Ajoutai-je. - Alors rien. Il est mariĂ©. Il a deux enfants. Il a rĂ©flĂ©chi. Il pense que ça vaut
 - Taisez-vous, taisez-vous
 Je connais la suite. Je m’étais levĂ©e pour attraper le rouleau de Sopalin. - Vous devez ĂȘtre fier de lui, hein ? C’est bien, ce qu’il fait, hein ? Ça, c’est un homme au moins ! Un type courageux. Quelle belle revanche il vous offre lĂ  ! Quelle belle revanche
 - Ne prends pas ce ton-lĂ . - Je prends le ton que je veux et je vais vous dire ce que je pense
 Vous ĂȘtes encore pire que lui. Vous, vous avez tout ratĂ©. Oui, sous vos grands airs, vous avez tout ratĂ© et vous vous servez de lui, de ses coucheries pour vous rĂ©conforter. Je trouve ça minable. Vous m’écƓurez tous les deux. - Tu dis n’importe quoi. Tu le sais, n’est-ce pas ? Tu le sais que tu dis n’importe quoi ? Il me parlait trĂšs doucement. - Si c’était une affaire de coucheries, comme tu dis, nous n’en serions pas lĂ , tu le sais bien
 - ChloĂ©, parle-moi. - Je suis la reine des connes
 Non. Ne me contredisez pas pour une fois. Ne me contredisez pas, ça me ferait tellement plaisir. - Je peux te faire un aveu ? Un aveu trĂšs difficile ? - Allez-y, au point oĂč j’en suis
 - Je pense que c’est une bonne chose. - Une bonne chose de quoi ? - Ce qui t’arrive là
 - D’ĂȘtre la reine des connes ? - Non, qu’Adrien s’éloigne. Je pense que tu vaux mieux que ça
 Mieux que cette gaietĂ© un peu forcĂ©e
 Mieux que de te limer les ongles dans le mĂ©tro en tripotant ton agenda, mieux que le square Firmin-GĂ©don, mieux que ce que vous Ă©tiez devenus tous les deux. C’est choquant, ce que je te dis lĂ , n’est-ce pas ? Et puis de quoi je me mĂȘle, hein ? Oui, c’est choquant, mais tant pis. Je ne peux pas faire semblant, je t’aime trop bien. Je pense qu’Adrien n’était pas Ă  la hauteur. Il avait chaussĂ© un peu grand avec toi. VoilĂ  ce que je pense
 C’est choquant parce que c’est mon fils et que je ne devrais pas parler de lui comme ça
 Oui, je sais. Mais voilĂ , je suis un vieux con et je me fous des biensĂ©ances. Je te le dis parce que j’ai confiance en toi. Tu
 Tu n’étais pas si bien aimĂ©e. Et si tu Ă©tais aussi honnĂȘte que moi Ă  cette minute prĂ©cise de ta vie, tu prendrais un air offusquĂ© bien sĂ»r, mais tu n’en penserais pas moins
 - Vous dites n’importe quoi. - Nous y voilĂ . Ton petit air offusqué  - Vous faites dans la psychanalyse maintenant ? - Tu ne l’as jamais entendue, cette voix dans ton for intĂ©rieur qui te pinçait de temps en temps pour te rappeler que tu n’étais pas si bien aimĂ©e que ça ? - Non. - Non ? - Non. - Bon. Alors je dois me tromper
 Il s’était avancĂ© en s’appuyant sur ses genoux. - Moi, je pense que tu devrais remonter un jour
 - Remonter d’oĂč ? - Du troisiĂšme sous-sol. - Vous avez vraiment un avis sur tout, hein ? - Non. Pas sur tout. Qu’est-ce que c’est que ce travail de grouillot dans les caves d’un musĂ©e quand on sait de quoi tu es capable ? C’est du temps perdu. Tu fais quoi ? Des copies ? Des moulages ? Tu bricoles. La belle affaire ! Jusqu’à quand ? Jusqu’à la retraite ? Ne me dis pas que tu es heureuse dans ce trou Ă  rats de fonctionnaires
 - Non, non, ironisai-je, je ne vais pas vous dire ça, rassurez-vous. - Moi, si j’étais ton amoureux, je t’attraperais par la peau du cou et te remonterais Ă  la lumiĂšre. Tu as quelque chose dans les mains et tu le sais. Assume ça. Assume tes dons. Assume cette responsabilitĂ©. Moi, je te poserais quelque part et je te dirais À toi maintenant. À toi de jouer, ChloĂ©. Montre-nous ce que tu as dans le ventre. » - Et si je n’ai rien ? - Eh bien, ce serait l’occasion de le savoir. Et arrĂȘte de te mordre la lĂšvre, tu me fais mal. - Pourquoi vous avez tant de bonnes idĂ©es pour les autres et si peu pour vousmĂȘme ? - J’ai dĂ©jĂ  rĂ©pondu Ă  cette question. - Qu’est-ce qu’il y a ? - J’ai cru entendre Marion pleurer
 - Je n’ent
 - Chut
 - Ça va, elle s’est rendormie. Je me suis rassise en tirant la couverture sur moi. - Tu veux que j’aille voir ? - Non, non. Attendons un petit peu. - Et je mĂ©rite quoi, d’aprĂšs vous, monsieur Je-sais-tout ? - Tu mĂ©rites d’ĂȘtre traitĂ©e comme ce que tu es. - C’est-Ă -dire ? - Comme une princesse. Une princesse des Temps modernes. - Pff
 N’importe quoi. - Oui, je suis prĂȘt Ă  dire n’importe quoi. N’importe quoi du moment que ça te fasse sourire
 Souris-moi, ChloĂ©. - Vous ĂȘtes fou. Il s’était levĂ©. - Ah
 Parfait ! J’aime mieux ça. Tu commences Ă  dire moins de bĂȘtises
 Oui, je suis fou, et tu veux que je te dise, mĂȘme ? Je suis fou et j’ai faim ! Qu’est-ce que je pourrais bien manger comme dessert ? - Regardez dans le frigidaire. Il faudrait finir les yaourts des filles
 - OĂč ça ? - Tout en bas. - Les petits machins roses ? - Oui. - Ce n’est pas mauvais
 Il lĂ©chait sa cuillĂšre. - Vous avez vu comment ça s’appelle ? - Non. - Regardez, c’était pour vous. - Petits Filous
 C’est malin. - Nous ferions mieux d’aller nous coucher, tu ne crois pas ? - Oui. - Tu as sommeil ? Je me dĂ©solais. - Comment voulez-vous que je dorme avec tout ce que nous remuons ? J’ai l’impression de touiller un gros chaudron
 - Moi, je dĂ©noue ma pelote, toi tu touilles ton chaudron. C’est amusant les images que nous employons
 - Vous le matheux et moi la mĂ©mĂšre. - La mĂ©mĂšre ? N’importe quoi. Ma princesse, une mĂ©mĂšre
 Ah, lĂ , lĂ  ! ce que tu as pu dire comme bĂȘtises ce soir. - Vous ĂȘtes pĂ©nible, hein ? - TrĂšs. - Pourquoi ? - Je ne sais pas. Peut-ĂȘtre parce que je dis ce que je pense. Ce n’est pas si courant
 Je n’ai plus peur de n’ĂȘtre pas aimĂ©. - Et par moi ? - Oh toi, tu m’aimes, je ne m’en fais pas ! - Pierre ? - Oui. - Qu’est-ce qu’il s’est passĂ© avec Mathilde ? Il m’a regardĂ©e. Il a ouvert la bouche et l’a refermĂ©e. Il a croisĂ© ses jambes et les a dĂ©croisĂ©es. Il s’est levĂ©. Il a tisonnĂ© le feu et dĂ©rangĂ© les braises. Il a baissĂ© la tĂȘte et murmurĂ© - Rien. Il ne s’est rien passĂ©. Ou si peu. Si peu de jours, si peu d’heures
 Presque rien en vĂ©ritĂ©. - Vous n’avez pas envie d’en parler ? - Je ne sais pas. - Vous ne l’avez jamais revue ? - Si. Une fois. Il y a quelques annĂ©es. Dans les jardins du Palais-Royal
 - Et alors ? - Alors rien. - Comment vous l’aviez rencontrĂ©e ? - Tu sais
 Si je commence, je ne sais pas quand je vais m’arrĂȘter
 - Je vous l’ai dit, je n’ai pas sommeil. Il s’est mis Ă  examiner le dessin de Paul. Les mots rĂ©sistaient. - C’était quand ? - C’était
 Je l’ai vue pour la premiĂšre fois le 8 juin 1978 vers onze heures du matin heure locale Ă  Hongkong. Nous nous trouvions au vingt-neuviĂšme Ă©tage de la tour Hyatt dans le bureau d’un monsieur Singh qui avait besoin de moi pour forer quelque part Ă  TaĂŻwan. Ça te fait sourire ? - Oui, c’est prĂ©cis. Elle travaillait avec vous ? - Elle Ă©tait ma traductrice. - Du chinois ? - Non, de l’anglais. - Mais vous parlez anglais, vous ? - Pas bien. Pas assez bien pour traiter ce genre d’affaires, tout cela est tellement subtil. À ce niveau-lĂ , ce n’est plus du langage, c’est de la prestidigitation. Un sous-entendu t’échappe et tu perds vite les pĂ©dales. En plus, je ne connaissais pas les termes exacts pour traduire le jargon technique dont nous avions besoin ce jour-lĂ  et, pour couronner le tout, je ne me suis jamais fait Ă  l’accent des Chinois. J’ai l’impression d’entendre ting ting » Ă  la fin de chaque mot. Je parle des mots qu’ils ne mĂąchonnent pas Ă©videmment. - Et alors ? - Alors j’étais dĂ©routĂ©. Je m’attendais Ă  travailler avec un vieux monsieur anglais, un traducteur du cru avec qui Françoise avait minaudĂ© au tĂ©lĂ©phone, Vous allez voir, un vrai gentleman
 » Tu parles ! Me voilĂ , sous pression, dĂ©calĂ© d’une nuit, angoissĂ©, nouĂ©, tremblant comme une feuille, et pas le moindre British Ă  l’horizon. C’était un Ă©norme marchĂ©, de quoi faire tourner la maison pendant plus de deux ans. Je ne sais pas si tu peux t’en rendre compte
 - Vous vendiez quoi au juste ? - Des cuves. - Des cuves ? - Oui, mais attends
 Pas des cuves ordinaires, des
 - Non, non, je m’en fiche ! Continuez ! - Donc, je te disais, j’étais Ă  bout de nerfs. Je travaillais sur ce projet depuis des mois, j’avais investi lĂ -dedans des capitaux Ă©normes. J’avais endettĂ© la boĂźte et j’y avais laissĂ© mes petites Ă©conomies aussi. Je pouvais retarder la fermeture d’une usine prĂšs de Nancy. Dix-huit bonshommes. J’avais les frĂšres de Suzanne sur le dos et je savais qu’ils m’attendaient au tournant, qu’ils ne me feraient pas de cadeau, ces bons Ă  rien
 En plus, j’avais une diarrhĂ©e carabinĂ©e. Excuse-moi d’ĂȘtre si prosaĂŻque, mais je
 Bref, je suis entrĂ© dans ce bureau comme on descend dans une arĂšne et quand j’ai compris que c’était entre les mains de
 de
 de cette crĂ©ature que je remettais ma vie, j’ai failli tomber dans les pommes. - Mais pourquoi ? - Tu sais, c’est un monde trĂšs machiste, le pĂ©trole. Maintenant, ça a un peu changĂ©, mais Ă  l’époque, on ne voyait pas beaucoup de femmes
 - Et puis vous aussi
 - Moi quoi ? - Vous ĂȘtes un peu machiste
 Il ne disait pas non. - Attends, mais mets-toi Ă  ma place une seconde ! Je m’attendais Ă  serrer la main d’un vieil Anglais flegmatique, un gars rompu aux us et coutumes des colonies avec des moustaches et un costume froissĂ©, et me voilĂ  en train de saluer une jeunette en lorgnant son dĂ©colleté  Oh, non, je t’assure, c’était trop pour moi. Je n’avais pas besoin de ça
 Le sol se dĂ©robait sous mes pieds. Elle m’expliquait que son Mister Magoo Ă©tait souffrant, qu’on l’avait dĂ©pĂȘchĂ©e la veille au soir, et elle me serrait la main trĂšs fort pour me donner du courage. Enfin, c’est ce qu’elle m’a dit aprĂšs, qu’elle m’avait secouĂ© comme un prunier parce qu’elle m’avait trouvĂ© un peu pĂąlot. - Il s’appelait vraiment Mister Magoo ? - Non. Je te dis n’importe quoi. - Et aprĂšs ? - AprĂšs je lui ai chuchotĂ© Ă  l’oreille Mais vous ĂȘtes au courant
 Je veux dire des donnĂ©es du problĂšme
 C’est assez spĂ©cifique
 Je ne sais pas si on vous a prĂ©venue
 » Et lĂ , elle m’a fait un sourire merveilleux. Un genre de sourire merveilleux qui voulait dire Ă  peu prĂšs Tttt
 Ne m’embrouille pas mon bonhomme. J’étais anĂ©anti. Je m’étais penchĂ© sur ce mignon cou. Elle sentait bon. Elle sentait merveilleusement bon
 Tout se mĂ©langeait dans ma tĂȘte. C’était la catastrophe. Elle Ă©tait assise en face de moi, Ă  la droite d’un sĂ©millant Chinois qui me tenait par les parties, si je puis me permettre. Elle avait posĂ© son menton sur ses doigts croisĂ©s et me jetait des regards confiants pour me donner du courage. Il y avait quelque chose de cruel dans ces petits sourires en coin, j’étais complĂštement dans le coaltar mais je m’en rendais bien compte. Je ne respirais plus. Je croisais mes bras sur mon ventre pour retenir ma bidoche et je priais le ciel. J’étais Ă  sa merci. J’allais vivre les plus belles heures de ma vie. - Comme vous racontez bien
 - Tu te moques de moi. - Non, non, pas du tout ! - Si. Tu te moques. J’arrĂȘte. - Non, je vous en prie ! Surtout pas. Et aprĂšs ? - Tu m’as coupĂ© dans mon Ă©lan. - Je ne dirai plus rien. - Et aprĂšs ? - AprĂšs quoi ? - AprĂšs, avec le Chinetoque, comment ça s’est passĂ© ? - Vous souriez. Pourquoi vous souriez ? Racontez-moi ! - Je souris parce que c’était incroyable
 Parce qu’elle Ă©tait incroyable
 Parce que la situation Ă©tait complĂštement incroyable
 - ArrĂȘtez de sourire tout seul ! Racontez-moi ! Racontez-moi, Pierre ! - Eh bien
 D’abord, elle a sorti un Ă©tui de son sac, un petit Ă©tui en plastique façon crocodile. Elle y mettait beaucoup de componction. Ensuite, elle a posĂ© sur son nez une affreuse paire de bĂ©sicles. Tu sais, ces petites lunettes sĂ©vĂšres avec une monture en fer-blanc. Des lunettes d’institutrice Ă  la retraite. Et Ă  partir de ce moment-lĂ , son visage s’est fermĂ©. Elle ne me regardait plus comme avant. Elle soutenait mon regard et attendait que je rĂ©cite ma leçon. Je parlais, elle traduisait. J’étais fascinĂ© parce qu’elle commençait ses phrases avant que j’aie terminĂ© les miennes. Je ne sais pas comment elle rĂ©ussissait ce tour de force. Elle Ă©coutait et rĂ©pĂ©tait presque tout en mĂȘme temps. C’était de la traduction simultanĂ©e. C’était fascinant
 Vraiment
 Au dĂ©but, je parlais lentement et puis de plus en plus vite. Je crois que j’essayais dĂ©jĂ  de la bousculer un peu. Elle ne cillait pas. Au contraire, elle s’amusait Ă  finir mes phrases avant moi. DĂ©jĂ  elle me faisait sentir Ă  quel point j’étais prĂ©visible
 Et puis elle s’est levĂ©e pour traduire des courbes sur un tableau. J’en profitais pour regarder ses jambes. Elle avait un petit cĂŽtĂ© dĂ©suet, dĂ©modĂ©, totalement anachronique. Elle portait une jupe Ă©cossaise jusqu’aux genoux, un twin-set vert foncĂ©, des
 Pourquoi tu ris encore ? - Parce que vous dites ce mot twin-set ». Ça me fait rire. - Mais enfin ! Je ne vois pas ce qu’il y a de drĂŽle ! Qu’est-ce que tu veux que je dise d’autre ? - Rien, rien
 - Tu es idiote
 - Je me tais, je me tais. - MĂȘme son soutien-gorge Ă©tait dĂ©modé  Elle avait la poitrine pigeonnante des filles de ma jeunesse. De jolis seins, pas trĂšs gros, un peu Ă©cartĂ©s, pointus
 Pigeonnants, quoi. Et puis j’étais fascinĂ© par son ventre. Ce petit ventre rebondi, rond, rond comme un ventre d’oiseau. Ce petit ventre adorable qui dĂ©formait les carreaux de sa jupe et que je trouvais
 Ă  ma main dĂ©jà
 Je cherchais Ă  apercevoir ses pieds quand j’ai vu son trouble. Elle s’était tue. Elle Ă©tait toute rose. Son front, ses joues, son cou Ă©taient roses. Rose comme une petite Ă©crevisse. Elle me regardait effarĂ©e. - Que se passe-t-il ? ai-je demandĂ©. - Vous
 Vous n’avez pas compris ce qu’il a dit ? - Nn
 Non. Qu’est-ce qu’il a dit ? - Vous n’avez pas compris ou vous n’avez pas entendu ? - Je
 Je ne sais pas
 Je n’ai pas Ă©coutĂ©, je crois
 Elle regardait par terre. Elle Ă©tait Ă©mue. J’imaginais le pire, le dĂ©sastre, la gaffe, la grosse bourde
 et je mettais la clef sous la porte pendant qu’elle resserrait son chignon. - Que se passe-t-il ? Il y a un problĂšme ?” Le Chinois riait, lui disait quelque chose que je ne comprenais toujours pas. J’étais complĂštement perdu. Je ne comprenais rien. Je passais pour un con, oui ! - Mais qu’est-ce qu’il dit ? Dites-moi ce qu’il a dit ! !” Elle bafouillait. - C’est foutu, c’est ça ? - Non, non, je ne crois pas
 - Alors quoi ? - Monsieur Singh se demande si c’est une bonne idĂ©e de traiter d’un si gros business avec vous aujourd’hui
 - Mais pourquoi ? Qu’est-ce qui ne va pas ?” Je me tournais vers lui pour le rassurer. J’opinais bĂȘtement du chef et tentais un sourire de French manager conquĂ©rant. Je devais ĂȘtre ridicule
 Et l’autre gros pĂšre qui se marrait toujours
 Il Ă©tait si content de lui qu’on ne distinguait plus ses yeux. - J’ai dit une bĂȘtise ? - Non. - Vous avez dit une bĂȘtise ? - Moi ? Mais non ! Je me contente de rĂ©pĂ©ter votre charabia ! - Mais alors quoi ? ! Je sentais de grosses gouttes de sueur dĂ©gouliner sous mes aisselles. Elle riait, s’éventait. Semblait un peu nerveuse. - Monsieur Singh dit que vous n’ĂȘtes pas concentrĂ©. - Mais si, je suis concentrĂ© ! Je suis trĂšs concentrĂ© ! I am very concentrated ! - No, no, rĂ©pondait-il en secouant la tĂȘte. - Monsieur Singh dit que vous n’ĂȘtes pas concentrĂ© parce que vous ĂȘtes en train de tomber amoureux et monsieur Singh ne veut pas traiter une affaire avec un Français qui tombe amoureux. Il dit que c’est trop dangereux.” - C’est moi qui suis devenu cramoisi. - Non, non
 No, no ! Ça va. I am fine, I mean I am calm
 I
 I
 Et vers elle - Dites-lui que ce n’est pas vrai. Que ça va. Que tout est bien pour moi. Dites-lui que
 I am okay. Yes, yes, I’m okay. Je m’agitais. Elle avait retrouvĂ© son petit sourire du dĂ©but. - Ce n’est pas vrai ?” Dans quel merdier m’étais-je embourbĂ© ? Non, enfin si, enfin non, enfin ce n’est pas le problĂšme
 Je veux dire ce n’est pas un problĂšme
 Je
 There is no problem, I am fine ! Je crois qu’ils se foutaient tous de ma gueule. Le gros Singh, ses acolytes et la demoiselle. Elle n’a pas cherchĂ© Ă  me rĂ©conforter - C’est vrai ou ce n’est pas vrai ? - Quelle garce. Était-ce vraiment le moment ? - Ce n’est pas vrai, ai-je menti. - Ah, bon ! Vous m’avez fait peur
 - Quelle garce, pensais-je encore. - Elle venait de me mettre K-O debout. - Et ensuite ? - Ensuite, le travail a repris. TrĂšs pro. Comme si de rien n’était. J’étais trempĂ©. J’avais l’impression d’avoir pris du 220 dans les pattes et je n’en menais pas large. Je ne la regardais plus. Je ne voulais plus la regarder. Je ne voulais plus qu’elle existe. Je ne pouvais plus me tourner vers elle. Je voulais qu’elle disparaisse dans un trou de souris et disparaĂźtre avec elle. Et plus je l’ignorais, plus je tombais amoureux d’elle. C’était exactement comme je te disais tout Ă  l’heure, comme une maladie. Tu sais comment ça se passe
 Tu Ă©ternues. Une fois. Deux fois. Tu frissonnes et voilĂ . C’est trop tard. Le mal est fait. LĂ , c’était la mĂȘme chose j’étais pris, j’étais fichu. Il n’y avait plus rien Ă  espĂ©rer et quand elle me rĂ©pĂ©tait les paroles du vieux Singh, je plongeais dans mes dossiers la tĂȘte en avant. Elle devait bien s’amuser. Ce calvaire a durĂ© presque trois heures
 Qu’est-ce que tu as ? Tu as froid ? - Un peu, mais ça va, ça va
 Continuez. Que s’est-il passĂ© aprĂšs ? Il s’était penchĂ© pour m’aider Ă  remonter la couverture. - AprĂšs, rien. AprĂšs
 Je viens de te le dire, je venais de vivre le meilleur
 AprĂšs je
 C’était
 AprĂšs c’est devenu plus triste. - Mais pas tout de suite ? - Non. Pas tout de suite. Il y a eu un peu de rab
 Mais tous les moments que nous avons partagĂ©s aprĂšs cette sĂ©ance de travail, c’était comme si je les avais volĂ©s
 - VolĂ©s Ă  qui ? - À qui ? À quoi ? Si seulement je le savais
 AprĂšs, j’ai rangĂ© mes feuilles et rebouchĂ© mon stylo. Je me suis levĂ©, j’ai serrĂ© la main de mes bourreaux et j’ai quittĂ© cette piĂšce. Et dans l’ascenseur, quand les portes se sont fermĂ©es, j’ai eu vraiment l’impression de tomber dans un trou. J’étais Ă©puisĂ©, vidĂ©, Ă  bout de forces et au bord des larmes. Les nerfs, je pense
 Je me sentais si misĂ©rable, si seul
 Si seul surtout. Je suis retournĂ© dans ma chambre d’hĂŽtel, j’ai commandĂ© un whisky et me suis fait couler un bain. Je ne savais mĂȘme pas son nom. Je ne savais rien d’elle. J’énumĂ©rais les choses que je savais elle parlait remarquablement bien l’anglais. Elle Ă©tait intelligente
 TrĂšs intelligente
 Trop intelligente ? Ses connaissances techniques, scientifiques et sidĂ©rurgiques me laissaient pantois. Elle Ă©tait brune. Elle Ă©tait trĂšs jolie. Elle devait mesurer
 Allez quoi
 1,66 mĂštre peut-ĂȘtre
 Elle s’était moquĂ©e de moi. Elle ne portait pas d’alliance et laissait deviner le plus mignon de tous les ventres. Elle
 Quoi d’autre encore ? Je perdais espoir Ă  mesure que mon bain refroidissait. Le soir, je suis allĂ© dĂźner avec des types de la Cornex. Je n’ai rien mangĂ©. J’acquiesçais. Je rĂ©pondais oui ou non sans savoir. Elle me hantait. - Elle me hantait, tu comprends ? Il s’était agenouillĂ© devant la cheminĂ©e et activait lentement le soufflet. - Quand je suis revenu Ă  l’hĂŽtel, la rĂ©ceptionniste m’a tendu un message avec ma clĂ©. Une petite Ă©criture me demandait encore - Ce n’était pas vrai ?” Elle Ă©tait assise au bar et me regardait en souriant. Je me suis approchĂ© en me frappant doucement la poitrine. Je tapotais mon pauvre cƓur dĂ©traquĂ© pour qu’il se remette Ă  battre. J’étais si heureux. Je ne l’avais pas perdue. Pas encore. Si heureux et surpris aussi parce qu’elle avait changĂ© de tenue. Elle portait maintenant un vieux blue-jean et un tee-shirt informe. - Vous vous ĂȘtes changĂ©e ? - Euh
 Oui. - Mais pourquoi ? - Quand vous m’avez vue tout Ă  l’heure, j’étais dĂ©guisĂ©e. Je m’habille comme ça quand je travaille avec les Chinois de la vieille Ă©cole. J’ai remarquĂ© que ça leur plaisait, ce cĂŽtĂ© old-fashioned, que ça les rassurait
 Je ne sais pas
 Ils se sentent plus en confiance
 Je me dĂ©guise en vieille fille et je deviens inoffensive. - Mais vous n’aviez pas l’air d’une vieille fille, je vous assure ! Vous
 Vous Ă©tiez trĂšs bien
 Vous
 Je
 Enfin, je trouve ça dommage
 - Que je me sois changĂ©e ? - Oui. - Vous aussi, vous me prĂ©fĂ©riez plus inoffensive ? Elle souriait. Je fondais. - Je ne crois pas du tout que vous soyez moins dangereuse dans votre petite jupe verte. Je ne le crois pas du tout, du tout, du tout. Nous avons commandĂ© des biĂšres chinoises. Elle s’appelait Mathilde, elle avait trente ans et si elle m’avait Ă©patĂ©, elle n’avait aucun mĂ©rite son pĂšre et ses deux frĂšres travaillaient pour la compagnie Shell. Elle connaissait tout ce jargon par cƓur. Elle avait habitĂ© tous les pays pĂ©troliers du monde, frĂ©quentĂ© cinquante Ă©coles et appris des milliers de gros mots dans toutes les langues. Elle ne pouvait pas dire oĂč elle vivait exactement. Elle ne possĂ©dait rien. Que des souvenirs. Que des amis. Elle aimait son travail. Traduire des pensĂ©es et jongler avec les mots. En ce moment, elle Ă©tait Ă  Hongkong car il suffisait de tendre la main pour trouver du travail. Elle aimait cette ville oĂč les gratte-ciel poussent en une nuit et oĂč l’on peut dĂźner dans un bouge un peu louche en marchant cinquante mĂštres de plus. Elle aimait l’énergie de cette ville. Elle avait passĂ© quelques annĂ©es en France quand elle Ă©tait enfant et y revenait de temps en temps pour voir ses cousins. Un jour elle achĂšterait une maison lĂ -bas. N’importe quoi n’importe oĂč. Du moment qu’il y avait des vaches et une cheminĂ©e. En mĂȘme temps qu’elle disait cela, elle riait, elle avait peur des vaches ! Elle me volait des cigarettes et rĂ©pondait Ă  toutes mes questions en commençant par lever les yeux au ciel. Elle m’en posait certaines mais je les chassais, je voulais l’entendre, elle, je voulais entendre le son de sa voix, son petit accent, ses expressions incertaines ou dĂ©modĂ©es. Je n’en perdais pas une miette. Je voulais m’imprĂ©gner d’elle, de son visage. DĂ©jĂ  j’adorais son cou, ses mains, la forme de ses ongles, son front un peu bombĂ©, son petit nez adorable, ses grains de beautĂ©, ses cernes, ses yeux graves
 J’étais complĂštement gaga. Tu souris encore ? - Je ne vous reconnais pas
 - Tu as toujours froid ? - Non, ça va. - Elle me fascinait
 J’aurais voulu que le monde s’arrĂȘte de tourner. Que cette nuit ne finisse jamais. Je ne voulais plus la quitter. Plus jamais. Je voulais rester avachi dans ce fauteuil et l’écouter me raconter sa vie jusqu’à la fin des temps. Je voulais l’impossible. Sans le savoir, j’inaugurais lĂ  la teneur de notre histoire
 des heures suspendues, irrĂ©elles, impossibles Ă  retenir, Ă  endiguer. Impossibles Ă  savourer aussi. Et puis elle s’est levĂ©e. Elle travaillait tĂŽt le lendemain. Toujours pour Singh and Co. Elle l’aimait bien ce vieux renard, mais il fallait qu’elle dorme parce qu’il Ă©tait terrible ! Je me suis levĂ© en mĂȘme temps qu’elle. Mon cƓur me lĂąchait de nouveau. J’avais peur de la perdre. J’ai baragouinĂ© quelque chose pendant qu’elle enfilait sa veste. - Pardon ? - Jeeurouerdre. - Qu’est-ce que vous dites ? - Je dis que j’ai peur de vous perdre. Elle a souri. Elle ne disait rien. Elle souriait et pivotait lĂ©gĂšrement d’avant en arriĂšre en se retenant au col de sa veste. Je l’ai embrassĂ©e. Sa bouche Ă©tait fermĂ©e. J’ai embrassĂ© son sourire. Elle a secouĂ© la tĂȘte et m’a repoussĂ© gentiment. J’aurais pu tomber Ă  la renverse. - C’est tout ? - Oui. - Vous ne voulez pas me raconter la suite, c’est ça ? C’est carrĂ© blanc ? - Pas du tout ! Pas du tout, ma pauvre
 Elle est repartie et je me suis rassis. J’ai passĂ© le reste de la nuit Ă  rĂȘvasser en lissant son petit mot sur ma cuisse. Rien de trĂšs sulfureux, tu vois
 - Oh ! Quand mĂȘme
 C’était votre cuisse
 - Que tu es bĂȘte, ma fille. Je ricanai. - Mais pourquoi Ă©tait-elle revenue, alors ? - C’est exactement la question que je me suis posĂ©e cette nuit-lĂ  et le lendemain et le jour d’aprĂšs et tous les autres jours jusqu’à ce que je la revoie
 - Vous l’avez revue quand ? - Deux mois plus tard. Elle a dĂ©barquĂ© en plein mois d’aoĂ»t, un soir, dans mon bureau. Je n’attendais personne. J’étais revenu de vacances un peu plus tĂŽt pour travailler au calme. La porte s’est ouverte et c’était elle. Elle Ă©tait passĂ©e comme ça. Au hasard. Elle revenait de Normandie et attendait le coup de tĂ©lĂ©phone d’une amie pour repartir. Elle m’avait cherchĂ© dans l’annuaire et voilĂ . Elle me rapportait le stylo que j’avais laissĂ© Ă  l’autre bout du monde. Elle avait dĂ©jĂ  oubliĂ© de me le rendre au bar, mais cette fois, elle y pensait tout de suite et farfouillait dĂ©jĂ  dans son sac. Elle n’avait pas changĂ©. Je veux dire, je ne l’avais pas idĂ©alisĂ©e, je lui ai demandĂ© - Mais
 Vous ne venez que pour ça ? Pour le stylo ? - Oui, bien sĂ»r. C’est un beau stylo. J’ai pensĂ© que vous y teniez. Elle me l’a tendu en souriant. C’était un Bic. Un Bic rouge. Je ne savais plus quoi faire. Je
 Elle m’a pris dans ses bras et je me suis laissĂ© surprendre. Le monde m’appartenait. Nous avons traversĂ© Paris en nous donnant la main. Depuis le TrocadĂ©ro jusqu’à l’üle de la CitĂ© en longeant la Seine. C’était une soirĂ©e magnifique. Il faisait chaud. La lumiĂšre Ă©tait douce. Le soleil n’en finissait pas de se coucher. Nous Ă©tions comme deux touristes, insouciants, Ă©merveillĂ©s, la veste sur l’épaule et les doigts emmĂȘlĂ©s. Je faisais le guide. Je n’avais pas marchĂ© comme ça depuis des annĂ©es. Je redĂ©couvrais ma ville. Nous avons dĂźnĂ© place Dauphine et passĂ© les jours suivants dans sa chambre d’hĂŽtel. Je me souviens du premier soir. De son goĂ»t salĂ©. Elle avait dĂ» se baigner juste avant de prendre le train. Je m’étais relevĂ© dans la nuit parce que j’avais soif. Je
 C’était merveilleux. C’était merveilleux et complĂštement truquĂ©. Tout Ă©tait faux. Ce n’était pas la vie. Ce n’était pas Paris. C’était le mois d’aoĂ»t. Je n’étais pas un touriste. Je n’étais pas cĂ©libataire. Je mentais. Je me mentais. À moi, Ă  elle, Ă  ma famille. Elle n’était pas dupe et quand est venue l’heure de la gueule de bois, des coups de fil Ă  passer et des mensonges Ă  assumer, elle est repartie. Devant la porte d’embarquement, elle m’a dĂ©clarĂ© - Je vais essayer de vivre sans vous. J’espĂšre que j’y arriverai
 Je n’ai pas eu le courage de l’embrasser. Le soir, je suis allĂ© dĂźner au Drugstore. Je souffrais. Je souffrais comme s’il me manquait quelque chose, comme si l’on m’avait amputĂ© d’un bras ou d’une jambe. C’était incroyable comme sensation. Je ne comprenais pas ce qui m’arrivait. Je me souviens que j’avais dessinĂ© deux silhouettes sur la nappe en papier. La silhouette de gauche, c’était elle de face et celle de droite, elle de dos. Je cherchais Ă  me souvenir de l’emplacement exact de ses grains de beautĂ© et quand le garçon s’est approchĂ© et qu’il a vu tous ces petits points, il m’a demandĂ© si j’étais acuponcteur. Je ne comprenais pas ce qui m’arrivait, mais quand mĂȘme, je pressentais que c’était grave ! Pendant quelques jours, j’avais Ă©tĂ© moi-mĂȘme. Ni plus, ni moins que moi-mĂȘme. Quand j’étais avec elle, j’avais l’impression d’ĂȘtre un type bien
 C’était aussi simple que ça. Je ne savais pas que je pouvais ĂȘtre un type bien. J’aimais cette femme. J’aimais cette Mathilde. J’aimais le son de sa voix, son esprit, son rire, son regard sur le monde, cette espĂšce de fatalisme des gens qui se sont beaucoup promenĂ©s. J’aimais son rire, sa curiositĂ©, sa discrĂ©tion, sa colonne vertĂ©brale, ses hanches un peu saillantes, ses silences, sa douceur et
 tout le reste. Tout
 Tout. Je priais pour qu’elle ne puisse plus vivre sans moi. Je ne pensais pas aux consĂ©quences de notre histoire. Je venais juste de dĂ©couvrir que la vie Ă©tait beaucoup plus gaie quand on Ă©tait heureux. Il m’avait fallu quarante-deux ans pour le dĂ©couvrir et j’étais si Ă©merveillĂ© que je m’interdisais de tout gĂącher en scrutant l’horizon. J’étais le Ravi de la crĂšche
 Il nous resservait Ă  boire. - C’est aussi Ă  partir de ce moment-lĂ  que je suis devenu un workaholic, comme disent les AmĂ©ricains. Je passais le plus clair de mon temps dans mon bureau. J’arrivais avant les autres et repartais bon dernier. Je travaillais le samedi et piaffais tout le dimanche. Je prĂ©textais n’importe quoi. J’avais finalement dĂ©crochĂ© le contrat avec TaĂŻwan et pouvais manƓuvrer plus librement encore. J’en profitais pour Ă©chafauder d’autres projets. Plus ou moins raisonnables. Et tout ça, tous ces jours et toutes ces heures insensĂ©s pour une seule raison parce que j’espĂ©rais son coup de tĂ©lĂ©phone. Une femme Ă©tait quelque part sur cette planĂšte, peut-ĂȘtre Ă  deux pas, peut-ĂȘtre Ă  dix mille kilomĂštres et la seule chose qui comptait, c’était qu’elle puisse me joindre. J’étais confiant. J’étais plein d’énergie. Je crois que j’étais assez heureux Ă  cette Ă©poque de ma vie parce que mĂȘme si je n’étais pas avec elle, je savais qu’elle existait. C’était dĂ©jĂ  inespĂ©rĂ©. J’ai eu de ses nouvelles quelques jours avant NoĂ«l. Elle allait venir en France et me demandait si j’étais libre Ă  dĂ©jeuner la semaine suivante. Nous nous sommes donnĂ© rendez-vous dans le mĂȘme petit bar Ă  vins, mais voilĂ , ce n’était plus l’étĂ© et quand elle a voulu prendre ma main, je l’ai retirĂ©e prestement. “Vous ĂȘtes connu ici ?”, m’a-t-elle demandĂ© en piquant du nez. Je l’avais blessĂ©e. J’étais malheureux. Je la lui ai rendue, mais elle n’en a rien fait. Le temps se couvrait alors que nous ne nous Ă©tions pas encore retrouvĂ©s. Je l’ai rejointe le soir mĂȘme dans une autre chambre d’hĂŽtel et quand, enfin, j’ai pu glisser mes doigts dans ses cheveux, j’ai recommencĂ© Ă  vivre. Je
 J’aimais faire l’amour avec elle. Le lendemain aprĂšs-midi, nous nous sommes revus au mĂȘme endroit et le jour d’aprĂšs encore
 C’était l’avant-veille de NoĂ«l, nous allions nous sĂ©parer, je voulais lui demander quels Ă©taient ses projets mais je n’osais pas ouvrir la bouche. La peur Ă©tait lĂ . Ce truc dans mon ventre qui m’empĂȘchait de lui sourire. Elle Ă©tait assise sur le lit. Je suis venu contre elle et j’ai posĂ© ma tĂȘte sur ses cuisses. - Qu’allons-nous devenir ? A-t-elle demandĂ©. Je me taisais. - Vous savez, quand vous ĂȘtes parti hier en me laissant dans cette chambre en plein milieu de l’aprĂšs-midi, je me suis dit que je ne revivrais plus jamais ça. Plus jamais, vous m’entendez ? Plus jamais
 Je me suis rhabillĂ©e, je suis sortie. Je ne savais pas oĂč aller. Je ne veux plus revivre ça, je ne veux plus m’allonger avec vous dans une chambre et vous voir partir aprĂšs. C’est trop dur. Elle articulait difficilement. Je m’étais promis de ne jamais revivre avec un homme qui me ferait souffrir. Je crois que je ne le mĂ©rite pas, vous comprenez ? Je ne le mĂ©rite pas. Alors, c’est la raison pour laquelle je vous le demande qu’allons-nous devenir ?” Je restais muet. Vous ne dites rien ? Je m’en doutais. Qu’est-ce que vous pouvez dire de toute façon ? Qu’est-ce que vous pouvez faire ? Vous avez votre femme et vos enfants. Et moi, qu’est-ce que je suis ? Je ne suis presque rien dans votre vie. Je vis si loin
 Si loin et si Ă©trangement
 Je ne sais rien faire comme les autres. Je n’ai pas de maison, pas de meubles, pas de chat, pas de livre de cuisine et pas de projets. Je croyais que c’était moi la plus maligne, que j’avais compris la vie mieux que les autres, et je me congratulais parce que je n’étais pas tombĂ©e dans le piĂšge. Et puis vous voilĂ , et je me sens complĂštement perdue. Maintenant, j’aimerais bien m’arrĂȘter de courir un peu parce que je trouve que la vie est belle avec vous. Je vous l’avais dit que j’essaierais de vivre sans vous
 J’essaie, j’essaie, mais je ne suis pas trĂšs vaillante, je pense Ă  vous tout le temps. Alors je vous le demande maintenant et pour la derniĂšre fois peut-ĂȘtre, qu’avez-vous l’intention de faire de moi ? - Vous aimer. - Mais encore ? - Je vous promets que je ne vous abandonnerai plus jamais dans une chambre d’hĂŽtel. Je vous le promets. Et je me suis retournĂ© pour enfoncer mon visage entre ses jambes. Elle m’a soulevĂ© par les cheveux. - Mais quoi encore ? - Je vous aime. Je ne suis heureux qu’avec vous. Je n’aime que vous. Je
 Je
 Faites-moi confiance
 Elle a relĂąchĂ© ma tĂȘte et notre conversation s’est Ă©touffĂ©e lĂ . Je l’ai prise tendrement mais elle ne s’abandonnait pas, elle se laissait faire. C’était toute la diffĂ©rence. - Que s’est-il passĂ© ensuite ? - Ensuite nous nous sommes quittĂ©s pour la premiĂšre fois
 Je dis premiĂšre fois » parce que nous nous sommes tellement quittĂ©s
 Et puis je l’ai rappelĂ©e
 Je l’ai suppliĂ©e
 J’ai trouvĂ© un prĂ©texte pour retourner en Chine. J’ai vu sa chambre, sa logeuse
 J’y suis restĂ© une semaine et pendant qu’elle travaillait, j’ai jouĂ© au plombier, Ă  l’électricien, au maçon. Je m’échinais pour cette mademoiselle Li qui passait son temps Ă  chanter en caressant ses oiseaux. Elle m’a fait visiter le port de Hongkong et m’a emmenĂ© chez une vieille dame anglaise qui croyait que j’étais Lord Mountbatten ! J’ai jouĂ© le jeu, tu penses
 ! - Est-ce que tu rĂ©alises ce que tout cela reprĂ©sentait pour moi ? Pour le petit garçon qui n’avait pas osĂ© monter au sixiĂšme ? Toute ma vie tenait entre deux arrondissements de Paris et une petite maison Ă  la campagne. Je n’avais jamais vu mes parents heureux, mon unique frĂšre Ă©tait mort en s’étouffant et j’avais Ă©pousĂ© mon premier flirt, la sƓur d’un de mes amis, parce que je n’avais pas su me retirer Ă  temps
 Oui, c’était ça ma vie. C’était ça
 Est-ce que tu rĂ©alises ? J’avais l’impression de naĂźtre une seconde fois. J’avais l’impression que tout recommençait aujourd’hui, dans ses bras, sur ces eaux douteuses, dans le cagibi humide de mademoiselle Li
 Il s’était tu. - C’était Christine ? - Non, c’était avant Christine
 C’était une fausse couche. - Je ne savais pas. - Personne ne sait. Pourquoi savoir ? Je me suis mariĂ© Ă  une jeune fille que j’aimais, mais comme on aime une jeune fille. Un amour romantique et pur. Les premiers Ă©mois
 Ce fut une fĂȘte assez triste. J’avais l’impression de faire ma premiĂšre communion pour la seconde fois. Suzanne non plus, n’avait pas dĂ» imaginer un tel raccourci
 Elle perdait d’un coup sa jeunesse et ses illusions. Nous perdions tout cela pendant que mon beaupĂšre gagnait un gendre parfait. Je sortais de l’École des mines et il ne pouvait rĂȘver meilleur parti puisque ses fils Ă©taient des
 littĂ©raires. Il prononçait ce mot du bout des lĂšvres. Suzanne et moi n’étions pas follement amoureux, mais nous Ă©tions dociles. À l’époque, ceci compensait bien cela. Je te raconte tout ça, mais je doute fort que tu puisses y voir clair. Les choses ont tellement changé  C’était il y a quarante ans et cela semble deux siĂšcles. C’était Ă  une Ă©poque oĂč les jeunes filles se mariaient quand elles n’avaient plus leurs rĂšgles. Pour vous, c’est de la prĂ©histoire. Il se frottait le visage. - OĂč j’en Ă©tais dĂ©jĂ  ? Ah oui
 Je disais que je me retrouvais de l’autre cĂŽtĂ© de la Terre avec une femme qui gagnait sa vie en sautillant d’un continent Ă  l’autre et qui semblait m’aimer pour ce que j’étais, pour ce qu’il y avait lĂ -dedans, Ă  l’intĂ©rieur. Une femme qui m’aimait, j’ai presque envie de dire tendrement. Oui, tout cela Ă©tait trĂšs nouveau. TrĂšs exotique. Une femme merveilleuse qui me regardait manger de la soupe de cobra aux fleurs de chrysanthĂšme en retenant son souffle. - C’était bon ? - Un peu gĂ©latineux Ă  mon goĂ»t
 Il souriait. - Et quand j’ai repris l’avion, pour la premiĂšre fois de ma vie je n’ai pas eu peur. Je me disais il peut exploser, il peut tomber comme une pierre et s’écraser, ce n’est pas grave. - Pourquoi vous vous disiez ça ? - Pourquoi ? - Ben oui
 Moi je me serais dit le contraire
 Je me serais dit Maintenant je sais vraiment pourquoi j’ai peur et ce putain d’avion n’a pas intĂ©rĂȘt Ă  tomber ! » - Oui, tu as raison. C’eĂ»t Ă©tĂ© plus malin
 Mais voilĂ , et nous touchons lĂ  le nƓud du problĂšme, je ne me disais pas ça. Je devais presque mĂȘme espĂ©rer qu’il tombe
 Ma vie s’en serait trouvĂ©e tellement simplifiĂ©e
 - Vous veniez de rencontrer la femme de votre vie et vous envisagiez de mourir ? - Je ne t’ai pas dit que je voulais mourir ! - Non, je n’ai pas dit ça non plus. J’ai dit que vous envisagiez » de mourir
 - Je crois que j’envisage de mourir tous les jours, pas toi ? - Non. - Tu penses que ta vie vaut quelque chose ? - Euh
 Oui
 Un peu quand mĂȘme
 Et puis il y a les petites
 - C’est une bonne raison. Il s’était renfoncĂ© dans le fauteuil et son visage avait de nouveau disparu. - Oui. Je suis d’accord avec toi, c’était absurde. Mais je venais d’ĂȘtre si heureux. Si heureux
 J’étais intriguĂ© et un peu Ă©pouvantĂ© aussi. Était-ce normal d’ĂȘtre si heureux ? Était-ce juste ? Quel prix allais-je devoir payer pour tout ça ? Parce que
 Est-ce que c’est dĂ» au poids de mon Ă©ducation ou Ă  l’instruction des bons pĂšres ? Était-ce dans mon caractĂšre ? Je ne saurais pas bien faire la part des choses mais ce qui est sĂ»r, c’est que je me suis toujours comparĂ© Ă  un animal de labour. Le mors, la bride, les ƓillĂšres, les brancards, le soc, le joug, la charrette, le sillon
 Tout ce folklore
 Depuis que je suis gamin, je marche dans la rue en baissant la tĂȘte et en regardant fixement le sol comme si c’était une croĂ»te Ă  fendre, une Ă©corce trop sĂšche. Le mariage, la famille, le travail, les mĂ©andres de la vie sociale, tout. J’ai tout traversĂ© tĂȘte baissĂ©e et mĂąchoires serrĂ©es. Tout apprĂ©hendĂ© avec dĂ©fiance. D’ailleurs je suis, enfin j’étais, bon au squash et ce n’est pas un hasard ; j’aimais me sentir enfermĂ© dans une piĂšce trop petite et cogner le plus fort possible dans une balle pour qu’elle me revienne dans le bras comme un boulet de canon. J’adorais ça. “ Toi, tu aimes le squash et moi, le Jokari, tout est là
”, avait rĂ©sumĂ© Mathilde un soir alors qu’elle massait mon Ă©paule endolorie. Elle s’était tue un moment et avait ajoutĂ© “Tu devrais rĂ©flĂ©chir Ă  ce que je viens de dire, ce n’est pas bĂȘte du tout. Les gens qui sont rigides Ă  l’intĂ©rieur rebondissent sur la vie en se faisant tout le temps mal, alors que les gens qui sont mous
 non, pas mous, mais souples plutĂŽt, oui, c’est ça, souples Ă  l’intĂ©rieur, eh bien, quand ils prennent des chocs, ils souffrent moins
 Je crois que tu devrais te mettre au Jokari, c’est beaucoup plus amusant. Tu tapes dans la balle, tu ne sais pas oĂč elle reviendra, mais tu sais qu’elle reviendra Ă  cause de la ficelle et ça, c’est un suspense dĂ©licieux. Moi tu vois, par exemple, eh bien j’ai souvent cette impression
 Que je suis ta balle de Jokari
” Je n’ai pas relevĂ© et elle a continuĂ© de me frotter en silence. - Vous n’avez jamais envisagĂ© de recommencer votre vie avec elle ? - Si, bien sĂ»r
 Mille fois. - Mille fois j’ai voulu et mille fois j’ai renoncé  J’avançais tout au bord du gouffre, je me penchais et je repartais en courant. Je me sentais responsable de Suzanne, des enfants. Responsable de quoi ? Encore une question troublante
 Je m’étais engagĂ©. J’avais signĂ©, j’avais promis, je devais assumer. Adrien avait seize ans et rien n’allait. Il changeait de lycĂ©e tout le temps, Ă©crivait No future dans l’ascenseur et n’avait qu’une idĂ©e en tĂȘte aller Ă  Londres et en revenir avec un rat sur l’épaule. Suzanne Ă©tait effondrĂ©e. Quelque chose lui rĂ©sistait. Qui lui avait changĂ© son petit garçon ? Pour la premiĂšre fois, je la voyais chanceler sur sa base et rester des soirĂ©es entiĂšres sans ouvrir la bouche. Je m’imaginais mal en train d’assombrir encore la situation. Et puis je me disais
 Je me disais que
 - Qu’est-ce que vous vous disiez ? - Attends, c’est tellement grotesque
 Il faudrait que je retrouve les mots de l’époque
 Je devais me dire quelque chose comme Je suis un modĂšle pour mes enfants. Les voici Ă  l’aube de leur vie, bientĂŽt au pied du mur, Ă  l’ñge oĂč ils vont songer Ă  s’engager, quel exemple calamiteux pour eux si je quitte leur mĂšre maintenant
 » Tu notes les effets de manches, lĂ  ? Comment pourront-ils faire face ensuite ? Et quels dĂ©sordres suis-je en train de causer ? Quel irrĂ©parable outrage ? Je n’ai pas Ă©tĂ© un pĂšre parfait, loin s’en faut, mais je reste le modĂšle de rĂ©fĂ©rence le plus Ă©vident, le plus proche, donc
 hum hum
 je dois me tenir. » Il grinçait. - C’était beau, hein ? Avoue que c’était sublime, non ? Je me taisais. - Je pensais surtout Ă  Adrien
 À ĂȘtre un modĂšle d’engagement pour mon fils Adrien
 Tu as le droit de ricaner avec moi, tu sais. Ne t’en prive pas. On n’a pas si souvent l’occasion d’entendre une bonne histoire. Je secouais la tĂȘte. - Et pourtant
 Oh
 et puis Ă  quoi bon ? Tout ça est tellement loin
 Tellement loin
 - Pourtant quoi ? - Eh bien
 À un moment quand mĂȘme, je suis venu tout prĂšs du gouffre
 Vraiment trĂšs prĂšs
 J’avais entrepris des dĂ©marches pour trouver un studio, je songeais Ă  emmener Christine en week-end, je rĂ©flĂ©chissais aux mots et rĂ©pĂ©tais certaines scĂšnes dans ma voiture. J’avais mĂȘme pris rendez-vous avec mon comptable et puis un matin, vois comme la vie est taquine, Françoise est arrivĂ©e en larmes dans mon bureau
 - Françoise ? Votre secrĂ©taire ? - Oui. - Son mari venait de la quitter
 Je ne la reconnaissais plus. Elle, si pĂ©tulante, si impĂ©rieuse, cette petite femme maĂźtresse d’elle-mĂȘme comme de l’univers, je la voyais dĂ©pĂ©rir de jour en jour. Pleurer, maigrir, se cogner dans tout et souffrir. Souffrir tellement. Prendre des mĂ©dicaments, maigrir encore, m’apporter le premier arrĂȘt de travail de sa vie. Pleurer. Pleurer devant moi, mĂȘme. Et lĂ , quel homme admirable j’étais quand j’y repense, j’ai pris mon courage Ă  deux mains et je suis allĂ© hurler avec les loups. Quel salaud, approuvais-je, quel salaud. Comment peut-on faire ça Ă  sa femme ? Comment peut-on ĂȘtre si Ă©goĂŻste ? Fermer la porte et se frotter les mains. Sortir de sa vie comme on sort faire un tour. Mais, mais, mais, c’est trop facile ! Trop facile ! Non mais vraiment, quel salaud. Quel salaud ce type ! Moi, monsieur, je ne suis pas comme vous ! Je ne quitte pas ma femme, moi, monsieur. Je ne quitte pas ma femme et je vous mĂ©prise
 Oui, je vous mĂ©prise du plus profond de mon Ăąme, cher monsieur ! VoilĂ  ce que je pensais. Trop heureux de m’en tirer Ă  si bon compte. Trop heureux de me conforter et de me lustrer le poil. Oh oui, je l’ai soutenue ma Françoise, je l’ai chouchoutĂ©e. Oh oui, j’ai acquiescĂ© souvent, oh non, lui rĂ©pĂ©tais-je encore, vous n’avez pas eu de chance. Pas eu de chance
 En fait, je devais le bĂ©nir en secret, ce monsieur Jarmet que je ne connaissais ni d’Ève ni d’Adam. Je devais le bĂ©nir en secret. Il m’apportait la solution sur un plateau d’argent. GrĂące Ă  lui, grĂące Ă  son infamie, je pouvais retourner Ă  mon petit confort la tĂȘte haute. Travail, Famille, Patrie, j’étais lĂ . TĂȘte haute et droit dans mes bottes ! J’en tirais quelque vanitĂ©, tu t’en doutes bien, tu me connais
 J’en Ă©tais arrivĂ© Ă  cette agrĂ©able conclusion que
 Je n’étais pas comme les autres. J’étais un peu au-dessus. Juste Ă  peine, mais au-dessus. Je ne quittais pas ma femme, moi
 - C’est lĂ  que vous avez rompu avec Mathilde ? - Et pourquoi donc ? Non, pas du tout. J’ai continuĂ© Ă  la voir, seulement j’ai rangĂ© mes plans d’évasion et cessĂ© de perdre mon temps Ă  visiter des studios minables. Parce que tu comprends, et comme je viens de te le dĂ©montrer brillamment, je n’étais pas de cette trempe-lĂ , je ne foutais pas le pied dans la fourmiliĂšre. C’était bon pour les irresponsables, ça. Pour les maris Ă  dactylos. Il Ă©tait sarcastique et tremblant de rage. - Non, je n’ai pas rompu, j’ai continuĂ© Ă  la sauter tendrement en lui promettant des toujours et des plus tard. - C’est vrai ? - Oui. - Vous parliez comme dans ces histoires sordides ? - Oui. - Vous lui demandiez d’ĂȘtre patiente et lui promettiez des tas de choses ? - Oui. - Comment elle faisait pour supporter tout ça ? - Je ne sais pas. Vraiment, je ne sais pas
 - Peut-ĂȘtre qu’elle vous aimait ? - Peut-ĂȘtre. Il a fini son verre cul sec. - Peut-ĂȘtre bien oui
 Peut-ĂȘtre bien
 - Et vous n’ĂȘtes pas parti Ă  cause de Françoise ? - Exactement. À cause de Jean-Paul Jarmet pour ĂȘtre prĂ©cis. Enfin, je te dis ça, mais si ça n’avait pas Ă©tĂ© lui, j’aurais bien trouvĂ© un autre prĂ©texte, va. Les gens de mauvaise foi sont trĂšs forts pour trouver des prĂ©textes. TrĂšs forts. - C’est incroyable
 - Quoi ? - Cette histoire
 De voir Ă  quoi ça tient
 C’est incroyable
 - Non, ce n’est pas incroyable, ma Chloé  Non, ce n’est pas incroyable. C’est la vie. C’est la vie de presque tout le monde. On biaise, on s’arrange, on a notre petite lĂąchetĂ© dans les pattes comme un animal familier. On la caresse, on la dresse, on s’y attache. C’est la vie. Il y a les courageux et puis ceux qui s’accommodent. C’est tellement moins fatigant de s’accommoder
 Tiens, passe-moi la bouteille. - Vous allez vous soĂ»ler ? - Non. Je ne sais pas me soĂ»ler. Je n’y suis jamais arrivĂ©. Plus je bois, plus je suis lucide
 - Quelle horreur ! - Quelle horreur, comme tu dis
 Je te sers ? - Non merci. - Tu veux une tisane maintenant ? - Non, non. Je suis
 Je ne sais pas ce que je suis
 StupĂ©faite, peut-ĂȘtre
 - StupĂ©faite de quoi ? - De vous, tiens ! Je ne vous avais jamais entendu prononcer plus de deux phrases Ă  la suite, jamais un mot plus haut que l’autre, jamais d’états d’ñme. Depuis le temps que je vous vois dans votre habit de Grand Inquisiteur
 Je ne vous ai jamais surpris en flagrant dĂ©lit de faiblesse ou de sensiblerie et puis lĂ , tout Ă  coup, vous me balancez tout ça sans crier gare
 - Je t’ai choquĂ©e ? - Non, non, pas du tout ! Pas du tout ! Au contraire ! Au contraire
 Mais
 Mais comment vous avez pu jouer ce rĂŽle-lĂ  tout le temps ? - Quel rĂŽle ? - Ben, celui-là
 Ce rĂŽle de vieux con. - Mais je suis un vieux con, ChloĂ© ! Je suis un vieux con. C’est ce que je suis en train de t’expliquer depuis tout Ă  l’heure enfin ! - Mais non ! Si vous vous en rendez compte c’est que vous n’en ĂȘtes pas un, justement ! Les vrais, ils ne se rendent compte de rien ! - Tttt, ne crois pas ça
 C’est encore une de mes ruses pour m’en tirer honorablement. Je suis trĂšs fort
 Il me souriait. - C’est incroyable
 Incroyable
 - Quoi ? - Mais tout ça
 Tout ce que vous m’avez raconté  - Non, ce n’est pas incroyable. C’est trĂšs banal au contraire. TrĂšs trĂšs banal
 Je parle aujourd’hui parce que c’est toi, parce que c’est ici, dans cette piĂšce, dans cette maison, parce qu’il fait nuit et parce que Adrien te fait souffrir. Parce que son choix me dĂ©sespĂšre et me rassure aussi. Parce que je n’aime pas te voir malheureuse, j’ai trop fait souffrir moi-mĂȘme
 Et parce que je prĂ©fĂšre te voir souffrir beaucoup aujourd’hui plutĂŽt qu’un peu toute ta vie. J’en vois des gens souffrir un peu, rien qu’un peu, rien qu’à peine mais juste ce qu’il faut pour tout rater, tu sais
 Oui, Ă  mon Ăąge, je vois ça beaucoup
 Des gens qui sont encore ensemble parce qu’ils se sont arc-boutĂ©s lĂ -dessus, sur cette petite chose ingrate, leur petite vie sans Ă©clat. Tous ces arrangements, toutes ces contradictions
 Et tout ça pour en finir là
 Bravo, bravo, bravo ! On a tout enterrĂ©, nos amis, nos rĂȘves et nos amours, et maintenant, ça va ĂȘtre notre tour ! Bravo, les amis ! Il applaudissait. - RetraitĂ©s
 RetraitĂ©s de tout. Je les hais. Je les hais, tu m’entends ? Je les hais parce qu’ils me renvoient ma propre image. Ils sont lĂ , vautrĂ©s dans leur bonne satisfaction. Le navire a tenu bon, le navire a tenu bon ! semblent-ils nous dire sans jamais s’épauler. Mais Ă  quel prix bon Dieu ? À quel prix ? ! Il y a des regrets, des remords, des fĂȘlures et des compromissions qui ne cicatrisent pas, qui ne cicatriseront jamais. Jamais, tu m’entends ! MĂȘme aux HespĂ©rides. MĂȘme avec les arriĂšre-petitsenfants assis tout autour pour la photo. MĂȘme en rĂ©pondant exactement en mĂȘme temps Ă  une question de Julien Lepers. Je ne sais pas s’il n’était jamais ivre, mais enfin
 Il a cessĂ© de parler et de gesticuler et nous sommes restĂ©s comme ça un long moment. En silence. À compter les escarmouches du feu. - Je n’ai pas fini mon histoire avec Françoise
 Il s’était calmĂ© et je devais tendre l’oreille Ă  prĂ©sent pour l’entendre. - Il y a quelques annĂ©es, en 94 je crois, elle est tombĂ©e gravement malade
 Gravement
 Une saloperie de cancer lui mangeait tout le ventre. On a commencĂ© par lui enlever un ovaire, puis deux, puis l’utĂ©rus
 enfin, je n’en sais pas beaucoup plus parce que je n’ai jamais Ă©tĂ© son confident tu imagines, mais il s’est avĂ©rĂ© que c’était beaucoup plus grave que prĂ©vu. Françoise comptabilisait ses semaines Ă  vivre. Elle espĂ©rait NoĂ«l. PĂąques, c’était trop demander. Un jour, je lui ai tĂ©lĂ©phonĂ© Ă  l’hĂŽpital en lui proposant de la licencier avec des indemnitĂ©s royales pour qu’elle puisse faire le tour du monde dĂšs sa sortie. Qu’elle se rende chez les plus grands couturiers pour choisir les plus jolies robes et qu’elle aille se pavaner sur le pont d’un grand paquebot en sirotant des Pimm’s. Françoise adore le Pimm’s
 “ Gardez donc vos sous, j’en boirai avec les autres le jour oĂč vous prendrez votre retraite ! ” Nous avons plaisantĂ©. Nous Ă©tions de bons comĂ©diens, la gorge sĂšche mais la repartie heureuse. Les derniers pronostics Ă©taient catastrophiques. Je l’avais su par sa fille. NoĂ«l devenait improbable. “ Ne croyez pas tout ce qu’on raconte, ce n’est pas encore cette fois que vous pourrez me remplacer par une petite jeune
”, m’avait-elle prĂ©venu dans un souffle avant de raccrocher. J’ai fait semblant de bougonner et je me suis retrouvĂ© en larmes en plein aprĂšs-midi. Je venais de dĂ©couvrir Ă  quel point je l’aimais, elle aussi. À quel point j’avais besoin d’elle. Dix-sept ans que nous travaillions ensemble. Tout le temps. Tous les jours. Dix-sept ans qu’elle me supportait, qu’elle m’aidait
 Elle savait pour Mathilde et n’avait jamais rien dit. Ni Ă  moi, ni Ă  personne. Elle me souriait quand j’étais malheureux et haussait les Ă©paules quand j’étais dĂ©sagrĂ©able. Elle avait Ă  peine vingt ans quand elle est arrivĂ©e. Elle ne savait rien faire. Elle sortait de l’école hĂŽteliĂšre et avait rendu son tablier parce qu’un cuisinier lui avait pincĂ© les fesses. Elle ne voulait pas qu’on lui pince les fesses. VoilĂ  ce qu’elle m’avait dit lors de notre premier entretien. Elle ne voulait pas qu’on lui pince les fesses et elle ne voulait pas retourner chez ses parents dans la Creuse. Elle y retournerait quand elle aurait une voiture bien Ă  elle pour ĂȘtre sĂ»re de pouvoir repartir ! Je l’avais embauchĂ©e Ă  cause de cette phrase. Elle aussi, c’était ma princesse
 Je l’appelais de temps en temps pour dire du mal de sa remplaçante. Et puis je suis allĂ© lui rendre visite longtemps aprĂšs, quand elle me l’a enfin permis. C’était le printemps. On l’avait changĂ©e d’hĂŽpital. Le traitement Ă©tait moins dur et ses progrĂšs avaient redonnĂ© courage aux mĂ©decins qui passaient la fĂ©liciter tous les jours pour sa hargne et sa bonne humeur. Elle m’avait dit au tĂ©lĂ©phone qu’elle recommençait Ă  donner son avis sur tout et Ă  tout le monde. Elle avait des idĂ©es pour la dĂ©coration et mettait en place une tournante de patchwork. Elle critiquait leurs dysfonctionnements, leur organisation aberrante. Elle avait demandĂ© Ă  rencontrer le chef du comitĂ© d’entreprise pour rĂ©gler avec lui quelques dĂ©tails Ă©vidents. Je la charriais. Elle se dĂ©fendait “ Mais je leur parle de bon sens ! Uniquement de bon sens, vous savez ! ” Elle avait repris du poil de la bĂȘte et je roulais vers la clinique le cƓur lĂ©ger. Pourtant, j’ai eu un choc en la revoyant. Ce n’était plus my fair lady, c’était un petit poulet jaune. Son cou, ses joues, ses mains, ses bras, tout avait disparu. Sa peau Ă©tait jaunĂątre et un peu Ă©paisse, ses yeux avaient doublĂ© de taille et ce qui me choquait le plus, c’était sa perruque. Elle avait dĂ» la mettre un peu vite et la raie n’était pas au milieu. J’essayais de lui donner des nouvelles du bureau, du bĂ©bĂ© de Caroline et des contrats en cours mais j’étais obsĂ©dĂ© par cette perruque, j’avais peur qu’elle glisse. À ce moment-lĂ , un homme a frappĂ©. “ Houps ”, a-t-il dit en me voyant avant de tourner les talons. Françoise l’a rappelĂ©. “ Pierre, je vous prĂ©sente Simon, mon ami. Je crois que vous ne vous ĂȘtes jamais rencontrĂ©s
 ” Je me suis levĂ©. Non, jamais. Je ne savais mĂȘme pas qu’il existait. Nous Ă©tions si pudiques, Françoise et moi
 Il m’a serrĂ© la main trĂšs fort et j’ai vu dans son regard toute la bontĂ© du monde. Deux petites billes grises, intelligentes, vives et douces. Pendant que je me rasseyais, il s’est approchĂ© de Françoise pour l’embrasser et lĂ , tu sais ce qu’il a fait ? - Non. - Il a pris ce petit visage de poupĂ©e cassĂ©e entre ses mains comme s’il avait voulu l’embrasser avec fougue et il en a profitĂ© pour recaler sa perruque. Elle a pestĂ© en lui demandant de faire un peu attention, que j’étais son patron quand mĂȘme, et il a ri avant de s’éclipser en prĂ©textant l’achat d’un journal. Et quand il a refermĂ© la porte, Françoise s’est tournĂ©e lentement vers moi. Ses yeux Ă©taient pleins de larmes. Elle a murmurĂ© “ Sans lui, j’y serais restĂ©e, vous savez
 Si je me bats, c’est parce que j’ai encore tellement de choses Ă  faire avec lui. Tellement de choses
 ” Son sourire Ă©tait effrayant. Sa mĂąchoire Ă©tait Ă©norme, presque indĂ©cente. J’avais l’impression que ses dents allaient se dĂ©chausser. Que la peau de ses joues allait craquer. J’avais le cƓur au bord des lĂšvres. Et puis l’odeur
 Cette odeur de mĂ©dicaments, de mort et de Guerlain mĂ©langĂ©s. C’était difficilement supportable et je me faisais violence pour ne pas poser ma main devant ma bouche. Je sentais que j’allais craquer. Ma vue se brouillait. Oh, presque rien tu sais, je faisais semblant de me frotter les yeux et de me pincer le nez comme si une poussiĂšre me gĂȘnait mais quand je l’ai regardĂ©e de nouveau en me forçant Ă  lui rendre son sourire, elle m’a demandĂ© “ Ça ne va pas ? ” Si, si, ai-je rĂ©pondu. Je sentais ma bouche s’affaisser en arc de cercle comme sur le visage des enfants tristes. “ Si, si, ça va
 C’est juste que
 Je ne vous trouve pas trĂšs bonne mine, Françoise
 ” Elle a fermĂ© les yeux et posĂ© sa tĂȘte sur l’oreiller. “ Ne vous en faites pas. Je vais m’en sortir
 Il a trop besoin de moi, celui-lĂ . ” Je suis reparti dĂ©composer. Je me tenais aux murs. J’ai mis un temps fou avant de me souvenir oĂč j’avais garĂ© ma voiture et je me suis perdu sur ce foutu parking. Mais qu’est-ce qui m’arrivait ? Qu’est-ce qui m’arrivait, bon Dieu ? Était-ce de la voir comme ça ? Était-ce cette odeur de charnier javellisĂ© ou Ă©tait-ce l’endroit tout simplement ? Toute cette chape de malheur. De souffrance. Et ma petite Françoise aux bras ravagĂ©s, mon ange perdu au milieu de tous ces zombies. Perdue dans son lit minuscule. Qu’est-ce qu’ils avaient fait Ă  ma princesse ? Pourquoi ils l’avaient malmenĂ©e comme ça ? Oui, j’ai mis un temps fou Ă  retrouver ma voiture et j’ai mis un temps fou Ă  la dĂ©marrer, et ensuite, il m’a fallu encore plusieurs minutes avant d’enclencher la premiĂšre, et tu sais pourquoi ? Tu sais pourquoi je chancelais ainsi ? Ce n’était pas Ă  cause d’elle, ni de ses cathĂ©ters ou de sa souffrance, bien sĂ»r que non. C’était
 Il avait relevĂ© la tĂȘte. - C’était le dĂ©sespoir. Oui, c’était le boomerang qui me revenait dans la figure
 Silence. J’ai fini par dire - Pierre ? - Oui ? - Vous allez penser que j’exagĂšre, mais j’aimerais bien une tisane finalement
 Il s’est levĂ© en pestant pour cacher sa gratitude. - Ah ! LĂ , lĂ , vous ne savez jamais ce que vous voulez, vous ĂȘtes pĂ©nible Ă  la fin
 Je l’ai suivi dans la cuisine et me suis assise de l’autre cĂŽtĂ© de la table pendant qu’il mettait une casserole d’eau Ă  chauffer. La lumiĂšre m’agressait. J’ai descendu la suspension le plus bas possible pendant qu’il ouvrait tous les placards. 12. - Je peux vous poser une question ? - Si tu me dis oĂč trouver ce que je cherche. - LĂ , devant vous, dans la boĂźte rouge. - Celle-ci ? On ne mettait pas ça lĂ  avant, il me semble qu’on
 pardon, je t’écoute. - Vous vous ĂȘtes vus pendant combien d’annĂ©es ? - Avec Mathilde ? - Oui. - Entre Hongkong et notre derniĂšre discussion, cinq ans et sept mois. - Et vous avez passĂ© beaucoup de temps ensemble ? - Non, je te l’ai dit dĂ©jĂ . Quelques heures, quelques jours
 - Et ça vous suffisait ? -
 - Ça vous suffisait ? - Non, bien sĂ»r. Enfin si, puisque je n’ai rien fait pour changer les choses. C’est ce que je me suis dit aprĂšs. Peut-ĂȘtre que c’était ça qui me convenait. Convenir »  que ce mot est laid. Peut-ĂȘtre que ça m’arrangeait d’avoir l’épouse rassurante d’un cĂŽtĂ© et le grand frisson de l’autre. Mon dĂźner en rentrant tous les soirs et la sensation de m’encanailler de temps en temps
 L’estomac rempli et la peau du ventre bien tendue. C’était pratique, c’était confortable
 - Vous l’appeliez quand vous aviez besoin d’elle ? - Oui, c’était Ă  peu prĂšs ça
 Il a posĂ© un bol devant moi. - En fait, non
 Ça ne se passait pas comme ça
 Un jour, au tout dĂ©but, elle m’a Ă©crit une lettre. La seule qu’elle m’ait jamais envoyĂ©e d’ailleurs. Elle disait J’ai rĂ©flĂ©chi, je ne me fais pas d’illusions, je t’aime mais je n’ai pas confiance en toi. Puisque ce que nous vivons n’est pas rĂ©el, alors c’est un jeu. Puisque c’est un jeu, il faut des rĂšgles. Je ne veux plus te voir Ă  Paris. Ni Ă  Paris ni dans aucun autre endroit qui te fasse peur. Quand je suis avec toi, je veux pouvoir te donner la main dans la rue et t’embrasser dans les restaurants sinon ça ne m’intĂ©resse pas. Je n’ai plus l’ñge de jouer Ă  chat. Donc nous nous verrons le plus loin possible, dans d’autres pays. Quand tu sauras oĂč tu vas, tu me l’écriras Ă  cette adresse, c’est chez ma sƓur de Londres, elle saura oĂč faire suivre le courrier. Ne te donne pas le mal d’écrire des mots gentils, prĂ©viens juste. Dis Ă  quel hĂŽtel tu descends et oĂč et quand. Si je peux te rejoindre, je viendrai, sinon tant pis. Ne cherche pas Ă  m’appeler, ni Ă  savoir oĂč je suis, ni comment je vis, je crois que ce n’est plus le problĂšme. J’ai rĂ©flĂ©chi, je pense que c’est la meilleure solution, faire comme toi, vivre de mon cĂŽtĂ© en t’aimant bien mais de loin. Je ne veux pas attendre tes coups de tĂ©lĂ©phone, je ne veux pas m’empĂȘcher de tomber amoureuse, je veux pouvoir coucher avec qui je veux et quand je veux et sans scrupule. Parce que c’est toi qui as raison, la vie sans scrupule, c’est
 it’s more convenient. Je ne voyais pas les choses comme ça, mais pourquoi pas ? Je veux bien essayer. Qu’est-ce que j’ai Ă  perdre, finalement ? Un homme lĂąche ? Et Ă  gagner ? Le plaisir de dormir dans tes bras quelquefois
 J’ai rĂ©flĂ©chi, je veux bien essayer. C’est Ă  prendre ou Ă  laisser
 - Qu’est-ce qu’il y a ? - Rien. Ça m’amuse de constater que vous aviez trouvĂ© un adversaire Ă  votre taille. - Eh non, malheureusement. Elle roulait des mĂ©caniques et prenait des poses de femme fatale alors que c’était une grande tendre. Je ne le savais pas encore en acceptant ses conditions, je ne l’ai compris que beaucoup plus tard
 Que cinq ans et sept mois plus tard
 Enfin si. Je te mens. Je le devinais entre les lignes, je devinais ce que ce genre de phrases devait lui coĂ»ter mais je n’allais pas m’appesantir parce que moi, ça m’allait trĂšs bien ces rĂšgles. TrĂšs, trĂšs bien mĂȘme. J’allais intensifier la branche import-export et m’habituer aux dĂ©collages, voilĂ  tout. Une lettre pareille, c’est inespĂ©rĂ© pour le gars qui veut tromper sa femme sans encombre. Bien sĂ»r, son histoire de coucheries et de tomber amoureuse me chiffonnait un peu, mais on n’en Ă©tait pas là
 Il s’est assis au bout de la table, Ă  sa place habituelle. - J’étais malin, hein ? Oui, j’étais un gros malin en ce temps-là
 Surtout que ça m’a fait gagner pas mal d’argent cette histoire
 J’avais toujours eu tendance Ă  nĂ©gliger un peu l’international
 - Pourquoi tant de cynisme ? - Toi-mĂȘme, tu as trĂšs bien rĂ©pondu Ă  cette question tout Ă  l’heure
 Je me baissai pour attraper la passoire. - En plus, c’était trĂšs romantique
 Je descendais de l’avion le cƓur battant, je me prĂ©sentais Ă  l’hĂŽtel en espĂ©rant que ma clĂ© n’y serait plus, je posais mes bagages dans des chambres inconnues en furetant partout pour savoir si elle Ă©tait dĂ©jĂ  passĂ©e, je repartais travailler, je rentrais le soir en suppliant le ciel pour qu’elle soit dans mon lit. Quelquefois elle y Ă©tait, quelquefois non. Elle me rejoignait au milieu de la nuit et nous nous perdions l’un dans l’autre sans avoir Ă©changĂ© une seule parole. Nous riions sous les draps, Ă©merveillĂ©s de nous retrouver lĂ . Enfin. Si loin. Si proches. Quelquefois, elle n’arrivait que le lendemain et je passais la nuit assis au bar, Ă  guetter les bruits du hall. Quelquefois, elle prenait une autre chambre et m’ordonnait de venir la rejoindre au petit matin. Quelquefois elle ne venait pas et je la haĂŻssais. Je revenais Ă  Paris de trĂšs mĂ©chante humeur. Au dĂ©but j’avais vraiment du travail et puis, de moins en moins
 J’inventais n’importe quoi pour pouvoir partir. Quelquefois je voyais du pays et quelquefois je ne voyais rien d’autre que ma chambre d’hĂŽtel. Il nous est mĂȘme arrivĂ© de rester dans l’enceinte de l’aĂ©roport
 C’était ridicule. Ça ne rimait Ă  rien. Quelquefois nous parlions sans arrĂȘt et d’autres fois nous n’avions rien Ă  nous dire. FidĂšle Ă  sa promesse, Mathilde ne parlait presque jamais de sa vie sentimentale. Ou alors sur l’oreiller. Elle Ă©voquait des hommes ou des situations qui me rendaient fou mais ça, c’était pour l’oreiller
 J’étais Ă  la merci de cette femme, de son petit air coquin quand elle faisait semblant de se tromper de prĂ©nom dans le noir. Je paraissais vexĂ© mais j’étais anĂ©anti. Je la prenais plus brutalement encore alors que je rĂȘvais de la serrer dans mes bras. Quand l’un de nous deux jouait, l’autre souffrait. C’était complĂštement absurde. Je rĂȘvais de l’attraper et de la secouer jusqu’à ce qu’elle le crache, son venin. Qu’elle me le dise qu’elle m’aimait. Qu’elle me le dise bon sang. Mais je ne pouvais pas, c’était moi le salaud. C’était de ma faute tout ça
 Il s’était levĂ© pour reprendre son verre. - Qu’est-ce que je croyais ? Que ça allait durer comme ça des annĂ©es ? Des annĂ©es et des annĂ©es ? Non, je n’y croyais pas. Nous nous quittions furtivement, tristes et empotĂ©s sans jamais parler de la prochaine fois. Non, c’était intenable
 Et plus je renĂąclais, plus je l’aimais, et plus je l’aimais, moins j’y croyais. Je me sentais dĂ©passĂ©, impuissant, ficelĂ© sur ma toile. Immobile, rĂ©signĂ©. - RĂ©signĂ© Ă  quoi ? - À la perdre un jour
 - Je ne vous comprends pas. - Si
 Bien sĂ»r que tu me comprends
 Qu’est-ce que tu voulais que je fasse, hein ? Tu ne rĂ©ponds rien ? - Non. - Non, bien sĂ»r que tu ne peux pas rĂ©pondre
 Tu es la personne la moins bien placĂ©e au monde pour rĂ©pondre Ă  cette question
 - Vous lui promettiez quoi exactement ? - Je ne me souviens plus
 pas grand-chose j’imagine, ou alors l’inimaginable. Non, pas grand-chose
 J’avais l’honnĂȘtetĂ© de fermer les yeux quand elle me posait des questions et de l’embrasser quand elle attendait une rĂ©ponse. J’avais presque cinquante ans et je me trouvais vieux. Je pensais que c’était la fin du parcours. Une fin ensoleillĂ©e
 Je me disais Ne brusquons rien, elle est si jeune, c’est elle qui partira la premiĂšre », et, Ă  chaque fois que je la retrouvais, j’étais Ă©merveillĂ© mais surpris aussi. Comment ? Elle est encore lĂ  ? Mais pourquoi ? Je voyais mal ce qu’elle trouvait d’aimable en moi, je me disais Pourquoi mettre la pagaille puisque c’est elle qui va me quitter ? » C’était obligĂ©, c’était fatal. Il n’y avait aucune raison pour qu’elle soit encore lĂ  la fois suivante, aucune raison
 À la fin, j’en venais mĂȘme Ă  espĂ©rer qu’elle n’y soit pas. Jusqu’à prĂ©sent, la Vie s’était si bien chargĂ©e de tout dĂ©cider Ă  ma place, pourquoi aurait-il fallu que ça change ? Pourquoi ? Je l’avais prouvĂ© quand mĂȘme que je n’étais pas douĂ© pour prendre les choses en main
 Dans mon mĂ©tier, si, c’était un jeu et j’étais le meilleur, mais cĂŽtĂ© jardin ? Je prĂ©fĂ©rais subir, je prĂ©fĂ©rais me consoler en me rappelant que j’étais celui qui subissait. Je prĂ©fĂ©rais rĂȘver ou regretter. C’est tellement plus simple
 Ma grand-tante paternelle, qui Ă©tait russe, me rĂ©pĂ©tait souvent - Toi, tu es comme mon pĂšre, tu as la nostalgie des montagnes. - De quelles montagnes, Mouchka ? Lui demandais-je. - De celles que tu n’as pas connues, voyons !” - Elle vous disait ça ? - Oui. Elle me le rĂ©pĂ©tait Ă  chaque fois que je regardais par la fenĂȘtre
 - Et qu’est-ce que vous regardiez ? - Les autobus ! Il riait. - Encore un personnage qui t’aurait plu
 Un vendredi je t’en reparlerai. - On ira Chez Dominique alors
 - On ira oĂč tu voudras, je te l’ai dĂ©jĂ  dit. Il a rempli mon bol. - Mais elle, qu’est-ce qu’elle faisait pendant ce temps-lĂ  ? - Je ne sais pas
 Elle travaillait. Elle avait trouvĂ© une place Ă  l’Unesco et l’avait quittĂ©e peu de temps aprĂšs. Elle n’aimait pas traduire leurs salamalecs. Elle ne supportait pas de rester enfermĂ©e des journĂ©es entiĂšres Ă  Ăąnonner le prĂȘchi-prĂȘcha des hommes politiques. Elle prĂ©fĂ©rait le monde du business oĂč l’adrĂ©naline Ă©tait de meilleure qualitĂ©. Elle se baladait, rendait visite Ă  ses frĂšres, sƓurs et amis Ă©parpillĂ©s aux quatre coins du monde. Elle est restĂ©e un moment en NorvĂšge mais elle ne les aimait pas non plus, ces ayatollahs aux yeux clairs, et puis elle avait tout le temps froid
 Et quand elle en avait assez des dĂ©calages horaires, elle restait Ă  Londres et traduisait des notices techniques. Elle adorait ses neveux. - Mais Ă  part le boulot ? - Ah, ça
 MystĂšre et boule de gomme. Dieu sait que j’ai essayĂ© de lui tirer les vers du nez pourtant
 Elle se fermait, biaisait, se faufilait entre mes questions. - Laisse-moi au moins ça, me disait-elle, laisse-moi au moins cette dignitĂ©-lĂ . La dignitĂ© de celles qui font Back Street. Ce n’est pas trop te demander quand mĂȘme ? Ou alors elle me rendait la monnaie de ma piĂšce et me torturait en riant. - Au fait, je ne t’ai pas dit que je m’étais mariĂ©e le mois dernier ? C’est bĂȘte, je voulais te montrer des photos mais je les ai oubliĂ©es. Il s’appelle Billy, il n’est pas trĂšs malin mais il s’occupe bien de moi, tu sais
 - Ça vous faisait rire ? - Non. Pas tellement. - Vous l’aimiez ? - Oui. - Vous l’aimiez comment ? - Je l’aimais. - Et vous gardez quel souvenir de ces annĂ©es-lĂ  ? - Une vie en pointillé  Rien. Quelque chose. Puis rien de nouveau. Puis quelque chose. Puis rien encore
 Du coup, c’est passĂ© trĂšs vite
 Quand j’y repense, j’ai l’impression que cette histoire n’a durĂ© qu’une saison
 MĂȘme pas une saison, un souffle. Une espĂšce de mirage
 Il nous manquait la vie quotidienne. C’est de ça dont Mathilde souffrait le plus je crois
 Je m’en doutais, note bien, mais j’en ai eu la preuve un soir, aprĂšs une longue journĂ©e de travail. Quand je suis rentrĂ©, elle Ă©tait assise devant un petit bureau et Ă©crivait quelque chose sur le papier Ă  lettres de l’hĂŽtel. Elle avait dĂ©jĂ  rempli une dizaine de pages de sa petite Ă©criture serrĂ©e. - À qui tu Ă©cris comme ça ? Lui ai-je demandĂ© en me penchant sur son cou. - À toi. - À moi ? Elle me quitte, ai-je eu le temps de penser et, dĂ©jĂ , je ne me sentais plus si bien. - Qu’est-ce que tu as ? Tu es tout pĂąle. Ça ne va pas ? - Pourquoi tu m’écris ? - Oh, en fait je ne t’écris pas vraiment, j’écris ce que j’ai envie de faire avec toi
 Il y avait des feuilles partout. Autour d’elle, Ă  ses pieds, sur le lit. J’en ai pris une au hasard 
 pique-niquer, faire la sieste au bord d’une riviĂšre, manger des pĂȘches, des crevettes, des croissants, du riz gluant, nager, danser, m’acheter des chaussures, de la lingerie, du parfum, lire le journal, lĂ©cher les vitrines, prendre le mĂ©tro, surveiller l’heure, te pousser quand tu prends toute la place, Ă©tendre le linge, aller Ă  l’OpĂ©ra, Ă  Bayreuth, Ă  Vienne, aux courses, au supermarchĂ©, faire des barbecues, rĂąler parce que tu as oubliĂ© le charbon, me laver les dents en mĂȘme temps que toi, t’acheter des caleçons, tondre la pelouse, lire le journal par-dessus ton Ă©paule, t’empĂȘcher de manger trop de cacahouĂštes, visiter les caves de la Loire, et celles de la Hunter Valley, faire l’idiote, jacasser, te prĂ©senter Martha et Tino, cueillir des mĂ»res, cuisiner, retourner au Vietnam, porter un sari, jardiner, te rĂ©veiller encore parce que tu ronfles, aller au zoo, aux puces, Ă  Paris, Ă  Londres, Ă  Melrose, Ă  Piccadilly, te chanter des chansons, arrĂȘter de fumer, te demander de me couper les ongles, acheter de la vaisselle, des bĂȘtises, des choses qui ne servent Ă  rien, manger des glaces, regarder les gens, te battre aux Ă©checs, Ă©couter du jazz, du reggae, danser le mambo et le cha-cha-cha, m’ennuyer, faire des caprices, bouder, rire, t’entortiller autour de mon petit doigt, chercher une maison avec vue sur les vaches, remplir d’indĂ©cents Caddie, repeindre un plafond, coudre des rideaux, rester des heures Ă  table Ă  discuter avec des gens intĂ©ressants, te tenir par la barbichette, te couper les cheveux, enlever les mauvaises herbes, laver la voiture, voir la mer, revoir de vieux nanars, t’appeler encore, te dire des mots crus, apprendre Ă  tricoter, te tricoter une Ă©charpe, dĂ©faire cette horreur, recueillir des chats, des chiens, des perroquets, des Ă©lĂ©phants, louer des bicyclettes, ne pas s’en servir, rester dans un hamac, relire les Bicot de ma grandmĂšre, revoir les robes de Suzy, boire des margaritas Ă  l’ombre, tricher, apprendre Ă  me servir d’un fer Ă  repasser, jeter le fer Ă  repasser par la fenĂȘtre, chanter sous la pluie, fuir les touristes, m’enivrer, te dire toute la vĂ©ritĂ©, me souvenir que toute vĂ©ritĂ© n’est pas bonne Ă  dire, t’écouter, te donner la main, rĂ©cupĂ©rer mon fer Ă  repasser, Ă©couter les paroles des chansons, mettre le rĂ©veil, oublier nos valises, m’arrĂȘter de courir, descendre les poubelles, te demander si tu m’aimes toujours, discuter avec la voisine, te raconter mon enfance Ă  BahreĂŻn, les bagues de ma nounou, l’odeur du hennĂ© et les boulettes d’ambre, faire des mouillettes, des Ă©tiquettes pour les pots de confiture
 Et ça continuait comme ça pendant des pages et des pages. Des pages et des pages
 Je te dis lĂ  ce qui me passe par la tĂȘte, ce dont je me souviens. C’était incroyable. - Depuis combien de temps tu rĂ©diges ça ? - Depuis ton dĂ©part. - Mais pourquoi ? - Parce que je m’ennuie, m’a-t-elle rĂ©pondu sur un ton joyeux, je meurs d’ennui, figure-toi ! J’ai ramassĂ© tout ce fourbi et je me suis assis sur le bord du lit pour y voir plus clair. Je souriais mais en vĂ©ritĂ©, tant de dĂ©sir, tant d’énergie me paralysaient. Mais je souriais quand mĂȘme. Elle savait dire les choses de façon si drĂŽle, si spirituelle et puis elle guettait mes rĂ©actions. Sur une des pages, coincĂ© entre repartir Ă  zĂ©ro » et coller des photos », il y avait un enfant », comme ça, sans commentaires. J’ai continuĂ© Ă  inspecter cette immense liste sans moufter pendant qu’elle se mordait les joues. - Alors ? Elle ne respirait plus. Qu’est-ce que tu en penses ? - Qui sont Martha et Tino ? Ai-je demandĂ©. À la forme de sa bouche, Ă  la façon dont ses Ă©paules se sont affaissĂ©es, Ă  sa main qui tombait, j’ai su que j’allais la perdre. Qu’en posant cette question idiote, j’avais posĂ© ma tĂȘte sur le billot. Elle est partie dans la salle de bains et a rĂ©pondu “ des gens biens ” avant de fermer la porte. Et au lieu de la rejoindre, au lieu de me jeter Ă  ses pieds en lui disant que, oui, tout ce qu’elle voudrait, puisque oui, j’étais sur cette terre pour la rendre heureuse, je suis allĂ© sur le balcon fumer une cigarette. - Et alors ? - Alors rien. Elle avait mauvais goĂ»t. Nous sommes descendus dĂźner. Mathilde Ă©tait belle. Plus belle que jamais me semblait-il. Et vivante, et gaie. Tout le monde la regardait. Les femmes se retournaient et les hommes me souriaient. Elle Ă©tait
 comment te dire
 elle irradiait
 Sa peau, son visage, son sourire, ses cheveux, ses gestes, tout en elle captait la lumiĂšre et la renvoyait avec grĂące. C’était un mĂ©lange de vitalitĂ© et de douceur qui ne cessait de me surprendre. Tu es belle », lui avouais-je, elle haussait les Ă©paules, C’est dans tes yeux », Oui, acquiesçais-je, c’est dans mes yeux
 » Et quand je pense Ă  elle aujourd’hui, aprĂšs toutes ces annĂ©es, c’est la premiĂšre image qui me vient Ă  l’esprit elle, son long cou, ses yeux sombres et sa petite robe marron dans cette salle Ă  manger autrichienne en train de hausser les Ă©paules. D’ailleurs, c’était exprĂšs, toute cette beautĂ©, toute cette grĂące. Elle savait trĂšs bien ce qu’elle faisait ce soir-lĂ  elle se rendait inoubliable. Peut-ĂȘtre que je me trompe mais je ne crois pas
 C’était son chant du cygne, ses adieux, son mouchoir Ă  la fenĂȘtre. Elle Ă©tait si fine, elle devait sentir cela
 MĂȘme sa peau Ă©tait plus douce. En Ă©tait-elle consciente ? Était-ce gĂ©nĂ©reux de sa part ou seulement cruel ? Les deux, je pense
 Les deux
 Et cette nuit-lĂ , aprĂšs les caresses et les gĂ©missements, elle m’a dit - Je peux te poser une question ? - Oui. - Tu me rĂ©pondras ? - Oui. J’avais rouvert les yeux. - Tu ne trouves pas qu’on va bien ensemble ?” - J’étais déçu, je m’attendais Ă  quelque chose de plus
 euh
 flamboyant comme question. - Si. - Tu trouves aussi ? - Oui. - Moi je trouve qu’on va bien ensemble
 J’aime ĂȘtre avec toi parce que je ne m’ennuie jamais. MĂȘme quand on ne se parle pas, mĂȘme quand on ne se touche pas, mĂȘme quand on n’est pas dans la mĂȘme piĂšce, je ne m’ennuie pas. Je ne m’ennuie jamais. Je crois que c’est parce que j’ai confiance en toi, j’ai confiance en tes pensĂ©es. Tu peux comprendre ça ? Tout ce que je vois de toi et tout ce que je ne vois pas, je l’aime. Pourtant je connais tes dĂ©fauts. Mais justement, j’ai l’impression que tes dĂ©fauts vont bien avec mes qualitĂ©s. Nous n’avons pas peur des mĂȘmes choses. MĂȘme nos dĂ©mons vont bien ensemble ! Toi, tu vaux mieux que ce que tu montres et moi, c’est le contraire. Moi, j’ai besoin de ton regard pour avoir un peu plus de
 de la matiĂšre ? Comment dit-on en français ? De la constance ? Quand on veut dire que quelqu’un est intĂ©ressant Ă  l’intĂ©rieur ? - Profondeur ? - C’est ça ! Moi je suis comme un cerf-volant, si quelqu’un ne tient pas la bobine, pfft, je m’envole
 Et toi, c’est drĂŽle, je me dis souvent que tu es assez fort pour me retenir et assez intelligent pour me laisser filer
 - Pourquoi tu me parles de tout ça ? - J’avais envie que tu le saches. - Pourquoi maintenant ? - Je ne sais pas
 Est-ce que ce n’est pas incroyable de rencontrer quelqu’un et de se dire avec cette personne, je suis bien. - Mais pourquoi tu me dis ça maintenant ? - Parce que quelquefois j’ai l’impression que tu ne te rends pas compte de la chance que nous avons
 - Mathilde ? - Oui. - Tu vas me quitter ? - Non. - Tu n’es pas heureuse ? - Pas trĂšs. Et nous nous sommes tus. Le lendemain nous sommes allĂ©s crapahuter dans la montagne et le surlendemain, nous sommes repartis chacun de notre cĂŽtĂ©. Ma tisane refroidissait. - C’est fini ? - Presque. Quelques semaines plus tard, elle est venue Ă  Paris et m’a demandĂ© de lui accorder un moment. J’étais heureux et contrariĂ© Ă  la fois. Nous avons marchĂ© longtemps en parlant Ă  peine et puis je l’ai emmenĂ©e dĂ©jeuner au rond-point des Champs-ÉlysĂ©es. Alors que je m’enhardissais Ă  prendre ses mains dans les miennes, elle m’a assommĂ© - Pierre, je suis enceinte. - De qui ? Ai-je rĂ©pondu en blĂȘmissant. Elle s’est levĂ©e radieuse. - De personne. Elle a enfilĂ© son manteau et repoussĂ© sa chaise. Un sourire magnifique barrait son visage. - Je te remercie, tu as prononcĂ© les mots que j’attendais. Oui, j’ai fait tout ce chemin pour m’entendre dire ces deux mots. C’était un peu risquĂ©. Je bafouillais, je voulais me relever mais le pied de la table me
 Elle a fait un signe - Ne bouge pas. Ses yeux brillaient. J’ai eu ce que je voulais. Je n’arrivais pas Ă  te quitter. Je ne peux pas passer ma vie Ă  t’attendre mais je
 Rien. Il fallait que j’entende ces deux mots. Il fallait que je la voie ta lĂąchetĂ©. Que je la touche avec mon doigt, tu comprends ? Non, ne bouge pas
 ne bouge pas, je te dis ! Ne bouge pas ! Il faut que j’y aille maintenant. Je suis si fatiguĂ©e
 Si tu savais comme je suis fatiguĂ©e, Pierre
 Je
 je n’en peux plus
 Je m’étais levĂ©. - Tu vas me laisser partir, dis ? Tu vas me laisser ? Il faut que tu me laisses partir maintenant, il faut que tu me laisses
 Elle s’étranglait. Tu vas me laisser partir, n’est-ce pas ? J’ai acquiescĂ©. - Mais tu le sais que je t’aime, tu le sais, n’est-ce pas ? Ai-je fini par lĂącher. Elle s’est Ă©loignĂ©e et s’est retournĂ©e avant de franchir la porte. Elle m’a regardĂ© fixement et a secouĂ© la tĂȘte de gauche Ă  droite. Mon beau-pĂšre s’était levĂ© pour tuer une bestiole sur la lampe. Il a versĂ© la fin de la bouteille dans son verre. - Maintenant c’est fini ? - Oui. - Vous ne l’avez pas rattrapĂ©e ? - Comme dans les films ? - Oui. Au ralenti
 - Non. Je suis allĂ© me coucher. - Vous coucher ? - Oui. - Mais oĂč ? - Chez moi, pardi ! - Pourquoi ? - Une grande faiblesse, une grande lassitude
 Depuis plusieurs mois dĂ©jĂ , j’étais obsĂ©dĂ© par un arbre mort. À n’importe quelle heure du jour ou de la nuit, je rĂȘvais que j’escaladais un arbre mort et que je me laissais glisser dans son tronc creux. Et la chute Ă©tait douce, douce
 comme si je rebondissais sur la corolle d’un parachute. Je rebondissais, je tombais plus bas et je rebondissais encore. J’y pensais constamment. En rĂ©union, Ă  table, dans ma voiture, en cherchant le sommeil. J’escaladais mon arbre et je me laissais dĂ©gringoler. - DĂ©pression ? - Pas de grand mot, s’il te plaĂźt, pas de grand mot
 Tu sais bien comment ça se passe chez les Dippel, ricana-t-il, tu l’as dit tout Ă  l’heure. Ni humeur, ni sĂ©crĂ©tion, ni bile. Non, je ne pouvais dĂ©cemment pas m’offrir ce genre de caprice. J’ai donc eu une hĂ©patite. C’était plus convenable. Je me suis rĂ©veillĂ© le lendemain, le blanc des yeux jaune citron, le dĂ©goĂ»t de tout et les urines sombres et voilĂ , le tour Ă©tait jouĂ©. Une hĂ©patite carabinĂ©e pour un homme qui voyageait, ça tombait sous le sens. C’est Christine qui m’avait dĂ©shabillĂ© ce jour-lĂ . Je ne pouvais plus faire un geste
 Pendant un mois, je suis restĂ© dans mon lit, nausĂ©eux et Ă©puisĂ©. Quand j’avais soif, j’attendais que quelqu’un entre et me tende un verre et quand j’avais froid, je ne trouvais pas la force de remonter ma couverture. Je ne parlais plus. J’interdisais qu’on ouvre les volets. J’étais devenu un vieillard. La bontĂ© de Suzanne, mon impuissance, les chuchotements des enfants, tout m’épuisait. Est-ce qu’on ne pouvait pas fermer la porte une bonne fois pour toutes et me laisser seul avec mon chagrin ? Est-ce que Mathilde serait venue si
 Est-ce que
 Oh
 J’étais si fatiguĂ©. Et mes souvenirs, mes regrets et ma lĂąchetĂ© me terrassaient plus encore. Les yeux mi-clos et le cƓur au bord des lĂšvres, je songeais au dĂ©sastre qu’avait Ă©tĂ© ma vie. Le bonheur Ă©tait lĂ  et je l’avais laissĂ© passer pour ne pas me compliquer l’existence. C’était si simple pourtant. Il suffisait de tendre la main. Le reste se serait bien arrangĂ© d’une façon ou d’une autre. Tout finit par s’arranger quand on est heureux, tu ne penses pas ? - Je ne sais pas. - Si, moi je sais. Tu peux me faire confiance, ChloĂ©. Je ne sais pas grandchose mais ça, je le sais. Je ne suis pas plus clairvoyant qu’un autre seulement j’ai deux fois ton Ăąge. Deux fois ton Ăąge, tu te rends compte ? La vie, mĂȘme quand tu la nies, mĂȘme quand tu la nĂ©gliges, mĂȘme quand tu refuses de l’admettre, est plus forte que toi. Plus forte que tout. Des gens sont revenus des camps et ont refait des enfants. Des hommes et des femmes qu’on a torturĂ©s, qui ont vu mourir leurs proches et brĂ»ler leur maison ont recommencĂ© Ă  courir aprĂšs l’autobus, Ă  commenter la mĂ©tĂ©o et Ă  marier leurs filles. C’est incroyable mais c’est comme ça. La Vie est plus forte que tout. Et puis, qui sommes-nous pour nous accorder tant d’importance ? Nous nous agitons, nous parlons fort et alors ? Et pourquoi ? Et puis quoi, aprĂšs ? - Qu’est devenue la petite Sylvie pour laquelle Paul est mort dans la piĂšce d’à cĂŽtĂ© ? Qu’est-elle devenue, elle ? Le feu va mourir
 Il s’est levĂ© pour remettre une bĂ»che. Et moi, songeais-je, oĂč je suis dans tout ça ? Je suis oĂč, moi ? Il Ă©tait agenouillĂ© devant la cheminĂ©e. - Tu me crois, ChloĂ© ? Tu me crois quand je te dis que la vie est plus forte que toi ? - SĂ»rement
 - Tu me fais confiance ? - Ça dĂ©pend des jours. - Et aujourd’hui ? - Oui. - Alors tu ferais bien d’aller te coucher maintenant. - Vous ne l’avez jamais revue ? Vous n’avez jamais essayĂ© de prendre de ses nouvelles ? Vous ne lui avez jamais tĂ©lĂ©phonĂ© ? Il a soupirĂ©. - Tu n’en as pas eu assez ? - Non. - J’ai appelĂ© chez sa sƓur bien sĂ»r, j’y suis mĂȘme allĂ© mais ça n’a servi Ă  rien. L’oiseau s’était envolé  Pour la retrouver il aurait dĂ©jĂ  fallu que je sache dans quel hĂ©misphĂšre la chercher
 Et puis j’avais promis de la laisser tranquille. C’est une qualitĂ© que l’on peut me reconnaĂźtre tout de mĂȘme. Je suis beau joueur. - C’est complĂštement idiot ce que vous dites lĂ . Le problĂšme n’était pas d’ĂȘtre bon ou mauvais joueur. Beau ou mauvais perdant. C’est complĂštement dĂ©bile comme raisonnement, dĂ©bile et puĂ©ril. Ce n’était pas un jeu quand mĂȘme
 Si ? C’était un jeu ? Il se rĂ©jouissait. - DĂ©cidĂ©ment, je ne me fais pas de souci pour toi, ma grande. Tu n’imagines pas l’estime que je te porte. Tu es tout ce que je ne suis pas, tu es ma gĂ©ante et ton bon sens nous sauvera tous
 - Vous ĂȘtes soĂ»l, c’est ça ? - Tu veux rire ? Je ne me suis jamais senti aussi bien ! Il s’est relevĂ© en se tenant au linteau de la cheminĂ©e. - Allons nous coucher maintenant. - Vous n’avez pas fini
 - Tu veux m’entendre radoter encore ? ! - Oui. - Pourquoi ? - Parce que j’aime les belles histoires. - Tu trouves que c’est une belle histoire ? - Oui. - Moi aussi
 - Vous l’avez revue, n’est-ce pas ? Au Palais-Royal ? - Comment tu sais ça ? - C’est vous qui me l’avez dit ! - Ah bon ? J’ai dit ça ? J’opinai. - Alors ce sera le dernier acte
 Ce jour-lĂ , j’invitais des clients au Grand VĂ©four. C’est Françoise qui avait tout organisĂ©. MillĂ©simes, mains dans le dos et mignardises. J’avais sorti le grand jeu. Depuis le temps que je devais m’y coller
 Ce fut un dĂ©jeuner sans intĂ©rĂȘt. J’ai toujours dĂ©testĂ© ça. Passer des heures Ă  table Ă  plaisanter avec des types dont je me fous complĂštement et me cogner toutes leurs histoires de boulot
 En plus, je passais pour le rabat-joie de la bande Ă  cause de mon foie. Pendant trĂšs longtemps, je n’ai plus bu une goutte d’alcool et ai demandĂ© aux garçons de me dire trĂšs prĂ©cisĂ©ment ce qu’il y avait dans chaque plat. Enfin, tu vois le genre d’emmerdeur
 Et puis, je n’aime pas tellement la compagnie des hommes. Ils m’ennuient. Rien n’a changĂ© depuis les annĂ©es de pensionnat. Les farauds sont toujours les mĂȘmes et les fayots aussi
 J’en Ă©tais donc lĂ  de ma vie, devant la porte d’un grand restaurant, un peu lourd, un peu las Ă  taper dans le dos d’un autre gros cigare en rĂȘvant du moment oĂč je pourrais enfin desserrer ma ceinture quand je l’ai aperçue. Elle marchait vite, courait presque et traĂźnait derriĂšre elle un petit garçon mĂ©content. Mathilde ? Ai-je murmurĂ©. Je l’ai vue pĂąlir. J’ai vu le sol se dĂ©rober sous ses pieds. Elle n’a pas ralenti. Mathilde !, ai-je rĂ©pĂ©tĂ© plus fort, Mathilde ! Et je suis parti comme un voleur. Mathiiilde ! Je hurlais presque. Le petit garçon s’était retournĂ©. Je l’ai invitĂ©e Ă  boire un cafĂ© sous les arcades. Elle n’a pas eu la force de refuser, elle
 Elle Ă©tait si belle encore. Je me forçais. J’étais un peu gauche, un peu bĂȘte, un peu badin. C’était difficile. OĂč vivait-elle ? Pourquoi Ă©tait-elle ici ? Qu’elle me parle d’elle. Dis-moi comment tu vas ? Tu vis ici ? Tu vis Ă  Paris ? Elle rĂ©pondait de mauvaise grĂące. Elle Ă©tait mal Ă  l’aise et mordillait le bout de sa petite cuillĂšre. De toute façon je ne l’écoutais pas, je ne l’écoutais plus. Je regardais ce petit garçon blond qui avait rĂ©cupĂ©rĂ© tous les quignons de pain des tables voisines et lançait des miettes aux oiseaux. Il avait fait deux tas, un pour les moineaux, l’autre pour les pigeons et rĂ©gentait tout ce petit monde avec passion. Les pigeons ne devaient pas venir manger les miettes des plus petits. “ Go away you ! ” criait-il en leur donnant des coups de pied, “ Go away you stupid bird ! ” Au moment oĂč je me suis retournĂ© vers sa mĂšre en ouvrant la bouche, elle m’a coupĂ© la parole - Ne te fatigue pas, Pierre, ne te fatigue pas. Il n’a pas cinq ans
 Il n’a pas cinq ans, tu comprends ?” J’ai refermĂ© ma bouche. - Comment s’appelle-t-il ? - Tom. - Il parle anglais ? - Anglais et français. - Tu as d’autres enfants ? - Non. - Tu
 Tu
 Je veux dire
 tu vis avec quelqu’un ? Elle a raclĂ© le sucre au fond de sa tasse et m’a souri. - Il faut que j’y aille maintenant. On nous attend. - DĂ©jĂ  ? Elle s’était levĂ©e. - Je peux vous dĂ©poser quelque part, je
 Elle a pris son sac. - Pierre, je t’en prie
 Et lĂ , j’ai craquĂ©. Je ne m’y attendais pas du tout. Je me suis mis Ă  pleurer comme une madeleine. Je
 Il Ă©tait pour moi ce gamin. C’était Ă  moi de lui montrer comment chasser les pigeons, c’était Ă  moi de ramasser son pull et de lui remettre sa casquette. C’était Ă  moi de le faire. En plus, je savais qu’elle me mentait ! Il avait plus de quatre ans ce gamin-lĂ . Je n’étais pas aveugle quand mĂȘme ! Je savais bien qu’elle me mentait. Pourquoi elle me mentait comme ça ? ! Pourquoi elle m’avait menti ? On n’a pas le droit de mentir comme ça ! On
 Je sanglotais. Je voulais lui dire que
 Elle a poussĂ© sa chaise. - Je te laisse maintenant. Moi j’ai dĂ©jĂ  tout pleurĂ©. - Et aprĂšs ? - AprĂšs je suis reparti
 - Non mais je veux dire, avec Mathilde, aprĂšs ? - AprĂšs c’est fini. - Fini, fini ? - Fini. Long silence. - Elle mentait ? - Non. Depuis j’ai fait attention. J’ai comparĂ© avec d’autres gamins, avec tes filles
 non, je crois qu’elle ne mentait pas. Les enfants sont si grands maintenant
 Avec toutes ces vitamines que vous mettez dans leurs biberons
 Je pense Ă  lui quelquefois. Il doit avoir presque quinze ans aujourd’hui
 Il doit ĂȘtre immense ce gosse. - Vous n’avez jamais essayĂ© de la revoir ? - Non. - Et aujourd’hui ? Peut-ĂȘtre qu’elle
 - Aujourd’hui c’est fini. Aujourd’hui je
 Je ne sais mĂȘme pas si je serais encore capable de la
 Il dĂ©pliait le pare-feu. - Je n’ai plus envie d’en parler. Il est allĂ© fermer la porte d’entrĂ©e Ă  clĂ© et a Ă©teint toutes les lampes. Je ne bougeais pas du canapĂ©. - Allez, Chloé  Tu as vu l’heure ? Va te coucher maintenant. Je ne rĂ©pondais pas. - Tu m’entends ? - Alors c’est une connerie l’amour ? C’est ça ? Ça ne marche jamais ? - Si, ça marche. Mais il faut se battre
 - Se battre comment ? - Se battre un petit peu. Un petit peu chaque jour, avoir le courage d’ĂȘtre soimĂȘme, dĂ©cider d’ĂȘtre heur
 - Oh ! Comme c’est beau ce que vous dites lĂ  ! On dirait du Paulo Coelho
 - Moque-toi, moque-toi
 - Être soi-mĂȘme, ça veut dire planter sa femme et ses gosses ? - Qui parle de planter ses gosses ? - Oh ! ArrĂȘtez. Vous comprenez bien ce que je veux dire
 - Non. Je m’étais remise Ă  pleurer. - Allez ! Partez maintenant. Laissez-moi. Je n’en peux plus de vos bons sentiments. Je n’en peux plus. Vous me gavez monsieur l’ÉcorchĂ© vif, vous me gavez
 - J’y vais, j’y vais. DemandĂ© si gentiment
 Au moment de sortir de la piĂšce, il a dit - Une derniĂšre histoire, je peux ? Je ne voulais pas. - Un jour, il y a bien longtemps, je suis allĂ© Ă  la boulangerie avec ma petite fille. C’était rare que j’aille Ă  la boulangerie avec ma petite fille. C’était rare que je lui donne la main et c’était plus rare encore que je sois seul avec elle. Ce devait ĂȘtre un dimanche matin, il y avait du monde dans la boulangerie, les gens achetaient des fraisiers ou des vacherins. En sortant, ma petite fille m’a demandĂ© de lui donner le croĂ»ton de la baguette. J’ai refusĂ©. Non, lui ai-je rĂ©pondu, non. Quand nous serons Ă  table. Nous sommes rentrĂ©s et nous nous sommes tous assis pour dĂ©jeuner. Une gentille petite famille. C’est moi qui ai coupĂ© le pain. J’y tenais. Je voulais honorer ma promesse. Mais quand j’ai tendu le croĂ»ton Ă  ma petite fille, elle l’a donnĂ© Ă  son frĂšre. - Mais tu m’as dit que tu le voulais
 - C’était tout Ă  l’heure que je le voulais, a-t-elle rĂ©pondu en dĂ©pliant sa serviette. - Mais, il a le mĂȘme goĂ»t, ai-je insistĂ©, c’est le mĂȘme
 Elle a tournĂ© la tĂȘte. - Non merci. - Je vais aller me coucher, je vais te laisser dans le noir si c’est ça que tu veux mais avant d’éteindre, je voudrais poser une question. Je ne te la pose pas Ă  toi, je ne me la pose pas Ă  moi, je la pose aux boiseries - Est-ce que cette petite fille tĂȘtue n’aurait pas prĂ©fĂ©rĂ© vivre avec un papa plus heureux ? Fin

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